La Russie vue par la presse de la CEI et des pays baltes

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ESTONIE

Après le refus du parlement letton d'assortir le futur traité frontalier avec la Russie de sa déclaration (celle qui devait confirmer les revendications territoriales lettones sur le district de Pytalovo, dans la région russe de Pskov, ndlr), le texte, de l'avis des analystes, pourrait être signé dès février. Mais, prédisent les journaux, l'Estonie risque alors d'essuyer le principal coup de la propagande russe. "L'Estonie a toutes les chances de devenir l'ennemi numéro un de la Russie. Depuis de longues années, la machine propagandiste russe visait la Lettonie : tantôt elle critiquait sa réforme de l'éducation, tantôt le nationalisme letton. En été, 46% des Russes, à en croire des sondages, estimaient que la Lettonie était le plus grand ennemi de la Russie. En parlant de l'Estonie, 28% seulement des sondés en Russie étaient de cet avis (...). Après l'abandon par la Lettonie de ses positions sur la question frontalière, le fer de lance de la propagande russe pourrait être réorienté sur l'Estonie (...) ("Eesti Paevaleht", 03.02).

Mais certains journaux invitent à suivre l'exemple de la Lettonie voisine. "La décision du parlement letton (...) montre que les intérêts de politique extérieure pourraient être au-dessus des jeux de politique intérieure (...). Le temps est peut-être venu pour l'Estonie également de faire quelque chose pour que le traité frontalier avec la Russie entre en vigueur" ("Postimees", 03.02.).

LETTONIE

Les députés ont reconnu l'urgence du document sur la frontière avec la Russie. Ce qui signifie qu'il devra passer par deux lectures au lieu des trois normales. Pour expliquer cette hâte, les médias citent les pressions des milieux d'affaires qui se tiennent derrière les partis au pouvoir et l'intention de Riga de se joindre au projet de chantier du Gazoduc nord-européen. "Il existe un intérêt pour des projets en matière d'énergie et de transit (...). Le plus souvent, on invoque l'aménagement éventuel d'un réservoir souterrain de gaz à Dobele, ainsi qu'une augmentation du transit ferroviaire de pétrole russe par la Lettonie" ("Diena", 01.02).

La presse locale a accordé une attention soutenue à la visite en Lettonie du président de la Chambre de commerce et d'industrie russe Evgueni Primakov. Pour certains commentateurs, cette visite, significative en soi, témoigne d'un début de normalisation entre les deux pays. "Ex-chef du Service de renseignements extérieurs, du ministère des Affaires étrangères et du gouvernement russe est un personnage prestigieux dans l'entourage du Kremlin (...). Cet homme a conservé son influence politique" ; "La visite de M. Primakov pourrait non seulement consolider les rapports économiques entre les deux pays mais aussi contribuer à des rencontres au sommet (...). Etant donné le poids de sa personnalité, cette visite pourrait être un nouveau signal envoyé par un Moscou désireux de lever tous les obstacles au bon voisinage entre les deux pays" ("Telegraf", 05.02).

LITUANIE

Le fait que la Lettonie ait renoncé à ses revendications territoriales envers la Russie est expliqué par la presse locale par l'aspiration de Riga à une plus vaste intégration dans l'Union européenne. "La question semble maintenant épuisée. Et cela est dans l'intérêt de Riga car sa frontière avec la Russie est aussi la frontière est de l'Union européenne. La Lettonie est tenue de la garder en conformité avec les normes de l'UE. Mais il y a un autre problème : souvent, des embouteillages automobiles de plusieurs kilomètres se forment de part et d'autre à la frontière russo-lettonne. Et on ne saura aménager d'autres points de passage avant que ne soit signé le traité sur la frontière "(Penki.lt, 02.02).

UKRAINE

La déclaration faite par le président russe, Vladimir Poutine, lors de sa conférence de presse au Kremlin, sur la possibilité et les conditions de l'accès de Kiev aux ressources naturelles russes a suscité une vive discussion dans la presse au sujet de l'avenir du système ukrainien de transport de gaz. Selon certains médias, Kiev doit profiter de la situation et du moins examiner avec la Russie les perspectives de coopération.

"L'Ukraine n'a pas reçu de proposition aussi alléchante du Kremlin au cours de ses 15 ans d'indépendance. Il ne reste qu'à s'assurer que l'initiative poutinienne ne contienne pas quelque piège... Une alliance avec l'Ukraine pourrait démontrer aux partenaires européens de la Russie sa disposition à s'en tenir à des règles du jeu civilisées... Pour moderniser le système ukrainien de transport de gaz, il faut quelque trois milliards de dollars... L'Ukraine aurait raison d'entamer des négociations avec la Russie" ("Glavred", 05.02).

L'ajournement du règlement définitif de la question relative au consortium gazier risque non seulement d'entraîner des pertes directes, mais même de réduire à néant l'atout préféré de Kiev.

"Le gazoduc s'est transformé en une sorte de porte-bonheur pour l'Ukraine... Ayant conservé le monopole de l'Etat en matière de gestion du tuyau mais n'ayant pas la possibilité de le remplir, Kiev s'est mis à "vendre de l'air". Une accélération rapide de l'offensive économique de Moscou réduit les chances de livraison d'énergie depuis des sources alternatives... Aucune méthode ne permettra à l'Ukraine de tirer profit du gazoduc. L'aspiration à garder le contrôle du système de transport gazier est un espoir de poursuivre le siphonnage illégal de gaz" ("Ukraine daily", 02.02).

Cependant, la plupart des médias ont estimé que toute forme de participation de la Russie à la gestion du système ukrainien de transport de gaz représenterait une sérieuse menace pour la souveraineté du pays et ont jugé que l'espoir de l'Ukraine d'avoir accès aux hydrocarbures russes était chimérique.

"L'ensemble du gaz produit sur le territoire russe et susceptible d'être exporté doit être vendu à Gazprom et personne d'autre n'a d'accès au tuyau russe... Moscou peut changer les règles du jeu" ("Zerkalo nedeli", 03.02).

"Se laissant entraîner dans une affaire louche de grande envergure, l'Ukraine n'est pas près de recevoir du gaz bon marché. En revanche, elle devra payer le "plaisir" douteux de mettre en valeur des gisements russes en renonçant au dernier bastion de son indépendance énergétique" ("Delovaïa stolitsa", 05.02).

ARMENIE

L'intention de la Russie d'engager des fonds considérables pour construire, en Arménie, une raffinerie destinée à la transformation du pétrole iranien est considérée par les médias comme un projet ambitieux et absurde du point de vue économique. "Certes, le projet serait excellent, s'il n'était gêné par une série de facteurs� Premièrement, faut-il procéder au raffinage du brut iranien en Arménie, si la même opération réalisée à proximité des gisements (en Iran) coûte moins cher? Deuxièmement, un préjudice écologique irréparable sera causé à l'Arménie. Troisièmement, en tant que projet purement politique, la construction de la raffinerie ne fournira aucun avantage économique" (PanARMENIAN.Net, 01.02).

GEORGIE

Les experts sont d'accord pour dire que dans ses relations avec Tbilissi, le Kremlin a choisi d'utiliser les leviers économiques. Certains commentateurs sont arrivés à la conclusion selon laquelle ce choix de Moscou ne manquera pas d'aggraver le conflit russo-géorgien. "Il ne s'agit plus de politique ni de confrontation. Les relations entre Moscou et Tbilissi évoquent plutôt l'hostilité. Dans cette lutte, Poutine garde son calme, car il a du pétrole et du gaz. Ces leviers sont plus efficaces que les armes à feu(�) Outre le "piège du gaz", Tbilissi se trouve confrontée aux tendances séparatistes(�) La guerre entre Poutine et Saakachvili continue ("Alia", 03.02).

D'autres analystes estiment, au contraire, qu'au fur et à mesure que la Russie renforce son contrôle sur l'économie géorgienne, les relations entre ces deux pays doivent se stabiliser. "La Russie a su utiliser avec succès ses leviers économiques. Selon des experts, une partie considérable des biens publics de la Géorgie est passée entre les mains d'hommes d'affaires russes. La Russie a-t-elle besoin de déstabiliser la situation en Géorgie au moment où elle y possède des entreprises de production ou d'autres types de biens? La déstabilisation ne tardera pas à diminuer ses revenus" ("Mteli kvira", 05.02).

AZERBAÏDJAN

La presse a violemment critiqué la position du chef de l'Etat russe sur la façon de régler le conflit dans le Haut-Karabakh. "Pendant la conférence de presse tenue au Kremlin, le président Poutine a proposé une solution "originale" de ce problème: il a invité les parties au conflit à produire ensemble le vin "Agdam", très populaire à l'époque soviétique(...) La Russie a déjà fait de cette question un thème de plaisanteries (�) Inutile de s'attendre à ce que le conflit soit réglé dans un avenir rapproché. La Russie sait fort bien ce qu'il faut faire pour empêcher l'Azerbaïdjan de s'intégrer dans la communauté occidentale" ("Yeni Musavat", 03.02).

Les médias soupçonnent Moscou d'invoquer l'instabilité politique dans le golfe Persique pour promouvoir ses propres intérêts, y compris économiques. Il n'est pas exclu qu'en soutenant ouvertement l'Iran et en manifestant son intention d'encourager les ambitions de Téhéran, Moscou s'efforce de déséquilibrer la situation dans le golfe Persique. Car toute instabilité politique dans cette région signifie en premier lieu une hausse vertigineuse des prix du pétrole avec toutes les conséquences politiques et économiques que cela peut entraîner pour la Russie et l'Occident" ("Ekho", 01.02).

OUZBEKISTAN

Le changement de la législation russe sur l'immigration permettant aux ressortissants d'autres pays de la CEI de se faire naturaliser en Russie est une décision très dangereuse, selon les experts. L'apparition d'un grand nombre d'immigrés avec d'autres traditions, une culture et un mode de vie différents pourrait provoquer la répétition du phénomène français - de manifestations en masse d'enfants immigrés de la deuxième génération. "Ayant acquis la nationalité russe... et obtenu le droit de voter et d'être élu, les anciens travailleurs migrants ou leurs enfants se demanderont: pourquoi ne sommes-nous pas au pouvoir puisque nous sommes nombreux? El ils auront raison en tant que citoyens russes... Le problème des habitants autochtones est que le mode de vie des immigrés est très fermé sur lui-même" (Ferghana.ru, 31.01). "La Russie se trouve dans la même situation que les pays européens pendant les années 1950-1960: des travailleurs migrants des anciennes "colonies" se sont rués vers leur ancienne "métropole". "La Russie rappelle la France - où des immigrés ont manifesté en masse en 2005 - selon les paramètres socioculturels de ce processus et leurs conséquences. Les ressortissants de l'Asie Centrale soviétique constitueront la principale "force de frappe" dans les éventuelles révoltes d'immigrés si elles se produisent en Russie" (Ferghana.ru, 01.02).

TADJIKISTAN

Les médias accusent la Russie de réduire considérablement la part tadjique dans la construction de la centrale hydraulique de Rogoun. "Le Tadjikistan et la Russie ont signé leur premier accord intergouvernemental sur l'achèvement des travaux de construction de la centrale de Rogoun en avril 1994. Les travaux devaient être financés à parité... En 2004, RusAl est arrivé au Tadjikistan... A présent, le Tadjikistan ne pourra posséder qu'une partie des actions - 25% au maximum. Autrement dit, le Tadjikistan risque de perdre le contrôle d'un ouvrage stratégique important" (Asia-plus, 01.02).

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