En Allemagne, rien de nouveau?

© REUTERS / Hannibal HanschkeDer deutsche Innenminister Thomas de Maiziere
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Thomas de Maizière, le Ministre allemand de l’intérieur, serait en faveur d’une fermeture des frontières de l’Allemagne si le nombre de migrants ne diminuait pas. Des préparations seraient en cours, pour faire face à une telle éventualité.

Après avoir ouvert grand les portes aux migrants, la chancelière reviendrait-elle en arrière? Ou est-ce une manœuvre politique?

​L'annonce faite par de Maizière relève à la fois du chantage à l'encontre de Bruxelles, mais aussi d'un moyen de pression à l'encontre des autres pays européens, et, ce, une semaine avant le sommet Turquie-UE. M. Stephan Martens, Président-fondateur de l'Académie franco-allemande des relations internationales de Bordeaux, nous explique ce qu'il en tourne:

« Dans la perspective de la réunion du 7 Mars, lorsqu'il s'agira de négocier avec la Turquie sur la frontière de l'Union, de Maizière fait pression sur ses partenaires européens. L'Allemagne a accueilli plus d'un million de réfugiés en 2015, et en a accueilli encore 100 000 depuis le début de l'année. Ces flux ne risquent pas de diminuer, si les Européens ne se mettent pas d'accord sur une politique commune et sur des instruments pour limiter ces flux.

L'Allemagne vit des tensions politiques majeures ces temps-ci à la veille d'élections dans trois grosses régions allemandes le 13 Mars prochain.

Ces deux points poussent le Ministre de l'Intérieur à faire pression sur les partenaires européens. »

Au même moment, Mme Merkel avoue, dans un entretien sur la chaîne de télévision ARD, ne pas disposer de plan « B », et refuse d'utiliser une politique unilatérale de frontières, qui ne servirait à rien selon elle.

​Un « plan B » pourtant réclamé de plus en plus de l'intérieur, non seulement de l'opposition, mais aussi de son propre camp (CDU). Les différents gouvernements de Länder, notamment la Bavière, réclament des mesures d'urgence. M. Manuel Ochsenreiter, rédacteur du magazine « Zuerst!», nous explique en quoi les propos de Merkel n'ont plus rien de surprenants:

« C'est logique qu'elle annonce ne pas avoir de plan B, car il n'y pas plan A. Abolir les frontières et forcer la communauté européenne à prendre tout le monde qui vient, sans se soucier de savoir s'il s'agit de terroristes ou de vrais réfugiés ou de migrants économiques, ce n'est pas un plan. Ce que l'Allemagne fait actuellement est désastreux pour toute l'Europe, car nous sommes l'aimant le plus fort, nous sommes au cœur de l'Europe; toute personne qui entre en Europe veut finir en Allemagne, des rumeurs sont répandues par les trafiquants, et par les propos de Merkel. Donc tous les pays des Balkans, la Grèce et l'Italie souffrent de la politique de Merkel. Elle distribue donc cette pression sur d'autres pays européens, et c'est désastreux parce que la réputation de l'Allemagne n'a jamais été aussi mauvaise depuis 50 ans. »

Interrogée sur l'impossibilité faite aux migrants de pouvoir passer la frontière entre la Macédoine et la Grèce, elle répond: « nous ne pouvons laisser tomber ce pays », en déclarant que l'UE a sauvé la Grèce, après avoir pu sortir de la crise financière.

​Apparemment, Mme Merkel apprécie davantage les plateaux d'ARD que les ruelles d'Athènes; pourtant c'est sur le terrain que l'on voit les résultats d'une politique.

De ce fait, les propos de de Maizière sont-ils à prendre au sérieux?

« L'Allemagne a une longue expérience de tels propos; notre expérience nous apprend de ne pas prendre cela au sérieux. Parce que le patron de de Maizière est Angela Merkel, et aussi longtemps qu'elle ne changera rien, rien ne se passera. Thomas de Maizière avait déjà fait des commentaires quant à limiter les migrations, mais il n'a jamais réussi, ou cela a été faussé; il n'y aura donc aucun changement lié aux commentaires de Thomas de Maizière. »

A quelques semaines d'élections locales, Mme Merkel n'a pas la cote auprès du peuple allemand. Les contradictions entre la position de son pays et ce qu'elle attend de la Turquie n'arrangent pas cet état de choses.

« La résistance est en train de grandir en Allemagne contre cette politique migratoire, et contre la propagande à laquelle on est exposé jour et nuit. Nous avons des élections la semaine prochaine, et partout le parti AfD, très critique à l'encontre de Merkel et à l'encontre les mensonges des médias « mainstream »; non seulement des mensonges sur la migration, mais aussi sur des problèmes géopolitiques: les gens suivant les nouvelles concernant la Russie, la Syrie et le Donbass préfèrent voter pour l'AfD, qui est une vraie force d'opposition. Le parti d'Angela Merkel va surement souffrir de ce report de votes de la CDU vers l'AfD: beaucoup de membres de la CDU vont perdre leur siège; voilà pourquoi Thomas de Maizière, mais aussi Horst Seehofer, font semblant de créer une « résistance » verbale contre la politique de Merkel, afin de ne pas perdre le vote de l'électorat du CDU. C'est bel et bien une campagne marketing. »

Mme Merkel défend sa ligne en invoquant l'image qu'elle renvoie. En se focalisant sur cette image, Angie semble oublier ce qu'elle dirige: l'Allemagne, et non l'UE. Donc non, rien de nouveau en Allemagne, mais plus dure sera la chute.

Les opinions exprimées dans ce contenu n'engagent que la responsabilité de l'auteur.

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