Reconnaissance faciale à l'ère de la pandémie, vers un contrôle total ou un avenir plus sûr?

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À l'ère de la pandémie, la généralisation de la reconnaissance faciale, un outil contradictoire qui vise à optimiser le temps et renforcer la sécurité mais rime avec «contrôle total», est «inévitable», explique dans une interview à Sputnik Yaroslav Kouzmitsky, chef du développement de l’entreprise InPrice spécialisée dans le domaine.

«Dans un avenir proche, nous devons nous attendre à une généralisation rapide et incontournable des systèmes de reconnaissance faciale», indique Yaroslav Kouzmitsky, chef du développement de l’entreprise de distribution InPrice, spécialisée dans ce domaine, interrogé par Sputnik. Cet expert des nouvelles technologies a présenté son rapport dans le cadre d’une table ronde baptisée Des systèmes complexes de sécurité applicables au domicile, qui s’est tenue le 20 octobre en marge de la conférence Interpolitex à Moscou. Pour Sputnik, il a passé en revue les avantages et les inconvénients de la reconnaissance faciale, cet avancement technologique prometteur du point du vue du confort urbain, mais assez inquiétant s’agissant de la vie privée.

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M.Kouzmitsky admet que l’année 2020 est pour plusieurs raisons devenue une véritable «poussée» pour la technologie de la reconnaissance faciale. Il s’agit d’abord des changements «de caractère critique» qui se sont produits au cours de cette année. Pour ce qui est du monde scientifique, le développement des réseaux de neurones artificiels, au cœur de la technologie, semble avoir atteint son apogée, précise-t-il. Le monde de la santé, lui, est bouleversé par la pandémie: des technologies sans contact, dont des dispositifs de prise de la température automatique, sont demandées comme jamais, ajoute M.Kouzmitsky.

Le Covid-19 comme un accélérateur

En général, il y a trois principaux types d’identification par le biais de la biométrie, en fonction de ses marqueurs: l’empreinte digitale, la reconnaissance de l'iris et celle des traits du visage. D'après M.Kouzmitsky, l’empreinte digitale, un outil presque omniprésent, du passage du contrôle aux frontières au déverrouillage de l’iPhone, est déjà en train de passer aux oubliettes à cause de la pandémie.

«Pour s’identifier à l’aide de l’empreinte, il faut scanner son doigt, toucher la même surface qu’a touchée la personne avant vous, donc potentiellement contagieuse», explique-t-il.

Qui plus est, avec la pandémie en toile de fond, la société est devenue «moins réticente» à la généralisation de la reconnaissance faciale. «En 2020, cette technologie est d'une actualité brûlante. Le système de reconnaissance faciale est souvent doté d’un dispositif de mesure autonome de température corporelle sans contact, un moyen sûr, efficace et rapide de dépister de potentiels malades. Cela peut être particulièrement utile dans tous les lieux publics en ces temps de pandémie», souligne-t-il.

Un meilleur confort et une sécurité renforcée

Selon lui, la mise en œuvre «inévitable» de la reconnaissance faciale était déjà en marche, les gens aspirant à un meilleur confort urbain. La pandémie n’a fait que l’accélérer.

La porte à l’entrée de votre immeuble qui s’ouvre sans que vous deviez vous servir d’une clé, de l’argent que vous pouvez retirer dans un distributeur sans carte bancaire, ni passeport. Voilà comment M.Kouzmitsky décrit ce futur proche où tout sera fait pour optimiser son temps, y compris dans l’industrie.

«Habituellement déjà assez limitée à toute production industrielle, désormais la marge de manœuvre y est encore moindre. Avant de laisser entrer un employé, il faut prendre sa température et s’assurer qu’il a son masque. Grâce à ces dispositifs, il est possible de faire toutes ces démarches rapidement, le système étant capable d’identifier la personne et de dépister la fièvre en trois secondes», précise M.Kouzmitsky.

En plus, grâce aux dispositifs de reconnaissance faciale installés sur des portes d'immeubles, celles-ci seront encore plus protégées, minimisant le risque d’entrée de malfaiteurs.

«Alors qu’il est possible de reproduire une clé ou une carte d'accès à un bâtiment, personne ne pourra reproduire ou voler votre visage. Il s’agit donc d’un niveau de sécurité renforcé», argumente-t-il. Et d’ajouter: «La technologie est déjà à ce point avancée qu’elle ne fait presque pas d’erreurs».

Alors, tous ces bénéfices sont palpables à l'échelle d’un immeuble, d’un quartier, mais ils peuvent l'être également à l'échelle de la ville, poursuit-il, pointant l’exemple de la capitale russe. En effet, le métro moscovite a lancé la mise en œuvre de systèmes de reconnaissance faciale en 2018. La même année, le maire de Moscou s’est félicité de plusieurs interpellations de criminels, effectuées à l’aide du dispositif.

Le revers de la médaille

Dans le même temps, M.Kouzmitsky reconnaît le caractère pour le moins anti-utopique du processus.

«À vrai dire, selon leur catégorisation, ces systèmes relèvent en effet d’un "contrôle total", il ne faut pas se mentir. Cela existe. Mais, si vous voulez, même sans la reconnaissance du visage, les services de l’État savent contrôler celles et ceux qui les intéressent. Ici, il ne faut pas se mentir non plus. Ainsi, le dispositif ne change pas beaucoup de choses. La digitalisation est incontournable et l’installation d’un système de reconnaissance faciale n’est qu’une des composantes de cette tendance globale», explique-t-il.

«Comme chaque phénomène, celui-ci a son revers de la médaille. Certes, une fuite d’informations confidentielles vers des malfaiteurs est bien possible, mais cela relève des compétences de l’État qui doit protéger la sécurité des données de ses citoyens. Et parfois il y a des failles», avoue-t-il.

«L’essentiel est que les gens semblent y être prêts, car la somme des avantages de la mise en œuvre de ces systèmes, des meilleurs sécurité et confort, est bien plus importante que celle de ses inconvénients», a-t-il conclu.
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