Gabriel Hill est un photographe portraitiste commercial et ancien étudiant et photographe d'un studio basé à Bâle, en Suisse. Son studio se trouve juste à côté d'un bâtiment où vivent des réfugiés et tous les jours quand il va au travail, il peut voir leur vie quotidienne.
A force de prendre quotidiennement les photos de ceux qui possèdent beaucoup plus que des gens ordinaires, ça lui faisait de plus en plus de mal de passer chaque jour devant ceux qui ne possédaient presque rien.
Les photos de réfugiés ne manquent pas sur Internet, mais ces images sont le plus souvent dramatiques: des réfugiés portant des vêtements sales, avec des larmes dans les yeux… C'est surtout cette image que veulent propager les médias. Mais dans le même temps, dans la plupart des cas, ni leurs noms, ni surtout les histoires qui se cachent derrière eux ne sont dévoilés.
"J'ai opté pour une approche différente afin de montrer les réfugiés avec dignité et sans dramatisation. Afin de compatir au sort de quelqu'un, vous devez en savoir un peu plus sur lui et je voulais que les gens puissent ressentir la même chose", lit-on sur le portail du photographe.
Gabriel Hill confie avoir passé plus d'un an à faire ces dix portraits. Les gens venaient et racontait leurs histoires et il les a vécues toutes. Malgré son envie de faire passer une image moins dramatique, il a décidé quand même de laisser tous les détails sans rien omettre ou alléger.
Ces réfugiés vous racontent leur histoire:
Rohulla, 24 ans, a fui l'Afghanistan en 2010, et quand il est parti, il ne pouvait rien prendre avec lui, mis à part les vêtements qu'il portait.
"Je suis arrivé en Suisse par mes propres moyens, et ce collier est tout ce qu'il me reste de ma famille et de mon pays. Il représente tout ce que j'ai. Il m'aide à ne pas me sentir seul, comme si mon père était toujours avec moi".
"Je n'ai rien pu prendre si ce n'est les vêtements que je portais et un bout de papier avec le numéro de téléphone de ma famille", raconte Ahmet, 23 ans, qui a dû prendre un bateau en Libye pour fuir l'Erythrée en 2013.
A la moitié du trajet, le bateau a chaviré et ses vêtements ont disparu dans la mer, avec ce bout de papier et le numéro de ma famille.
"Des mois après avoir fui l'Erythrée, j'ai trouvé quelqu'un en Suisse qui a pu retrouver ma famille. Ils pensaient que je n'avais pas survécu à la traversée. Ce bout de papier avec leur numéro dessus était à ce moment-là la chose la plus importante que j'avais"
Vinasithamby, 64 ans, a dû quitter le Sri Lanka en 1984. Depuis qu'il a laissé sa famille derrière lui, les objets les plus importants à ses yeux sont les photos de ses proches. "C'est comme si elles veillaient sur moi. Sur ces photos, on peut voir mes parents, mon frère et ma sœur qui sont décédés", explique-t-il.
Quand la guerre en Bosnie a commencé en 1992, tout s'est passé si vite que Sejla, 33 ans, n'a pas eu le temps de comprendre ce qu'elle voulait garder avec elle pendant la fuite. Elle a oublié de prendre son jouet préféré, un lapin en peluche, et une fois arrivée en Suisse, elle a commencé à écrire des lettres à son père resté sur place en lui demandant à chaque fois s'il l'avait trouvé.
"Je ne peux pas vous expliquer dans quel état j'étais lorsque j'ai revu mon père trois ans plus tard, en 1995. Tout mon corps tremblait quand je l'ai vu arriver à l'aéroport de Zurich, alors qu'il tenait mon lapin".
Shireen, qui a fui l'Afghanistan en 2010, a choisi un portable comme la chose la plus importante. Quand il a quitté sa famille, son père le lui a donné pour rester en contact.
"Ce téléphone et les vêtements que je portais étaient les seules choses que je pouvais avoir avec moi. Grâce au téléphone, j'ai pu rester en contact avec ma famille et leur dire que j'étais arrivé sain et sauf".