Les trous noirs n’existent pas (Partie 1)

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Personne n’avait osé jusqu’ici toucher au modèle vedette de la cosmologie, depuis 30 ans : le sacro‐saint trou noir, fond de commerce de toute une communauté, fer de lance de la « cosmologie quantique ». Après l’article publié par Stephen Hawking, intitulé « Les trous noirs n’existent pas » c’est un scientifique français, Jean-Pierre Petit, ancien directeur de recherche au CNRS, qui enfonce le clou. De quoi décrire un univers radicalement nouveau. Hawking soulève les problèmes, J.P.Petit apporte des solutions ... décoiffantes.

La Voix de la Russie : Jean‐Pierre Petit, Stephen Hawking, qu’il est aujourd’hui inutile de présenter, vient de défrayer la chronique, de mettre la communauté des black hole men en émoi en publiant un article intitulé « les trous noirs n’existent pas ». Vous venez de publier un article reprenant le même titre. Expliquez‐nous.

JPP : J’ai essayé de positionner mon propre article sur la question sur le site de mise en ligne de preprints arXiv, comme Hawking l’a fait pour le sien. Mais mon papier, très structuré et solide, a été immédiatement bloqué, de même que dix autres articles que j’ai essayé de positionner sur ce site, où je suis visiblement « blacklisté ».

LVdlR : Qui bloque dans ce site où en principe les modérateurs ne font que refuser des articles correspondant à une activité commerciale déguisée, à des manifestes politiques ou des attaques ad hominem insultantes ? J’imagine qu’il n’y a rien de tout cela dans vos 12 articles bloqués. Vous aviez déjà par ailleurs déjà mis en ligne plusieurs articles sur arXiv dans le passé.

JPP : Depuis 2008 le CNRS s’est débrouillé pour faire figure de porte d’accès à arXiv, par l’intermédiaire de sa base de données HAL, vers laquelle les soumissions sont automatiquement redirigées.

LVdlR : Mais ne pourriez‐vous pas mettre ce travail en ligne sur HAL ?

JPP : Pour cela il faut obligatoirement relever d’un laboratoire reconnu par le CNRS. J’ai donc été demander de l’aide à Cuby, directeur de mon ancienne unité, le Laboratoire d’astrophysique de Marseille. Refus immédiat. Motif : vous êtes retraité.

LVdlR : Décidément...

JPP : Et vous savez très bien pourquoi. Depuis 38 années, toutes mes recherches de cosmologie et d’astrophysique sont entièrement axées sur la faisabilité des voyages interstellaires. Je ne m’en suis jamais caché. Il y a quelques décennies, des scientifiques pouvaient encore dire « qui vous dit que la Terre n’est pas la seule planète habitée de tout l’univers ? ». Aujourd’hui, la vie extraterrestre intelligente est devenue une évidence pour tout le monde. Reste cette « barrière luminique », dernier rempart, protégeant notre géocentrisme imbécile.

LVdlR : Barrière à laquelle vous vous attaquez.

JPP : J’ai abouti à des résultats solides que j’ai évoqués dans une interview précédente. L’univers est un Janus, il a deux visages (mathématiquement, on dit qu’il est « bimétrique »). Sur l’un, les particules à énergie et masse positive, les étoiles, la Terre, vous, moi. Sur l’autre les particules à énergie et masse négative. Dans ce second « secteur », les lois de la Relativité Restreinte jouent aussi, mais la vitesse de la lumière est beaucoup plus élevée.

LVdlR : De ... quelle lumière ?

JPP : Celle de photons d’énergie négative, que nous ne pouvons pas voir.

LVdlR : Quel rapport avec les voyages interstellaires ?

JPP : Si on découvre un moyen technico‐scientifique d’inverser la masse d’un vaisseau et de ses occupants, alors celui‐ci pourrait cheminer à une vitesse beaucoup plus élevée. Cela rendrait les voyages interstellaires « non-impossibles ».

LVdlR : Avec comme corolaire le surgissement d’un dossier qui dérange par excellence. Mais revenons au blocage à propos des trous noirs.

JPP : La situation est devenue telle depuis des décennies que si un chercheur veut toucher au modèle du trou noir et s’il ne s’appelle pas Stephen Hawking, son article est immédiatement refoulé par tous les organes de publication pour qui un tel article revient à proposer une nouvelle théorie sur la Terre creuse ou le mouvement perpétuel.

LVdlR : J’imagine que vous avez envoyé des articles vers les plus grandes revues internationales.

JPP : Depuis six mois, 15 refus d’articles, sans soumission à un expert.

LVdlR : Mais, l’argument invoqué ?

JPP : Le plus souvent il n’y en a aucun. Sinon « ça n’est pas le genre de la revue » ou « désolés, nous ne publions pas de travaux à caractère spéculatif ».

LVdlR : Mais vous allez continuer.

JPP : Cette bataille ne fait que commencer. Mais je vous signale que pour publier deux articles importants, l’un dans Nuevo Cimento en 1994 et l’autre dans Astrophysics and Space Science en 1995 j’avais du faire 58 envois...

LVdlR : Le grand public est totalement ignorant de cet aspect des choses.

JPP : A chaque fois c’est une attente interminable. Comme ces travaux ont un lien direct avec ceux de Sakharov, j’ai envoyé une version à la revue russe Gravitation and Cosmology. International quarterly Journal. Par deux fois ces gens nous ont promis une réponse rapide, mais cette affaire dure maintenant depuis plus de quatre mois. Pourtant les mathématiques liées à ce travail sont en partie nées en Russie dans les années 70, avec cette figure des maths russe qu’est Alexandre Kirillov, dont le nom figure bien sûr dans les références de l’article. Kirillov a sûrement des élèves capables d’expertiser ce travail.

LVdlR : Il n’y a pas d’autres « portes d’entrée » que les revues ?

JPP : Il existe bien des lieux où un chercheur peut se soumettre aux tirs croisés de ses collègues, ce sont les séminaires. Mais mes demandes restent lettre morte, depuis des années, partout, alors que je ne demande qu’à enfiler les gants et à monter sur le ring, à descendre dans les fosses aux lions.

LVdlR : Un exemple ?

JPP : Depuis 2006 l’astrophysicien Alain Riazuelo a positionné sur le site de son unité de recherche, l’Institut d’Astrophysique de Paris, une critique de mes théories. Elle y est toujours et ce texte porte tort au scientifique que je suis. J’ai immédiatement demandé à celui‐ci de pouvoir répondre à ses objections en séminaire, en transmettant également cette demande au directeur de son laboratoire.

LVdlR : Et leur réponse ?

JPP : Pas de réponse, depuis huit ans. Mais Riazuelo ne prendra pas le risque d’une telle confrontation. Il sait pertinemment qu’à ce genre de jeu je n’ai jamais perdu un combat.

LVdlR : Un... combat ?

JPP : Ca n’est qu’une image. Il n’est pas nécessaire d’élever la voix. L’ambiance est plus celle d’une partie d’échecs.

LVdlR : Avec au bout un échec et mat ?

JPP : Tout à fait. En séminaire, « je n’ai jamais perdu une partie » et ce lâche le sait très bien. La proposition court toujours.

Dans la page Wikipedia francophone consacrée  l’historique des trous noirs, un mathématicien français, Michel Mizony, a tenté de donner écho à une publication, effectuée dans une revue sérieuse, à comité de lecture, où des doutes étaient émis concernant l’existence de tels objets. Alain Riazuelo, solidement implanté dans Wikipedia (où je suis « banni à vie » depuis 2005 pour avoir révélé l’identité d’un intervenant‐thésard, Yacine Dolivet, qui avait fini par m’agacer par les sottises qu’il déballait. Docteur es-supercordes il est aujourd’hui « mathématicien dans une banque » et continue d’intervenir, ne serait-ce quedans cette page sur l’historique des trous noirs, sous le pseudonyme de le Ya Ya) a immédiatement et par deux fois supprimé cette contribution, considérée comme « du vandalisme ».

LVdlR : Autrement dit, si un scientifique fait mine d’évoquer une polémique concernant le modèle du trou noir, il est immédiatement taxé de vandalisme.

JPP : Exactement. Ce qui est plus fou, et vous le lirez dans les discussions figurant dans cette page, c’est que le simple fait de mentionner un article, publié dans une revue à comité de lecture et exprimant un semblant de scepticisme, selon Alain Riazuelo, « ce serait instiller le doute auprès du grand public sur un fait à propos duquel il n'y en a aucun chez les spécialistes du sujet ».

LVdlR : C’est : « Touche pas à mon trou noir ! ». Mais, ces trous noirs, ils existent ou pas !?!

JPP : Il faut reprendre la genèse du concept. En 1915, Einstein réinvente le monde, en remplaçant les particules par de la géométrie, en introduisant l’espace temps.

LVdlR : En un mot ? ...

JPP : Avant Einstein, la matière, et la lumière, les photons, sont des objets qui cheminent dans un espace à trois dimensions en suivant des trajectoires qui, s’agissant des objets matériels, sont influencées par des forces, dont la force de gravitation. Einstein remplace cela par des géodésiques d’une hypersurface espace‐temps.

LVdlR : : La, je sens que nos lecteurs vont décrocher...

JPP : On va employer une image en se situant dans un espace à 2 dimensions. On imagine d’abord que des particules cheminent sur un plan, un « univers 2D euclidien, sans courbure » et que leurs trajectoires sont influencées par des forces. Dans la figure ci‐après j’ai représentée schématiquement, un astre 2D empli de matière de densité constante, entouré par le vide, représenté par un disque gris, ainsi que les trajectoires de particules attirées par ce confetti de matière.

 

LVdlR : Mais il y a aussi une droite, en rouge.

JPP : Cela correspond à la trajectoire rectiligne d’un photon, dans le vide, insensible à la force de gravité, telle qu’on l’imaginait avant Einstein.

LVdlR : Et là vous avez remplacé ce « terrain de jeu plat, sans courbure », par un cône émoussé.

JPP : Un cône émoussé qui est formé de la réunion d’une portion de sphère, grisée, et d’un tronc de cône. La portion de sphère, c’est mon astre 2D empli de matière de densité constante (figurée par une portion de surface à courbure constante) et le tronc, le cône, c’est le vide qui est autour. Et j’ai fait figurer les géodésiques.

LVdlR : Ces courbes, comment les obtient‐on ?

JPP : Il suffit d’un rouleau de scotch.

LVdlR : Si je comprends bien, si je m’amuse à coller des bandes de scotch, délicatement, sur la carrosserie de ma voiture, je vais consteller de géodésiques cette « surface-voiture » ?

JPP : Exactement. En dessous, j’ai projeté ces courbes sur un plan, qui est « la façon dont nous nous représentons les choses ».

LVdlR : En fait, les forces, ça n’existe pas. Il n’y a que de la courbure. Einstein, tel un prestidigitateur, a fait disparaître les forces en les remplaçant par des courbures de l’espace.

JPP : Cela a été fait sur un univers, considéré comme une hypersurface 4d et non un espace euclidien 3d. Au passage, dans ce cas, les géodésiques qui représentent les trajectoires des photons sont affectées par les masses, par la gravitation. En dessous j’ai projeté ces géodésiques qui deviennent « des trajectoires » et on voit que les trajectoires des photons (courbe rouge) ne sont plus « des droites », ce qui a pu être confirmé observationnellement en 1918, par Eddington, lors d’une éclipse. Un autre effet est celui des lentilles gravitationnelles. De plus, Einstein a proposé une équation qui permet de construire des solutions.

LVdlR : Des solutions à des problèmes. Mais quelles sont les données ?

JPP : La distribution des masses. Si je reprends l’exemple ci-dessus, je pourrais dire : « J’ai une masse contenue dans mon confetti 2d, et je dispose des trajectoires qui vont avec. Accessoirement l’observation me montre que celle de photons est courbée. La géométrie « qui va bien », qui rend compte de cela, est mon cône émoussé. Et comme cette interprétation géométrique rend compte de la courbure des trajectoires des photons, cela veut dire que ce modèle est meilleur que celui de l’espace plat, plus la force de gravitation de Newton, qui ne rend pas compte de l’influence de la gravitation sur la trajectoire des photons (ce qu’on appelle l’effet de lentille gravitationnelle).

En 1916, l’astrophysicien Karl Schwarzschild calcule la solution exacte de l’équation d’Einstein pour une boule de matière contenue dans une sphère, de densité uniforme.

LVdlR : C’est « le cône émoussé 3d ». Mais tout cela nous éloigne du trou noir, non ?

JPP : Quand vous regardez le ciel qui est au‐dessus de votre tête, la moitié des étoiles sont « célibataires » et l’autre moitié vit en couples. Les ménages à trois, ou plus, sont instables. Dans les couples, il y a un très grand nombre où l’une des étoiles est une étoile très émissive, qui envoie des bouffées de gaz. On appelle cela le « vent stellaire ». Dans le cas du Soleil c’est le « vent solaire ». L’autre étoile peut être une étoile à neutrons, un objet très petit, très dense, résidu de l’explosion, sous forme de supernovae, de l’étoile qui avait été jusque là le compagnon de la première.

LVdlR : Ces étoiles à neutrons, il y en a beaucoup ?

JPP : Vous soulevez là un aspect essentiel en astronomie. Le cosmos est très vaste. Dans notre seule galaxie il y a déjà 200 milliards d’étoiles et vous savez que quand le télescope spatial Hubble regarde dans une « fenêtre » qui a l’aspect du chas d’une aiguille tenue à bout de bras, il détecte 10.000 galaxies. Ainsi, quand les théoriciens prédisent que tel ou tel objet pourrait exister, si ça n’existe pas, on ne trouve rien. Mais s’il a vu juste, on trouve d’abord un objet, puis cinq, puis 100 puis des dizaines de milliers. La découverte progresse alors de manière exponentielle. Vous en avez un exemple actuellement avec les exo-planètes. En 1931 l’astronome Américain Fritz Zwicky avait, lors d’une célèbre conférence donnée au Caltech, expliqué que les étoiles massives devaient connaître des fins explosives, se transformer en supernovae. Le scepticisme a été général. Têtu, il partit lui‐même, seul, à la recherche de ces objets. En 1935 il trouve le premier. Trois ans plus tard il avait fait une douzaine d’observations, dans de lointaines galaxies.

LVdlR : En observant quoi ?

JPP : Dans ces galaxies apparaissait soudain un point très lumineux, qui disparaissait quelques mois plus tard. Aujourd’hui ces objets se comptent par dizaines de milliers. Même chose pour les étoiles à neutrons, dont l’existence avait été prévue par le Russe Lev Landau en 1932. Peu après, Zwicky a suggéré que ces objets pourraient émettre des rayons X.

 

LEGENDE : L’astrophysicien Fritz Zwicky, « père des supernovae »

La première étoile à neutrons été découverte en 1967 par l’anglaise Jocelyn Bell. Aujourd’hui on en dénombre des milliers.

LVdlR : Alors que l’existence des trous noirs a été conjecturée en 1967, 47 années plus tard, les observateurs s’accrochent à l’unique objet de ce genre : Cygnus X1. Il faut avouer que là où on trouve le plus de trous noirs c’est dans les pages des revues de vulgarisation scientifique, pas dans le ciel.

JPP : Il faut garder en tête que les étoiles à neutrons ou les supposés trous noirs émettent le même genre de rayonnement X. Il est émis par des électrons quand ceux‐ci subissent une forte accélération. Alors « ils protestent ».

LVdlR : Ce signal X, c’est le cri de l’électron qui tombe sur une étoile à neutrons, ou un trou noir. Mais qu’est-ce qui différencie les deux ?

JPP : Au niveau du signal : rien. La différence se situerait au niveau de la masse de l’objet. Comme on verra plus loin, celle des étoiles à neutrons ne peut pas dépasser plus de 3,3 masses solaires. On évalue la masse du compagnon invisible de l’étoile Cygnus X1 à 6 masses solaires. On en conclut donc que c’est un trou noir. Mais si une conjugaison d’erreurs de mesures (Cygnus X1 est censé être à 6000 années lumières de nous) se conjuguent, alors cette source X deviendrait une bête étoile à neutrons. Un des arguments qui soulèvent le scepticisme quant à l’existence des trous noirs stellaires, c’est leur anormale rareté. En effectuant un parallèle avec les supernovae et les étoiles à neutrons, compte tenu des progrès des moyens observationnels, on devrait actuellement les compter par milliers. Les années qui passent ne font qu’accroître le scepticisme.

LVdlR : Pourquoi les étoiles à neutrons ne peuvent-elles pas avoir une masse dépassant 3,3 masses solaires ?

JPP : Prenez un engin spatial. Si vous voulez l’installer sur une orbite donnée, plus cette orbite sera lointaine, plus il vous faudra dépenser d’énergie. Et, vis à vis d’un objet comme la Terre, pour une sonde spatiale de masse donnée, si vous voulez lui faire quitter l’attraction terrestre il vous faudra dépenser l’énergie correspondante.

LVdlR : Revenons à une étoile à neutrons qui aurait une masse supérieure à 3,3 masses solaires.

JPP : Prenons un objet de masse m qui serait à sa surface. Il représente une énergie mc2. La plus belle fille du monde ne peut pas donner plus que ce qu’elle a. De même, une masse m, même si elle se transformait entièrement en énergie, ne pourrait produire plus que E = mc2 selon la célèbre relation d’Einstein. Eh bien si l’étoile à neutrons a une masse supérieure à 3,3 masses solaires, l’énergie à fournir pour permettre à une masse m de la quitter dépasse mc2. Donc aucun objet ne peut s’en échapper. Et c’est valable aussi pour les photons, qui ont une énergie hV. Eux aussi perdent de l’énergie pour quitter une masse. Déja, quand une étoile à neutrons a une masse, disons de 3,2 masses solaire, et qu’elle émet un photon d’énergie hV, celui-ci « rame » pour quitter l’étoile. Son évasion lui coûte de l’énergie, et quand il a réussi à s’échapper il n’a plus qu’une énergie inférieure. On appelle cela le « redshift gravitationnel ». Quand la masse atteint 3,3 le photon consomme toute son énergie. Et comme un photon, c’est un grain d’énergie, il n’existe plus.

LVdlR : Les étoiles à neutrons sont censées, pour beaucoup, constituer le résidu de l’explosion d’une supernovae. On peut supposer que ce phénomène a le bon goût de ne laisser comme résidu que des étoiles à neutrons d’une masse inférieure à cette masse critique.

JPP : Mais si celle‐ci est en couple avec une étoile bien émissive et suffisamment proche, celle‐ci va faire croitre sa masse en lui envoyant de l’hydrogène, à cause du vent stellaire. Inéluctablement, des étoiles à neutrons devraient alors dépasser les 3,3 masses solaires. Les astronomes se sont tournés vers les théoriciens en leur disant « quand ça se produit, que se passe‐t-il ? ».

LVdlR : Et c’est là que ceux‐ci leur ont donné le modèle du trou noir.

JPP : Il faut voir comment cela s’est joué. Si vous revenez au dessin du cône émoussé de tout à l’heure, vous voyez qu’il n’y a pas un seul objet géométrique, mais deux.

LVdlR : Oui, il y a une calotte sphérique et un tronc de cône, les deux étant raccordés.

JPP : Quand Karl Schwarzschild a produit en 1916 sa solution de l’équation d’Einstein, elle était aussi en deux parties. La première, qu’on appellera « la solution de Schwarzschild extérieure » décrivait ce qui se passait dans le vide, à l’extérieur de l’astre, d’une sphère emplie de matière d’une densité constante. La seconde décrivait son intérieur, correspondait à la « solution de Schwarzschild intérieure ». Cela permettait aussi de calculer des géodésiques qui se situent à l’intérieur de l’astre, de la même façon que vous pouvez faire courir des géodésiques qui empiètent sur la portion sphérique de votre cône émoussé.

LVdlR : Mais ça n’a plus de sens physique !

JPP : Assimilez la Terre à une sphère de densité constante. On peut aussi décrire « la géométrie qui lui est associée » avec ce couple de solutions de ce type. Et on pourra alors calculer les trajectoires géodésiques d’objets qui la traversent de part en part.

LVdlR : Quels objets ?!?

JPP : Les neutrinos, qui interagissent si faiblement avec la matière qu’ils sont capables de traverser la Terre entière sans s’en apercevoir, de même que le Soleil. Si on disposait de télescopes à neutrinos, on pourrait faire des mesures, mais c’est loin d’être le cas.

LVdlR : Revenons aux trous noirs.

JPP : Les théoriciens ont alors « vendu » aux astronomes la solution de Schwarzschild extérieure, qui décrit une portion de l’univers où il n’y a ni matière, ni énergie. Ils leur ont livré une solution se référant à une région de l’espace où règne le vide, où il n’y a aucune matière, pour décrire un objet au contraire hyperdense. Immédiatement, cette solution a été affectée par toutes sortes de pathologies, faciles à comprendre. Quand on essayait de pénétrer à l’intérieur d’une sphère critique, d’une sphère horizon appelée sphère de Schwarzschild, un dénominateur devenait nul. Comme les solutions étaient décrites avec en particulier une variable de temps t et une « distance radiale » r, John Archibald Wheeler (inventeur de la dénomination « trou noir ») avait même dit, pour négocier ce problème : « C’est simple : quand on rentre dans un trou noir, t devient la variable radiale et r le temps » et des tas d’autres excentricités mathématique du même tonneau. Il y a 20 ans, feu l’astrophysicien Jean Heidmann avait coutume de dire « quand on veut parler de trous noirs il faut laisser son bon sens au vestiaire ».

LVdlR : Mais alors, que se passait‐il quand une étoile à neutrons voyait sa masse dépasser 3,3 masses solaires ?

JPP : On pensait qu’elle implosait.

LVdlR : Et les neutrons ?

JPP : Il n’y avait plus de neutrons, ni de particules. Seulement « de la matière », d’une nature non définie. Je peux donner une image illustrant la façon dont ces gens voyaient la chose. Imaginez un puits très profond, dans lequel vous entassez des ampoules électriques. Elles sont au contact, comme les neutrons dans l’étoile. Vous imaginez bien que vous ne pouvez pas entasser des ampoules indéfiniment. Il arrivera un moment où la résistance du verre s’avérera incapable d’encaisser la pression.

LVdlR : Et on aura une dégringolade de débris de verre vers le fond de ce puits.

JPP : C’est là qu’intervient quelque chose dont Kipling dirait « que c’est grosse astuce et force magie ». Dans cette solution de Schwarzschild extérieure, il y a une variable t qu’on décide de considérer comme étant le temps vécu par un observateur extérieur. Quand l’étoile à neutrons reçoit la quantité fatidique de matière émise par l’étoile voisine, elle implose, en un millième de seconde. Mais pour l’observateur extérieur, tout ceci semble se dérouler en un temps infini. Il y a découplage des temps.

LVdlR : Il y a plusieurs temps !?!

JPP : En Relativité Générale, l’écoulement du temps dépend de l’endroit où on se trouve. Imaginez un être qui soit insensible à la gravitation, qui habite sur une étoile à neutrons. Imaginons qu’il puisse, tel un personnage du Petit Prince, y faire pousser des pommiers, eux aussi insensibles à la gravitation. Une pomme se décroche d’un pommier et tombe à la surface de l’étoile à neutrons. Le type ramasse cette belle pomme rouge, et la porte à sa bouche. Soudain il réalise qu’elle est devenue ... verte.

LVdlR : Parce que la forte gravitation qui règne à la surface d’une étoile à neutrons altère l’écoulement du temps ?

JPP : Exactement. Laissons pour le moment de côté cette idée de « trous noirs géants » qui seraient censés être au centre des galaxies. On y reviendra plus loin. La densité liée à ces objets n’a absolument plus rien à voir avec celle des étoiles à neutrons. Ces objets sont aussi beaucoup plus grands, beaucoup moins denses. Par contre, quand vous mettez dans une boite d’allumettes la matière d’une étoile à neutrons, cela représente des milliards de tonnes. Au voisinage d’une étoile à neutrons, le champ gravitationnel varie très vite avec la distance. Si une telle étoile se transformait en trou noir, avec une surface horizon, et si des astronautes courageux tentaient de franchir cette frontière, quitte à ne plus jamais pouvoir revenir, leur vaisseau serait distendu et disloqué. Il en serait de même pour leurs corps, les molécules qui le composent. Par contre une telle plongée serait envisageable dans un « trou noir géant ».

LVdlR : Les passagers du vaisseau ne s’apercevraient de rien ?

JPP : Non. Par contre, pour un observateur extérieur cette plongée n’en finirait pas, durerait un temps infini. Du fait de ce dérapage temporel, les messages radio envoyés par les passagers deviendraient inaudibles, en dégringolant dans le grave, à l’infini. L’image du vaisseau virerait au rouge, puis à l’infrarouge. Qu’il s’agisse de « trous noirs géants » ou de « trous noirs stellaires » c’est ce découplage temporel qui est la clé de voute du modèle.

LVdlR : Comme cette implosion d’étoile à neutrons, pour un observateur extérieur, dure un temps infini, le théoricien déclare qu’il ne se sent pas tenu de décrire le résultat d’une opération qui, à ses yeux, se déroule en un temps infini. Il ne se sent pas non plus tenu de décrire le contenu d’une sphère qu’on ne pourra jamais observer, puisqu’aucune lumière ne peut en sortir. On alors ça lui permet d’envisager et de raconter n’importe quoi en toute impunité, en employant toujours le conditionnel.

JPP : La suite, vous la connaissez. Les « découvertes » concernant des tas de choses inobservables se sont succédées. En 1974 Hawking est devenu célèbre en « démontrant » que les trous noirs devaient être « lisses » et qu’en émettant du rayonnement, ils devaient se dissiper en 10^50 années. On cherche à composer avec des paradoxes (le paradoxe de l’information) liés à des objets dont on ne sait même pas s’ils existent. Si vous voulez en savoir plus sur « l’état de l’art », procurez‐vous le numéro 1161 de juin 2014 de la revue Science et Vie qui titrait, en page de couverture :

 

L’expression « Au-delà du réel » me semble tout à fait appropriée. Depuis des décennies toute la physique théorique et la cosmologie ont perdu tout contact avec la réalité. Feu mon ami le mathématicien Jean-Marie Souriau avait coutume de dire que la physique théorique était devenue un vaste hôpital psychiatrique où les fous avaient réussi à faire enfermer ceux qui étaient réfractaires à cette folie collective dont la théorie des cordes est un parfait exemple. Une discipline que Souriau qualifiait « de mathématique sans rigueur et de physique sans expérience ». Vous y trouverez dans ce numéro de Science et Vie 15 pages de « cosmo blabla ». Tout est au conditionnel : « serait... pourrait, expliquerait ... », comme l’immense majorité des pseudo découvertes contemporaines. Vous savez ainsi que l’approche des supercordes fournirait 10^500 théories possibles. Récemment je me suis aperçu qu’Andréi Linde, auteur de la théorie de l’inflation cosmique, est aussi un des pères des « baby univers ». Il les a récemment ... dénombrés. Selon l’approche envisagée, leur nombre se situerait entre 10^56 et 10^82. Et le public avale tout cela.

LVdlR : Comment voulez-vous qu’il réagisse ? Il n’y comprend rien.

JPP : Dans une vidéo on assiste à un show à deux avec deux personnages. L’un, tenant de la théorie des cordes et l’autre, Carlo Rovelli, chef de file d’une nouvelle approche, celle de « la gravitation à boucles » se livrent à un numéro grotesque. A un moment l’homme des supercordes dit que « dans sa discipline, on n’explique rien, et on ne prévoit rien, et que c’est ennuyeux ». Rovelli lui répond : N’en soyez pas ennuyé. Pour nous, c’est la même chose. C’est à la deuxième minute de la vidéo (en anglais). Accompagnés par la salle, tous deux éclatent de rire.

LVdlR: Rovelli est dans un labo de Marseille, donc près de votre résidence.

JPP : Je lui ai demandé de me recevoir en séminaire, par deux fois. Refus clair et net. Mais revenons à cet article du Science et Vie de Juin 2014. On lit qu’en 2013 un certain Polchinski a suggéré que les trous noirs puissent être entourés par un « mur de feu », qui disloquerait toute matière avant qu’elle n’atteigne la sphère horizon. Quand à l’intérieur du trou noir, pas de problème : « ce serait (toujours au conditionnel) un embrouillamini de supercordes infiniment petites ». Dans cet article on ressort une vieille lune, déjà déclinée dès les années 70, par des gens comme Wheeler et Sakharov : l’identité de nature entre les trous noirs et les particules. Une « fantastique unification » mais qui, en l’état, « manque de tout support théorique ». On lit « qu’il reste un énorme travail à faire, mais que le profit pourrait être considérable ».

LVdlR : Cet article ressemble à un mouvement de défense vis à vis des doutes récemment exprimés par Stephen Hawking.

JPP : Il y en aura d’autres. Je me souviens de ce que m’avait dit un jour le rédacteur en chef d’une revue de vulgarisation scientifique : « quand les ventes baissent, on fait du trou noir ». S’il s’avère que les trous noirs n’existent pas, 95 % des spécialistes de cosmologie du monde entier vont se retrouver au chômage. Des centaines de thèses de doctorat et des milliers d’articles parus dans des revues scientifiques seront bons pour la décharge, les ventes des revues de vulgarisation vont fléchir.

LVdlR : Bon, mais si vous soutenez cette idée, il faut quand même une confirmation observationnelle, non ?

JPP : Oui, ces objets, on ne les observe simplement pas. La confirmation qu’un objet n’existe pas, c’est qu’on ne l’observe pas, point.

LVdlR : Mais ... les trous noirs géants ?

JPP : J’aborderai cette question plus loin. La, on a bien un phénomène. Des étoiles orbitent à très grande vitesse autour d’un objet, ce qui lui donne une masse de millions de masses solaires voire dans d’autres galaxies atteignant le milliard de masses solaires. Mais ces objets ne sont pas des trous noirs.

LVdlR : Pourquoi les a‐t‐on immédiatement qualifiés de trous noires géants ?

JPP : Parce qu’il FAUT que les trous noirs existent, d’une manière ou d’une autre. Sinon c’est toute la cosmologie et l’astrophysique qui s’effondrent. La cosmologie est pleine de trucs qu’on ne comprend pas, comme les quasars.

LVdlR : Eux aussi sont des trous noirs ?

JPP : Bien sûr.

LVdlR : Et vous avez évidemment une toute autre idée sur la question.

JPP : Présentée en 1997 dans mon livre « On a perdu la moitié de l’univers ». Mais c’est un autre sujet.

 

 Crédit images : JP Petit

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