Chez les vaccinés et non-vaccinés la mortalité est «comparable»: les propos de Raoult tiennent-ils la route?

© AP Photo / Daniel ColeDidier Raoult
Didier Raoult - Sputnik Afrique, 1920, 04.07.2021
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Évoquant le cas du Royaume-Uni, champion européen en matière vaccinale, le professeur Didier Raoult affirme que «la politique extrêmement active de la vaccination n’aura pas donné les résultats escomptés». Les données statistiques britanniques ne confirment pas totalement ses propos.

Personnage controversé depuis le début de la crise sanitaire, Didier Raoult a de nouveau fait part de son scepticisme face aux vaccins, et ce alors que la menace d’une quatrième vague provoquée par le variant Delta se profile à horizon.

Critiquant la gestion de l’épidémie au Royaume-Uni, qui compte un taux de personnes vaccinées plus élevé que la France, le professeur marseillais a assuré dans une vidéo récente: «Chez nous, la proportion des vaccinés parmi les cas positifs augmente et on n’a pas l’impression qu’elle soit radicalement différente de celle des non-vaccinés».

Interrogé pour savoir si les patients vaccinés font le même type d’infection que les patients non-vaccinés, il a affirmé qu’«on a une mortalité comparable à celle chez les non-vaccinés».

Une logique d’ordre arithmétique

Les propos du professeur sont pourtant à relativiser. Depuis le début de la campagne vaccinale, les autorités sanitaires ainsi que les fabricants affirment que le vaccin ne garantit pas une protection contre la contamination à 100% ni n’élimine totalement le risque de formes graves du Covid-19, mais le diminue significativement. Ensuite, il s’agit d’une logique d’ordre arithmétique: vu que la proportion des vaccinés dans la population générale, qui donc peut toujours être contaminée et parfois développer des formes plus graves, est de plus en plus grande, leur part parmi les cas positifs augmente également.

Oui, l’efficacité des vaccins est (un peu) moindre contre le variant Delta

En effet, le variant Delta (ou indien) préoccupe les autorités sanitaires françaises, qui redoutent une moindre efficacité de la vaccination contre le Covid-19. Une spécificité également révélée par Public Health England, l’organisme sanitaire d’Angleterre. D’après une étude de cette institution publiée fin mai, l’efficacité de la protection contre la maladie avec le variant Delta après une seule dose du vaccin Pfizer-BioNTech ou AstraZeneca est évaluée à seulement 33%, alors qu’elle est de 50% contre le variant britannique (Alpha).

Néanmoins, la protection contre ce variant acquise après deux doses du vaccin, bien qu’elle reste moindre en comparaison avec d’autres variants, est considérée comme «hautement efficace»: à savoir à 88% pour la préparation Pfizer-BioNTech (93% pour Alpha) et à 60% pour l’AstraZeneca (66% pour Alpha).

L’Agence européenne des médicaments (EMA) a également confirmé le 1er juillet que deux doses de vaccin anti-Covid-19 semblent protéger contre le Delta.

«Des données émergentes provenant de preuves concrètes montrent que deux doses de vaccin protègent contre le variant Delta […]. À l'heure actuelle, il semble que les quatre vaccins approuvés dans l'Union européenne protègent contre toutes les souches circulant en Europe, y compris le variant Delta», a déclaré Marco Cavaleri, responsable de la stratégie vaccinale à l'EMA, basée à Amsterdam, cité par l’AFP.

Oui, la protection des vaccins est «incomplète»

Pointant la situation au Royaume-Uni ou en Israël, le professeur Raoult affirme dans la même vidéo qu’«il n'y a guère de magie» avec les «vaccins ARN» dont le «taux de protection réel» est «entre 60 et 80%», affirmant que «la politique extrêmement active de la vaccination n’aura pas donné les résultats escomptés».

«La capacité de ce vaccin à protéger l’ensemble de la population même quand on a des taux de vaccination extrêmement élevés est incomplète. Il restera des problèmes à régler, en particulier par le soin», assure-t-il.

Ces propos du professeur Raoult ne vont d’ailleurs pas à l’encontre des dires des autorités sanitaires. Comme le rappelle le ministre de la Santé Olivier Véran dans une interview publiée le 29 mai sur le site vie-publique.fr, la protection des substances anti-Covid n’est en effet pas complète.

«La logique voudrait, puisqu'on a toutes les études qui le montrent, que si vous êtes vacciné, vous pouvez être contaminé», explique-t-il avant de poursuivre: «Mais vous ne faites pas de forme grave».

«On sait qu'on a 94 à 95% de réduction des hospitalisations, plus de 80% de réduction des formes symptomatiques sévères grâce à la vaccination, reste en fait les plus âgés d'entre nous, les gens qui bien que vaccinés sont susceptibles de présenter une forme grave, encore une fois avec un risque fortement réduit par le vaccin, mais quand vous avez 90 ou 95 ans votre système immunitaire il répond moins bien», précise M.Véran.

Cas britannique: augmentation des nouveaux cas mais une mortalité durablement basse

Les progrès de la campagne vaccinale au Royaume-Uni, où plus de 63% des adultes ont été entièrement vaccinés, ne semblent pas avoir empêché la propagation du varient Delta, responsable au jour du 2 juillet de près de 95% des nouvelles contaminations, selon Public Health England. Une telle détérioration de la situation sanitaire débouche sur une interrogation légitime concernant l’efficacité de la vaccination, mais elle mérite également d’être regardée de plus près.

Une infirmière française tient une seringue avec le vaccin de Pfizer, le 31 mai 2021 - Sputnik Afrique, 1920, 04.07.2021
«Trop souvent des injonctions»: comment inciter à la vaccination?
D’après le graphique disponible sur le site Our World in Date, à partir de fin mai la courbe de nouveaux cas enregistrés outre-Manche grimpe en effet pour atteindre début juillet près de 27.000 nouveaux cas. Cet indicateur est certes moins élevé que plus des 60.000 cas enregistrés lors du pic épidémique début janvier, mais apparaît tout de même inquiétant. La détérioration est pourtant moins visible côté hospitalisations hebdomadaires avec près de 1.700 admissions à l’hôpital le 27 juin, le niveau est proche de celui de début avril, lorsque le pays est sorti de la vague d’hiver.

Les données sur la mortalité due au Covid-19 au Royaume-Uni sont encore plus rassurantes: malgré une hausse des contaminations depuis plusieurs semaines, aucune augmentation significative de décès n’est en vue. Tandis que, lors de la vague de l’hiver, au tout début de la campagne vaccinale, le pays de Shakespeare enregistrait plus de 1.500 décès quotidiennement, le 3 juillet il y en a eu «seulement» 18. Selon les autorités sanitaires britanniques, cette mortalité durablement basse est justement le fruit d’une vaccination réussie.

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