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Les économistes ne mangent pas tous des enfants! Rendez-vous chaque semaine avec Jacques Sapir, Clément Ollivier et leurs invités pour égrener les sujets de fond qui se cachent derrière le tumulte de l’actualité.

Reconduite, Angela Merkel obligée de s’attaquer à la pauvreté?

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Au terme de la pire crise politique de l’ère Merkel, la coalition entre conservateurs et sociaux-démocrates est finalement reconduite. En difficulté, la chancelière pourrait-elle être contrainte de revoir son modèle? Georges Estievenart et Michel Drain, spécialistes de l’Allemagne, sont les invités des Chroniques de Jacques Sapir.

Après plus de quatre mois d'incertitude, la CSU conservatrice d'Angela Merkel et les sociaux-démocrates du SPD parvenaient en février à un laborieux accord de gouvernement, validé début mars par les adhérents du parti de centre gauche. Pour autant, la reconduction de cette "Grosse Koalition" n'annule pas les difficultés que traversent les deux formations: en perte de vitesse dans les urnes, Angela Merkel est critiquée en interne dans son parti, quant aux sociaux-démocrates, ils enregistrent leur score le plus bas depuis presque 70 ans et se font même reléguer à la troisième place dans les sondages par l'extrême droite de l'AfD. Ce contexte pourrait-il amener Angela Merkel et son gouvernement à modifier sa politique, notamment face aux problèmes sociaux importants que connait l'Allemagne?

Jacques Sapir et Clément Ollivier reçoivent Georges Estievenart, ancien haut fonctionnaire européen et responsable du programme Europe de l'IPSE, et Michel Drain, chercheur associé à l'IFRI et spécialiste des relations franco-allemandes.

Pour Michel Drain, «la pauvreté sera certainement l'un des thèmes que la coalition devra aborder en priorité. Il y a eu ces derniers temps une initiative qui a marqué l'opinion: les "Tafeln", qui sont un équivalent des Restos du cœur. Et on s'est aperçu qu'il y avait énormément d'Allemands qui étaient demandeurs, parfois en surmontant un certain sentiment de honte. Une partie non négligeable de réfugiés légaux les fréquente aussi, par manque d'intégration, par difficulté à entrer sur le marché du travail. Le contrat de coalition comporte des mesures, en particulier au profit des faibles retraites. Mais les pauvres ne votent pas, malheureusement, et je crois que le défi politique de la coalition concernera donc surtout, derrière la question des migrations, le sentiment d'identité, qui a été dévoyé vers l'extrême droite par l'AfD.»

Jacques Sapir insiste sur le lien entre l'augmentation de la pauvreté en Allemagne et le déclin des services publics: «Une grande partie de la population ne comprend pas que sa situation matérielle ne s'améliore pas au rythme des résultats économiques du pays. Cela est démultiplié par la question des services publics: on sait que depuis dix ou quinze ans, l'Allemagne a accumulé un retard important dans les investissements dans ce secteur. En fait, en chiffre absolu, l'investissement en Allemagne n'est que peu supérieur à ce qu'il est en France et, si l'on considère les investissements en service public uniquement, il est nettement inférieur. Or la population allemande est plus nombreuse que la population française. Ce problème a donné naissance à diverses luttes sociales de grande ampleur, en particulier dans la métallurgie.»

Georges Estievenart préfère retenir l'opportunité que constitue selon lui cette reconduction de la grande coalition pour les relations franco-allemandes: «Politiquement, cela semble acquis qu'il s'agisse d'une chance pour le couple franco-allemand, puisqu'à aucun moment dans l'histoire récente, on n'a eu des deux côtés une telle disposition et un tel appétit de la coopération avec l'autre. Ceci étant, ça ne peut porter que sur une remodélation de la construction européenne. En réalité, on s'aperçoit qu'après des décennies de construction européenne, les sujets qui posent problème sont la défense, la sécurité, l'immigration et la refonte des institutions.»

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