Les manœuvres d'un satellite russe provoquent une réaction nerveuse de l'Occident

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Un pays occidental a trouvé de nouveaux «espions russes», cette fois-ci dans l'espace: la ministre française des Armées affirme qu'un appareil russe se serait approché d'un satellite franco-italien pour «tenter d’écouter ses voisins». Mais quel était l’objectif réel de ce satellite?

Florence Parly, ministre française des Armées, a annoncé vendredi qu'un satellite espion russe avait tenté en 2017 de capter le signal d'un appareil militaire franco-italien. Elle a tenu ces propos au siège de l'Agence spatiale française à Toulouse, écrit le quotidien Vzgliad.

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Selon la ministre, le satellite espion russe Loutch (Olymp) s'est approché de l'appareil spatial Athena-Fidus assurant la sécurité des communications militaires, à une hauteur de 36 000 km. «Tenter d'écouter ses voisins, ce n'est pas seulement inamical. Cela s'appelle un acte d'espionnage», s'est-elle indignée. Et d'ajouter: «Oui, nous sommes en danger».

A vrai dire, il n'y a rien de vraiment nouveau dans les propos de la ministre. Des projets de création d'appareils de renseignement capables de s'approcher d'autres objets spatiaux sont actuellement mis en œuvre non seulement par la Russie, mais aussi par les États-Unis ou la Chine. La ministre ne sait visiblement pas que le Loutch ne peut pas vraiment être considéré comme un appareil militaire.

«Ce ne sont que des fantaisies. On a désigné le satellite Loutch comme un inspecteur alors qu'il se rattache en réalité à la catégorie des satellites de retransmission. Cette description avait été avancée par les Américains, et les Français ont décidé de jouer cette carte car ils suivent le cap fixé par l'Amérique, estime Alexeï Leonov, rédacteur de la revue Arsenal Otetchestva. Il s'agit en réalité d'une situation absolument ordinaire: les orbites des satellites peuvent se rapprocher en cours de vol. Cela implique une commande de correction qui modifie l'orbite du satellite. Ces événements ont eu lieu l'année dernière et n'avaient pas provoqué d'agitation».

Ivan Moïsseev, directeur de recherche à l'Institut de la politique spatiale, est du même avis. Selon lui, les propos de Florence Parly s'expliquent par sa méconnaissance du domaine: «Un ministre ne doit pas nécessairement connaître tous les détails. Deux appareils se sont rapprochés. On a dit à la ministre: «Il n'est pas exclu, en théorie, que ce rapprochement n'ait pas été anodin». C'est ainsi qu'elle est parvenue à une telle conclusion».
D'après lui, cela n'a rien à voir avec l'usage réel de ce satellite: «Un rapprochement accidentel est possible, mais tout espionnage est exclu. Il est inutile de dépenser les ressources d'un satellite stationnaire pour effectuer des écoutes, même d'un autre appareil. Son utilisation à ces fins exige l'installation d'équipements spéciaux aux frais de sa propre charge utile. C'est inefficace. Si un appareil est destiné aux écoutes, on le construit différemment. Je doute donc que les propos de la ministre française reflètent la réalité. Un rapprochement accidentel est cependant tout à fait possible: les satellites manœuvrent en orbite et peuvent passer à proximité d'autres appareils».

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On a appris encore en octobre 2014 que la Russie testait un satellite inspecteur militaire capable de manœuvrer en orbite. Selon Robert Christy, expert britannique de l'espace, il s'agissait du satellite russe Kosmos 2499. Le catalogue du Commandement stratégique des États-Unis a répertorié cet objet comme débris spatial, car la Russie n'avait pas annoncé son lancement. Ce satellite russe a été placé en orbite en mai 2014 par une fusée Rokot tirée depuis le cosmodrome de Plessetsk.

Le ministère russe de la Défense a indiqué en octobre dernier que les Forces aérospatiales russes avaient testé avec succès un satellite inspecteur manœuvrable capable de s'approcher d'autres appareils orbitaux et de les examiner. Le nom du satellite n'avait pas été divulgué.

«En cas de conflit global, il est extrêmement important d'éliminer les satellites de l'ennemi pour le priver de ses moyens de communication, de navigation et de renseignement. D'où l'apparition de ces satellites», souligne l'expert militaire Valeri Moukhine. On peut également ajouter que cette idée date des années 1950 et que l'URSS a déjà testé en orbite plusieurs satellites de ce genre. Toutes les données concernant ces appareils sont strictement classifiées.

Selon Ivan Moïsseev, les satellites inspecteurs sont très rarement utilisés car il est très difficile d'en obtenir des résultats pratiques: «Les satellites de ce genre ont un champ d'utilisation très limité. Pour qu'il se rapproche d'un autre satellite, il faut le lancer sur la même orbite. Il ne peut pas manœuvrer». L'expert explique également qu'un satellite inspecteur est incapable d'intercepter les informations transmises à un autre appareil et ne peut que l'examiner de près. «Autrement dit, il s'agit de dépenses importantes pour peu d'utilité», conclut-il.

Aux États-Unis, les satellites de ce type sont eux-aussi entourés d'une voile de mystère. On estime pourtant que ces objectifs peuvent être remplis par l'avion de renseignement suborbital Boeing X-37 (connu également comme X-37B Orbital Test Vehicle). Il s'agit d'un appareil de renseignement suborbital réutilisable. Les experts américains ont constaté encore en 2016 que cette mini-navette spatiale était destinée à mettre au point les technologies d'élimination des satellites de l'adversaire.

Les opinions exprimées dans ce contenu n'engagent que la responsabilité de l'auteur de l'article repris d'un média russe et traduit dans son intégralité en français.

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