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Les économistes ne mangent pas tous des enfants! Rendez-vous chaque semaine avec Jacques Sapir, Clément Ollivier et leurs invités pour égrener les sujets de fond qui se cachent derrière le tumulte de l’actualité.

Sanctions contre la Russie: «La France en souffre plus que l’Allemagne»

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Malgré les sanctions économiques qui frappent Moscou, les entreprises allemandes semblent mieux implantées en Russie que les entreprises françaises. Analyse et prises de position avec l’économiste Hélène Clément-Pitiot et l’ancien député Jacques Myard, invités des Chroniques de Jacques Sapir.

Reconduites en décembre dernier comme tous les six mois depuis la crise ukrainienne de 2014, les sanctions européennes contre la Russie s'installent dans la durée. Mais l'Allemagne pourrait être en train de tirer son épingle du jeu: ses entreprises réussissent mieux que les entreprises françaises à maintenir leurs relations commerciales avec la Russie, et y sont plus présentes. La France serait-elle la grande perdante de ces sanctions?

Jacques Sapir et Clément Ollivier reçoivent Hélène Clément-Pitiot, économiste spécialiste de la Russie, membre du CEMI-EHESS (Centre d'études des modes d'industrialisation de l'École des hautes études en sciences sociales), et Jacques Myard, ancien député Les Républicains et maire de Maisons-Laffitte.

Hélène Clément-Pitiot fait remarquer qu' «aucune étude n'a été faite au moment de décider des sanctions. On fait des études sur beaucoup de sujets, mais on n'en a pas fait sur cette question qui allait pourtant être déterminante pour notre commerce extérieur. Quand on regarde les résultats présentés récemment par la banque centrale de Russie, c'est sans appel: parmi les pays qui ont le plus souffert des sanctions et des contre-sanctions, le premier c'est l'Ukraine, ce qui semble assez logique, et le deuxième, c'est la France. Nous avons perdu près d'un tiers de notre marché d'exportation de biens en Russie. Alors que côté allemand, ce n'est pas du tout le cas: il y a en fait une réallocation du marché russe au sein des pays européens.»

Jacques Myard estime que «nous nous sommes laissés piéger par les ultra-européens. Il y a par ailleurs aujourd'hui, malheureusement, une forte dérive atlantiste de notre politique étrangère. Tout ceci est contraire à nos intérêts, dans la mesure où nous avons des intérêts très spécifiques en Russie. Cela ne signifie pas qu'en tant que Français, je vais embrasser Poutine sur la bouche! Ce que cela signifie, c'est que nous devons prendre en compte nos intérêts, qui ne sont pas les mêmes que ceux des Allemands, des Américains, des Polonais ou des Baltes. Les pays d'Europe centrale et orientale ont une histoire particulière avec la Russie, qui n'est pas la nôtre. Ces sanctions ont été décidées par solidarité européenne, en occultant les aspects économiques.»

Selon Jacques Sapir, «actuellement, les relations entre la France, l'Allemagne et la Russie sont probablement la question centrale de l'équilibre européen. L'Allemagne ne craint aujourd'hui plus la Russie, notamment du fait de l'existence d'États tampons. Il me semble que l'Allemagne se prépare en fait à passer un avec la Russie un équivalent actuel des accords de Rapallo: en 1922, l'Allemagne de Weimar et la jeune Union soviétique signent un traité officiellement économique, mais établissant de fait une coopération étendue, tant industrielle que militaire, qui durera jusqu'en 1933. Ce traité provoque une immense émotion, en particulier en France, car il acte l'éclatement de l' "alliance de revers" qui, pendant plus de vingt ans, avait été l'un des fondements de la politique étrangère française. En 1922, c'était le traité entre une Allemagne vaincue et une URSS isolée. Aujourd'hui, ce qui est en jeu, c'est une possible alliance entre une Allemagne dominante économiquement et émancipée politiquement, et une Russie qui a fait depuis dix ans un retour impressionnant sur la scène internationale.»

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