«La diabolisation de la Russie n'est pas une politique: c'est le signe de son absence»

© Sputnik . Alexei Boitzov / Accéder à la base multimédiaЯнис Юрканс
Янис Юрканс - Sputnik Afrique
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Dans cette interview, l'ancien ministre letton des Affaires étrangères Janis Jurkans évoque la question criméenne, la normalisation des relations avec Moscou et les difficultés économiques de la Lettonie.

- Le gouvernement letton critique constamment la Russie et évoque une prétendue menace russe qui pèserait sur les pays baltes. Mais que pensent les Lettons ordinaires (l'interview accordée au quotidien Izvestia)?

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- Quand on crie en permanence à tous les coins de rue que la Russie va attaquer les pays baltes, que les exercices Zapad constituent en fait les préparatifs d'une agression, cela affecte aussi peu-à-peu les citoyens. En Lettonie on craint effectivement que, par exemple, les non-citoyens puissent se transformer en «bonhommes verts». Quand je rentrerai chez moi, je serai attaqué. Notre principale joueuse de tennis Elena Ostapenko n'est pas venue jouer la Coupe du Kremlin parce que «le Kremlin est un ennemi». La tendance actuelle à travers le monde est à la diabolisation de Moscou et du président Vladimir Poutine. Or la diabolisation de la Russie n'est pas une politique: c'est le signe de son absence. D'autant plus dans un État où vit une grande diaspora russe.

- D'après vous, dans quelle mesure l'économie lettone a-t-elle été affectée suite aux sanctions antirusses?

— Je n'ai pas les chiffres exacts mais je peux dire que les sanctions ont un impact très néfaste sur notre économie. De nombreux entrepreneurs espèrent qu'elles seront levées et que les investissements russes reviendront dans le pays. Les sanctions antirusses sont un problème pour toute l'UE. Par exemple, 50% de tous les produits allemands sont exportés. Qui est capable aujourd'hui d'en acheter depuis la crise financière de 2008? Les voisins au sud et à l'est de l'UE sont trop pauvres. Il reste la Russie. C'est pourquoi si les USA maintenaient une politique d'isolement je pense que Berlin initierait la levée des sanctions pour normaliser les relations avec la Russie.

- Pensez-vous que cela pourrait arriver en dépit de la rhétorique permanente concernant la prétendue annexion de la Crimée et la violation de l'intégrité territoriale de l'Ukraine?

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- La question criméenne est réglée, il ne faut plus y revenir. La Crimée, c'est la Russie. Il ne faut pas «marchander», et les propositions sur les indemnisations financières récemment faites par le président tchèque Milos Zeman sont insensées. Il faut régler le conflit dans l'est de l'Ukraine. En ce sens, d'après moi, l'Occident doit trouver un accord avec la Russie: Moscou garantit l'intégrité territoriale de l'Ukraine et en échange, l'Occident n'aspirera pas l'Ukraine au sein de l'Otan en respectant les intérêts nationaux de Moscou.

- Quels sont les principaux problèmes de la Lettonie aujourd'hui?

— La Lettonie est un État très corrompu. L'an dernier, le Parlement européen a créé une commission pour déterminer le niveau de corruption dans les pays de l'UE. Nous avons adhéré à l'UE en 2004 pour que «tout le monde se prenne la main» mais seulement les pays riches se sont pris la main, nous laissant à la périphérie. Il faut comprendre qui est responsable du fait qu'une grande république de l'URSS est devenue l'un des pays les plus pauvres de l'UE. Nous n'avons rien créé en 27 ans d'indépendance. Plus encore, notre population a baissé d'un demi-million et notre situation démographique est déplorable.

- Ces derniers temps, la Lettonie est de plus en plus souvent accusée de faire renaître le nazisme. Dans quelle mesure est-ce vrai?

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- Je ne parlerais pas de renaissance de l'idéologie nazie en Lettonie. La jeunesse lettonne n'est pas profasciste. Simplement, les politiciens qui organisent des marches et d'autres activités tentent de garder leur place «au chaud». En Lettonie, comme dans d'autres pays de l'UE, on note effectivement un sursaut de nationalisme engendré par l'effondrement économique.

Les opinions exprimées dans ce contenu n'engagent que la responsabilité de l'auteur de l'article repris d'un média russe et traduit dans son intégralité en français.

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