Subversion: lorsque Washington accuse Moscou

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Washington accuse Moscou de financer des mouvements politiques et caritatifs en vue de déstabiliser l’Europe politiquement...

Selon le quotidien britannique The Telegraph, les Etats-Unis vont lancer une enquête approfondie en Europe afin de déterminer à quel point les autorités russes auraient infiltré les milieux politiques européens en vue de « porter atteinte à la cohésion politique » de l'Union. Une stratégie du Kremlin, qui reposerait, selon Washington, depuis une décennie sur des « financements clandestins » alloués par les autorités russes à des organisations politiques ou caritatives.

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Pour les autorités américaines, l'ombre de Moscou planerait derrière l'organisation du référendum au Pays-Bas, une allégation qui se justifierait par le fait que certains arguments développés dans le soutien de cette consultation nationale, relative au rapprochement entre l'Union Européenne et l'Ukraine, « ressembleraient fort » à ceux que l'on retrouve dans la « propagande russe ». Un plébiscite, qui n'a rien à voir avec une initiative du gouvernement hollandais, rendu possible par 420 000 signatures rassemblées par une pétition: soit bien plus que les 300 000 requises par la constitution.

Pour diligenter cette enquête de la plus haute importance sur le vieux continent, le Congrès américain a mandaté James Clapper, Directeur du renseignement national — qui à la tête de la Communauté du Renseignement, coordonne près de 17 services de renseignements — on y retrouve aussi bien le Trésor, la Marine, les gardes côtes et le Département d'Etat que le FBI et la NSA.

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Aucune précision n'est apportée quant au type d'organisations dont les comptes vont être passés au crible par cette enquête fédérale américaine, afin de trouver des « liens » entre ces acteurs nationaux-européens et la Russie. Le journaliste de The Telegraph explique néanmoins que certains partis d'extrême droite semblent correspondre parfaitement: comme Jobbik en Hongrie, Aube Dorée en Grèce, la Ligue du Nord en Italie ou encore… Le Front National en France, notamment suite à son prêt de 9 millions d'euros contracté auprès d'une banque russe.

Une information qui n'a pas manqué de faire réagir Wallerand de Saint Just, Trésorier National du Front-National:

​« Ce n'est pas étonnant de la part des États-Unis, mais c'est tout aussi scandaleux, de toute façon il ne sera pas question que les Etats-Unis puissent venir enquêter en quoi que ce soit et une seule minute sur le territoire français. Il n'y a aucune raison que je réponde à quelqu'un qui provienne des Etats-Unis sur ces questions-là, il n'est pas question qu'il m'appelle pour me poser une question, s'il le fait je ferai en sorte qu'il quitte le territoire français le plus rapidement possible, enfin c'est incroyable. Mais bon pour le moment, il ne s'agit que d'une information de presse […] Je ne sais pas du tout si c'est vrai, mais si c'est vrai, c'est scandaleux, mais ça ne pourra pas se réaliser, c'est sûr: en tout cas je ne déférerai à aucune convocation d'une CIA quelconque ».

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Mais ce qui pourrait le plus étonner dans cette annonce, c'est la provenance des accusations d'ingérences via des financements d'organisations politiques: Washington. Washington qui est bien loin d'être exempte d'activités en la matière, comme nous l'explique François Asselineau, Président du parti politique l'Union Populaire Républicaine:

« Quand j'ai pris connaissance de cette nouvelle, j'avoue que j'ai été partagé entre l'envie d'un grand éclat de rire et l'envie d'une grande indignation, parce que s'il y a bien un pays au monde qui ferait bien de balayer devant sa porte quand il s'agit des questions d'infiltration des partis et des mouvements politiques en Europe, c'est bien les Etats-Unis d'Amérique. Les Etats-Unis d'Amérique, je rappelle que depuis 1945, ont une politique constante d'infiltration des milieux politiques ».

Et François Asselineau n'y va pas par quatre chemins lorsqu'il s'agit de citer quelques exemples…

« Premier exemple, le Daily Telegraph lui-même, que vous citez, a révélé le 19 Septembre 2000 dans un article retentissant d'Ambrose Evans-Pritchard […] que les documents classés secret défense du Département d'Etat pour les années 50 et 60 venaient d'être déclassifiés. Qu'apprenait-on dans cet article? On apprenait notamment que Robert Schuman, que Paul-Henri Spaak, étaient traités comme des agents d'influences par les services américains, on a appris que l'American Committee on United Europe avait financé les mouvements pro-européens, par l'intermédiaire de fondations privées, comme la Fondation Ford, on y apprenait également qu'il y avait eu une réunion le 11 Juin 1965 au Département d'Etat, où Robert Marjolin qui à l'époque était le vice-président de la Communauté Economique Européenne, avait été convoqué par le Département d'Etat, et il avait été sommé de s'expliquer sur l'Etat d'avancement de la construction européenne, et en particulier, les dirigeants américains lui avaient demandé où on en était de la mise en place d'une monnaie européenne, ce qui allait devenir ultérieurement l'Euro, et les américains avaient conseillé d'y aller de façon discrète, pour en fait mettre les peuples devant le fait-accompli, qu'il n'y ait pas de débat sur le sujet ».

Si certaines références ont beau dater de la Guerre Froide, certains exemples sont encore nombreux de nos jours:

« Je citerai l'exemple de la création des syndicats, comme Force Ouvrière en France au début de la Guerre Froide, qui a été financé par les services américains, on peut citer également les réseaux Gladio et Stay-behind, où les services américains soutenaient des mouvements d'extrême-droite dans les pays d'Europe en cas d'invasion soviétique et puis on peut citer également, ce qui est d'ailleurs tout à fait d'actualité, des fondations comme par exemple la French-American Foundation, qui a été créé par les Etats-Unis et la France, du temps de Giscard d'Estaing lorsqu'il était Président de la République, et les américains sélectionnent 4 ou 5 personnes par an qu'ils vont formater à leurs intérêts et qu'ils vont promouvoir en France dans les milieux politiques, médiatiques et journalistiques comme étant un peu des agents d'influence […] Côté américain cela avait été lancé par John Negroponte, qui était un homme proche de la C.I.A.».

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Le territoire de l'Union Européenne n'est pas le seul, les pays de l'ex-bloc soviétique sont aussi concernés… Notamment avec le cas de ces révolutions dites « colorées »: le rose en Géorgie, l'orange en Ukraine et les tulipes pour le Kirghizstan, respectivement en 2003, 2004 et 2005 pour ne citer que les plus « emblématiques »…

Des « révolutions » et divers autres opérations de subversion qui ont été soutenues par des organisations telles que l'Institut International Républicain (IRI) de John Mac-Cain, l'Institut National Démocrate pour les Affaires Internationales (NID) de Madeleine Albright, l'Open Society Foundations de George Soros, le National Endowment for Democracy ou encore Freedom House, qui venaient financer des journaux, des hommes et des mouvements politiques d'opposition, allant jusqu'à leur apporter encadrement logistique et formation, des organisations également en charge du recrutement des « observateurs indépendants » et finançant la surveillance du « bon déroulement des élections ».

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Des aides parfois directes: comme au Kirghizstan, où pour la seule année électorale de 2005, 30 millions de dollars avaient été accordés par les Etats-Unis à l'opposition si on en croit la lettre d'autocongratulation que Stephen Young, ambassadeur américain au Kirghizstan, avait envoyée à Washington avant le début des émeutes qui allaient conduire à la destitution d'Askar Akaïev. 30 millions de dollars, un montant annuel constituant une « nette augmentation », mais « une augmentation conforme aux instructions du Département d'Etat ».

Et aussi des aides plus indirectes: comme par exemple, l'attribution de bourses à certaines personnalités prometteuses… On pourrait citer à ce titre Mikheil Saakachvili qui, avant d'être le plus jeune président du monde suite au renversement d'Edouard Chevardnadze, a pu suivre ses études à Columbia et à George Washington University, grâce à une bourse du Département d'Etat…

Turkey's President Recep Tayyip Erdogan listens to statements at the COP21, United Nations Climate Change Conference, in Le Bourget, outside Paris, Monday, Nov. 30, 2015 - Sputnik Afrique
Après les révélations sur la Turquie, les médias anglo-saxons chargent contre Moscou
Il est aujourd'hui en Ukraine, à la tête de la très russophone Odessa, cette ville fondée par la tsarine Catherine II et qui connut son essor sous la gouvernance d'Armand-Emmanuel du Plessis, Duc de Richelieu. Odessa, ville portuaire et ferroviaire qui se révèle donc nœud stratégique pour la Transnistrie voisine, depuis que le gouvernement moldave, « changé », lui aussi, en 2009, en a fermé l'espace aérien.

Que dire aussi des déclarations de Victoria Nuland, Secrétaire d'état adjointe affaires européennes et eurasiennes, qui déclarait le 21 Avril 2014 lors d'une interview accordée à la journaliste britanico-iranienne Christiane Amanpour sur CNN, que les Etats-Unis avaient investi, depuis 1991, près de 5 milliards de dollars en Ukraine afin de soutenir « les aspirations du peuple ukrainien à avoir un gouvernement démocratique »…

« Ça fait vraiment penser à cette maxime prêtée à Goebbels que « plus le mensonge est gros plus il a de chances d'être cru » ou alors un autre dicton français qui est « la meilleure défense c'est l'attaque »: les américains en fait reprochent aux russes ce que eux font en Europe depuis bientôt 60 ans ».

Une autre phrase qui pourrait résumer la situation vient du président des Etats-Unis, Barack Obama qui, lorsqu'il accorda, fin janvier 2015, une interview au média en ligne Vox, déclara quant aux buts de la politique étrangère américaine « De temps à autre nous avons à tordre le bras à des pays qui ne voudraient pas faire ce que nous avons besoin qu'ils fassent », avant d'évoquer les différents leviers, économiques, diplomatiques et militaires, dont les Etats-Unis disposent…

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