La Russie vue par la presse de la CEI et des pays baltes

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ESTONIE

De temps à autre, la presse locale soulève la question de la normalisation des relations avec la Russie. "Y a-t-il des intérêts communs dans le cadre desquels les deux pays pourraient conclure des accords mutuellement avantageux? Oui, il y a une coopération transfrontalière, mais ce n'est pas grand-chose. Ce qui veut dire que si l'Estonie a des problèmes qu'elle voudrait régler avec la Russie, la Russie, elle, n'a pas d'intérêts similaires à l'égard de l'Estonie (...). Y a-t-il, peut-être, des "trucs" au moyen desquels l'on pourrait créer des problèmes pour la Russie? On pourrait bien-sûr y réfléchir, mais c'est un fait qu'à tout "truc" de la part de l'Estonie, la Russie pourrait répondre par une dizaine, qui plus est toujours très désagréables. Il vaut mieux même ne pas essayer. On n'a pas encore réussi à trouver de solutions purement bilatérales" ("Diplomatia", 04.06).

Se référant à des sondages, les journaux constatent que les Russes placent l'Estonie au nombre des pays les plus hostiles. Les journalistes en rejettent la responsabilité sur les autorités russes. "L'an dernier, l'Estonie, au nombre des pays hostiles, partageait la 4e ou la 5e place avec l'Ukraine (...). Sur fond de conflits actuels avec l'Estonie, les rapports avec la Lettonie et la Lituanie ont connu une certaine détente (...). Mais, fait inquiétant, l'image de l'ennemi peut facilement changer de lieu, en fonction de la situation politique courante" ("Postimees", 02.06). "La haine que de vastes milieux en Russie éprouvent pour tous les peuples qui ont fait un jour partie de l'Union soviétique sert de fond. Plusieurs générations devront se succéder encore avant que cette haine ne disparaisse. Dans quelle mesure le gouvernement russe se sert de cette haine dans ses activités est une autre question, mais, en tout état de cause, celle-ci y joue un rôle un rôle non négligeable" ("Diplomatia", 04.06).

LETTONIE

La presse souligne que les autorités russes tirent profit des divergences avec les Etats-Unis sur la question du déploiement de l'ABM en Europe pour consolider les positions du Kremlin en politique intérieure et extérieure. "La Russie utilise l'opposition à la création de l'ABM comme un argument pour faire pression sur les pays de l'Europe de l'Est et encourager la scission en Europe" ("Diena", 04.06). "La déclaration belliqueuse de Sergueï Ivanov sur la possibilité de franchir le bouclier antimissile américain est adressée aux habitants de la Russie qui éliront en mars prochain le successeur de Poutine" ("Latvijas avize", 31.05).

Les experts constatent qu'après "l'affaire Ioukos", la crème du monde des affaires russe recherche un compromis avec le pouvoir, au niveau aussi bien régional que fédéral. Le big business a une puissante influence financière et politique, mais il reste entièrement loyal au Kremlin. "Aujourd'hui, pratiquement tous les grands partis politiques russes sont contrôlés par le Kremlin et ceux qui se retrouvent hors de cette zone d'influence n'ont aucune chance de se faire enregistrer par le ministère de la Justice et de participer aux élections. Le pouvoir impose des restrictions croissantes aux droits des investisseurs étrangers et aux structures d'affaires sur le marché russe (...). Certains de ces groupes sont en mesure de proposer leurs propres candidats pour la présidence, mais leurs leaders ont peur de se faire remarquer comme tels" ("Biznes&Baltija", 04.06).

LITUANIE

Les médias lituaniens accusent la Russie de refuser de développer les rapports de partenariat avec l'Occident, ce qui constitue un obstacle à la garantie de la sécurité en Europe. "Au lancement des négociations concrètes entre Washington et Varsovie sur le déploiement d'intercepteurs de missiles, le Kremlin a répondu en pressant le bouton "tir". Quelques heures seulement après le lancement réussi du missile RS-24 depuis un site près d'Arkhangelsk vers une cible sur le Pacifique, Vladimir Poutine a annoncé la création d'une nouvelle génération de missiles, en mesure de franchir tout bouclier. Il a prévenu que l'Europe indocile, au cas où elle accueillerait des missiles américains, se transformerait en poudrière. Comme si l'Europe n'était pas déjà une poudrière face à la militarisation démesurée de la région de Kaliningrad et de la Transnistrie, au chantage énergétique et aux agissements des services secrets de Moscou à Londres ou à Tallinn" ("Lietuvos Rytas", 02.06).

La question de la garantie de l'indépendance énergétique, devenue d'une grande actualité après la déclaration du ministre russe de l'Energie Viktor Khristenko selon laquelle Moscou ne projetait pas de reprendre les livraisons de pétrole en Lituanie par la conduite Droujba, suscite une préoccupation particulière des experts. "Les projets du groupe polonais PKN Orlen qui gère des entreprises pétrolières en Lituanie (raffinerie Mazeikiu Nafta), en Pologne et en République tchèque d'acquérir des gisements pétroliers à l'Est s'écroulent (...). PKN Orlen n'a pas réussi à s'entendre avec le consortium pétrogazier kazakh KazMunayGaz sur l'acquisition de gisements de matières premières, et maintenant le groupe polonais renonce lui-même à des projets similaires en Azerbaïdjan (...). La lutte avec la Russie pour les matières premières est perdue pour lui" ("Verslo Zinios", 30.05).

BIELORUSSIE

Les observateurs approuvent la position de Moscou à l'égard du Traité sur la réduction des forces conventionnelles en Europe (FCE). "Est-ce qu'il n'existe aucun leader pour expliquer clairement le danger d'une nouvelle course aux armements dans l'Union Européenne qui nous parle des valeurs humanitaires depuis tant d'années?...On présente le retrait de la Russie du Traité FCE comme un nouvel exemple de la menace russe et de la militarisation de la Russie... Coller des étiquettes est un jeu dangereux. Ceux qui créent aujourd'hui une image si repoussante de la Russie (et d'autres pays) et qui appellent même à un isolement au centre de l'Europe ne comprennent-ils donc pas qu'ils réveillent des forces destructrices? Les bêtes noires politiques de l'Occident sont des anges par rapport à ces forces" (Belarus Segodnia, 30.05).

Certains experts ont considéré la recommandation officieuse du Service fédéral russe des douanes de ne pas exporter d'échantillons biologiques humains à l'étranger comme une action politique du Kremlin. Ils affirment que les services secrets se livrent à un simulacre de "guerre bactériologique" en prévision des élections. "A l'heure actuelle, aucune menace génétique ou biologique réelle ne pèse sur la Russie ou sur nous-mêmes. Tout s'explique par les intérêts des clans financiers moscovites et les prochaines élections législatives et présidentielles en Russie... Plus les élections sont proches, plus nombreuses seront de telles opérations des services secrets qui iront même jusqu'à parler d'attaques d'extraterrestres" (Telegraf, 31.05).

UKRAINE

La plupart des observateurs critiquent les propos sur l'Ukraine émis par le président russe devant les journalistes du G8. "L'Ukraine a eu l'honneur d'être mentionnée par le chef d'une grande puissance mondiale. L'ancien peuple frère a tant de fois dépassé les bornes au niveau international que les autorités russes peuvent y aller franchement. Et c'est précisément ce qu'elles font" (Provokatsia, 05.06). "Si quelqu'un avait le droit de parler ainsi de l'avenir de l'Ukraine,... ce ne serait pas Vladimir Poutine, "le seul démocrate du monde" (ProUa, 05.06).

Selon les médias, Vladimir Poutine a profité de sa rencontre avec des journalistes étrangers pour créer une nouvelle intrigue autour du "problème 2008" et préparer ses électeurs aux nouvelles méthodes de règlement du problème. "Il est déjà clair que M.Poutine n'a pas de vrai successeur... Dmitri Medvedev et Sergueï Ivanov n'ont pas assez de trempe pour être ses successeurs. Le président a déclaré à maintes reprises qu'il ne briguerait pas un troisième mandat, d'autant plus que la législation ne le permet pas. Est-il grand temps de la changer?" (Gazeta Po-kievski, 05.06).

MOLDAVIE

Selon les résultats d'une enquête, les faux pas commis par la Moldavie dans le domaine gazier lui ont coûté 1,5 milliard de dollars. "Les experts affirment que les règles de comptabilité actuelles profitent à la Transnistrie qui ne participe pas à la couverture des pertes d'exploitation des gazoducs qui incombe uniquement à la Moldavie et à l'Ukraine... La Moldavie a perdu 103 millions de dollars, parce qu'elle n'avait pas aligné le prix du transit sur les nouveaux tarifs de transport de gaz, et 231 autres millions de dollars, parce qu'elle avait couvert les pertes de la Transnistrie. Le préjudice total causé par la mauvaise gestion du secteur gazier dépasse le montant de l'aide versée par les donateurs internationaux ces 15 dernières années, selon les mêmes spécialistes" (Flux, 31.05).

ARMENIE

Indignés, les journaux rapportent la surestarie du ferry Kavkaz-Poti qui a fait tout récemment encore l'objet d'une large publicité. La société russe exploitant le ferry cherche à instaurer son monopole sur le marché arménien du transport de fret. "Reserve capital corporation réclame le contrôle total de l'ensemble du transport de fret en Arménie, ce qui constitue sans doute la condition la plus inacceptable et la plus inadmissible. Autrement dit, son objectif est de devenir un vrai monopole, soit la seule société de transport de marchandises vers l'Arménie et depuis celle-ci. C'est une perspective dangereuse pour l'Arménie. Somme toute, cette société russe sera un levier de plus entre les mains de Moscou pour exercer une pression, tant politique qu'économique, sur l'Arménie" (168 jam, 30.05).

GEORGIE

Les médias sont convaincus de l'impossibilité d'établir des relations normales avec la Russie. "Depuis cette dernière année, toutes les démarches de la Russie était contreproductives. Elle se comportait à peu près comme un teenager en colère qui se regarde dans un miroir et le brise parce qu'il n'aime pas l'image qu'il lui renvoit... La Russie est un pays irrationnel qui a des problèmes d'ordre psychologique, et tant qu'elle ne deviendra pas un vrai pays démocratique, bien des lances seront rompues" (24 saati, 30.05). "Le président Saakachvili... a déclaré vouloir établir des relations d'amitié entre la Géorgie et la Russie et tendre la main de l'amitié au président russe. Quoi qu'il en soit, la Russie veut de toute évidence que la main lui soit tendue par un homme à genoux... Le gouvernement de la Russie ne sait pas être ami. Il ne tient pas du tout à avoir des partenaires égaux, mais seulement des sujets dociles et obéissants" (Akhali Taoba, 01.06).

AZERBAIDJAN

Les médias d'opposition sont préoccupés par les écoutes illicites des canaux de liaison officiels des pays membres de la Communauté des Etats indépendants (CEI), et les observateurs soupçonnent les services secrets russes. "Un entretien téléphonique des présidents de la Géorgie et de l'Ukraine - Mikhaïl Saakachvili et Viktor Iouchtchenko - a été intercepté. Qui plus est, le sténogramme de cette conversation a été placé sur des sites russes. Il n'a pas été difficile pour la Géorgie d'établir qui aurait pu le faire. Les officiels du pays disent que les écoutes des entretiens téléphoniques à un tel niveau relèvent des services secrets de Russie. Ce fait attire de nouveau l'attention sur les aspects invisibles de la politique du Kremlin à l'égard de la CEI. Il n'est pas non plus exclu que les services secrets russes écoutent aussi les conversations téléphoniques d'autres leaders de la CEI, y compris de l'Azerbaïdjan" (Yeni Musavat, 31.05).

Les médias ont accueilli avec enthousiasme la déclaration du président ukrainien Viktor Iouchtchenko qui se propose notamment de limiter la liberté d'action des compagnies pétrolières russes sur le territoire de l'Ukraine, et comme il le souligne dans cette même déclaration, en faveur de l'Azerbaïdjan. "L'offensive de l'Azerbaïdjan est attendue tant dans le domaine des fournitures de gaz naturel, que dans celui des livraisons de pétrole. Ces dernières années, Bakou opte de plus en plus pour l'écoulement sur les marchés du monde non seulement du brut, mais aussi des produits pétroliers. Cette politique peut aussi être poursuivie en Ukraine. Quoi qu'il en soit, l'Azerbaïdjan ne doit pas rater sa chance, mais, par contre, conquérir de manière plus agressive le vaste marché ukrainien. Et ce, d'autant plus que la direction ukrainienne a d'ores et déjà donné son "feu vert" (Zerkalo, 05.06).

KAZAKHSTAN

Les analystes estiment que le retour de la Russie à la tradition de planifier son économie doit rendre sa politique nationale plus prévisible. D'après eux, le sens politique particulier du projet de budget pour 2008-2010 consiste en ce qu'il facilitera l'entrée en fonction du nouveau président russe après son élection. "Non seulement la nouvelle loi de finance permet de définir les priorités du développement économique à long terme, mais elle aide aussi à éviter les collisions et les risques politiques... On peut discuter longuement des qualités et des défauts du principal document financier, mais une chose est certaine: le budget triennal est un pas dans le bon sens" (Liter.kz, 30.05).

Les médias sont très sceptiques quant aux perspectives de la création de l'Union des Etats d'Asie centrale. Les experts estiment que les tentatives d'unir les ressources de combustibles dont disposent l'Ouzbékistan, le Turkménistan et le Kazakhstan avec les potentiels aquatiques et énergétiques du Tadjikistan et du Kirghizstan sont contraires aux intérêts de la Russie et de la Chine. "En cas de création, en Asie centrale, d'une alliance semblable à l'Union européenne, on y verra surgir un marché commun avec une libre circulation des capitaux et de la main-d'oeuvre, ainsi qu'une stratégie commune dans les domaines politique et économique... Il est évident que ni Moscou ni Pékin ne sont intéressés à l'existence d'une telle association: il est plus facile de dialoguer et de s'entendre au format bilatéral avec chacune des parties que de se retrouver face à une structure exprimant les intérêts de tous les pays centrasiatiques" (Gazeta.kz, 30.05).

OUZBEKISTAN

Selon les défenseurs des droits de l'homme, en échange du soutien qu'il apporte au président Islam Karimov et de l'exécution des commandes politiques prévoyant l'extradition de citoyens ouzbeks, le Kremlin obtient des avantages économiques et renforce son influence dans la région. "Ces deux dernières années, il est devenu évident que les autorités russes et ouzbèkes utilisent les événements d'Andijan comme un prétexte très commode pour durcir les répressions contre la société civile (les défenseurs des droits de l'homme, les journalistes et les opposants) et pour violer les droits de l'homme d'une manière encore plus grossière qu'autrefois... On a vu s'intensifier la coopération entre le Service de sécurité nationale de l'Ouzbékistan et le Service fédéral russe de sécurité, ce qui a rendu très précaire la situation des réfugiés ouzbeks vivant en Russie. Celle-ci encourage ouvertement le régime dictatorial de Karimov. Nous ne savons pas combien de personnes ont été extradées sous forme de déportation, ni combien de personnes ont été enlevées et transportées secrètement en Ouzbékistan pour être vouées à l'emprisonnement, aux tortures ou, peut-être, à la mort" ("L'Ouzbékistan musulman", 02.06).

KIRGHIZSTAN

L'initiative de l'ex-premier ministre Félix Koulov prévoyant la création d'une confédération avec la Russie a été le principal événement médiatique de la semaine. Une série de périodiques se sont empressés de dénoncer ce projet, considérant qu'il était dangereux pour l'indépendance nationale du Kirghizstan. Celui-ci "pourrait se retrouver au sein de la Russie... Et alors, l'Etat kirghiz cessera d'exister" ("Bishkek Times", 01.06). "Faut-il que Félix Koulov prenne ses concitoyens pour des enfants stupides qui ne comprennent pas qu'une confédération avec la Russie ne manquera pas de supprimer la souveraineté du Kirghizstan? Il affirme que la Russie se gardera de s'ingérer dans nos affaires intérieures. C'est du mensonge, car la confédération suppose l'introduction d'une monnaie commune... Le Kirghizstan sera obligé d'appliquer les normes russes dans l'économie, la politique douanière, les questions frontalières... De quelle indépendance peut-il être question?!" ("Kyrghyz Rukhu", 05.06).

TURKMENISTAN

De nombreux experts estiment que malgré l'accord sur la construction du Gazoduc caspien signé par les présidents de la Russie, du Turkménistan et du Kazakhstan, la lutte pour le gaz turkmène ne s'est pas encore engagée dans sa phase décisive. "La Maison-Blanche attache toujours de l'importance au projet de gazoduc transcaspien sous-marin et invite Achkhabad à engager des négociations dans le but d'éviter que le gaz provenant des gisements centrasiatiques soit acheminé vers les marchés occidentaux via le territoire russe... Moscou estime pour sa part que les réserves de gaz centrasiatique ne suffiront pas à alimenter les pipelines supplémentaires. Quant à Achkhabad, il n'est pas aussi catégorique. Le projet de gazoduc transcaspien est également soutenu par l'Azerbaïdjan qui espère à l'avenir évincer Gazprom du marché des livraisons de gaz vers l'Europe" (Dogry Yol, 01.06).

TADJIKISTAN

La presse a accueilli avec intérêt aussi bien l'idée - exprimée à Bichkek - de faire revenir dans la région les gardes-frontières russes pour couvrir les frontières sud du Kirghizstan que la déclaration du chef de l'Organisation du Traité de sécurité collective (OTSC), Nikolaï Bordiouja, sur l'impossibilité de cette démarche. "Cette déclaration du secrétaire général de l'OTSC n'est-elle pas un peu prématurée? Il y a de sérieuses raisons de penser que les gardes-frontières russes ne seraient pas de trop au Kirghizstan. Selon des sources informées, ils ont été retirés sous la pression du narcolobby local: la route Khorog-Och est l'un des principaux itinéraires d'acheminement des stupéfiants dans le monde... La Russie n'est nullement intéressée à ce que les populations tadjike, afghane et chinoise continuent d'exercer leur pression sur les frontières sud de ce que nous appelons la communauté eurasiatique. Voilà pourquoi les gardes-frontières russes feraient mieux de contrecarrer cette menace aux abords d'Och et de Djalalabad qu'aux environ d'Omsk et d'Orenbourg" ("Asia-Plus", 30.05).

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