Deux couples qui ont manifesté avec leurs enfants mineurs à Moscou risquent la déchéance de l’autorité parentale

© Sputnik . Sergueï Mamontov / Accéder à la base multimédiaUne action non autorisée à Moscou ce 3 août
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Le 2 septembre, à Moscou, dans le cadre de procédures pénales, deux couples ayant participé à des manifestations avec leurs enfants en bas âge risquent d’être déchus de leur autorité parentale. Accusés de «mise en danger» et «manquement à l'obligation d'éducation d'un mineur», les familles Prokazov et Khomskikh attendent le verdict.

Deux procédures judiciaires qu’on pourrait qualifier de «particulières» se tiendront lundi 2 septembre à Moscou. Le comité d'enquête a ouvert une procédure pénale en vertu des article 125 [de la mise en danger, ndlr] et 156 [du manquement à l'obligation d'éducation d'un mineur, ndlr] du Code pénal de la Fédération de Russie à l’encontre de deux jeunes couples qui ont pris part (volontairement ou malgré eux) aux manifestations massives «pour la transparence d’élections» à la Douma de Moscou cet été.

Dans le premier cas, la sonnette d’alarme a été tirée par Ilias Mercury, écrivain et blogueur d’origine grecque, qui se présente également comme journaliste indépendant. Un montage vidéo sur son compte Twitter suit de près un des activistes «en short rouge» qui animait plusieurs cortèges des manifestants, et qui vers la fin de son action «récupère un nourrisson pour se protéger face aux forces de l’ordre», comme le maintien le blogueur. Rapidement, l’identité des parents est découverte: Dimitri et Olga Prokazov, qui confirment avoir passé leur fils à «l’homme en short rouge» qui n’est autre que Sergueï Fomine… oncle et parrain du petit garçon, et volontaire au QG de Lioubov Sobol, «candidate indépendante» à la Douma de Moscou.

Le 28 août, le tribunal du district Perovskiy de Moscou a refusé d’examiner l’action en justice du procureur concernant la déchéance d’autorité parentale de Dimitri et Olga Prokazov. Mais ce n’est que partie remise. En raison d’un vice de procédure, le procès est transféré dans un autre tribunal moscovite, auquel le couple est «rattaché» de par son lieu de résidence.

«Nous aimons beaucoup nos enfants et nous ne voudrions pas que nous soyons privé les uns des autres», a déclaré Dmitri Prokazov, arrivé le 28 août devant le tribunal avec sa femme Olga.

Les faits reprochés au couple ont fait beaucoup de bruit et ont été largement relayés via les réseaux sociaux, où les étapes de l’instruction sont décrites par les parents-mêmes, leurs avocats et les témoins.

Anna Kuznetsova, commissaire pour les droits de l'enfant auprès du Président, a qualifié les demandes du bureau du procureur de «mesure extrême». Elle avait précédemment adressé un appel au procureur général avec une demande de retirer le dossier concernant la privation des droits parentaux à la famille Prokazov.

«Nous avons maintenant une réponse du bureau du procureur général qui a envoyé l'affaire au bureau du procureur de Moscou pour vérification. Si ce dernier trouve des fondements à initier le procès, d'autres actions seront engagées», a déclaré la commissaire pour les droits de l'enfant.

Anna Kuznetsova a par ailleurs ajouté que si le bureau du procureur décidait de ne pas arrêter la procédure pénale, des représentants du commissaire défendraient les intérêts des Prokazov devant les tribunaux.

Le second dossier, instruit par le bureau du procureur à Moscou pour demander la déchéance d’autorité parentale de Piotr et Elena Khomskikh, concerne une famille nombreuse qui a participé à une manifestation moscovite le 3 août. La requête maintient que les parents «ont tiré profit de la vulnérabilité de leurs filles en les laissant délibérément [près de la foule] des manifestants agressifs, ainsi que des forces de l’ordre en action, afin d’éviter leur éventuelle arrestation pas ces forces de l’ordre».

Selon «L’Apologie de protestations», service juridique du l’ONG «Agora» qui coordonne un réseau d’avocats spécialisés dans la législation électorale, Piotr Khomskikh a été identifié (à tort, d’après lui) par les médias en tant que «garde du corps d’Alexeï Navalny», militant de l’opposition. Il s'agit probablement d'un enregistrement vidéo dans lequel un homme et une femme avancent avec des poussettes, faisant face aux boucliers des forces de l’ordre.

«C’est notre futur, c’est leur futur… des enfants… entend-t-on de la voix du chef de famille. Du calme, du calme… On y va… Ne vous approchez pas… ne vous approchez pas des roues…»

«La famille [Khomskikh] ne nous a pas contactés, mais nous enquêtons maintenant sur les circonstances de l'incident. Nous avons envoyé les requêtes nécessaires, affirme Anna Kuznetsova, commissaire pour les droits de l'enfant auprès du Président. Nous avons déjà reçu des informations selon lesquelles la famille n'avait jamais été au centre d’attention des autorités auparavant...»

Le sujet lié à ces deux procès très médiatisés est d’autant plus brûlant que la discussion autour du thème communément nommé «la justice juvénile» n’a jamais cessé depuis une dizaine d’années en Russie. Plusieurs décisions prises au plus haut niveau ont déclenché au sein de la société russe des affrontements brutaux sur la question, notamment sur le chapitre 22 du Code de la famille de la Fédération de Russie, adopté en 2008, qui prévoit le retrait des familles d’enfants «privés de protection parentale», qu’on prévoit ensuite d’installer dans des institutions spéciales en vue d’un placement dans une famille d’accueil.

Afin de mettre en pratique les nouveaux aménagements du droit familial, le poste du commissaire aux droits de l'enfant auprès du président de la Russie a été créé en 2009. Mais l’Église orthodoxe de Russie participe également aux discussions sur la réforme du droit de la famille, affirmant dans sa déclaration officielle en 2013 que «l'État n'a pas le droit d'intervenir dans la vie de famille sauf s'il existe un danger avéré pour la vie, la santé et la condition morale de l'enfant et s'il ne peut être éliminé par l'aide des parents et par la persuasion».

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