Le 29 février, le groupe français Renault a acquis pour 1 milliard de dollars la minorité de blocage (25% plus une action) du premier constructeur automobile russe AvtoVAZ. Le géant automobile mondial promet de doubler la production de voitures à l'usine AvtoVAZ, dont il recevra probablement le bloc de contrôle l'été prochain. Autrement dit, une croix a été tirée sur le projet de faire renaître l'industrie automobile russe par des moyens propres, sur la base d'AvtoVAZ. Le développement de la construction automobile russe se fera à l'aide de géants automobiles étrangers.
Le milliard de dollars proposé par les Français pour acquérir 25% d'AvtoVAZ tombe à point nommé. Selon les dirigeants de l'usine automobile de Togliatti, cet argent sera immédiatement dépensé afin de rembourser des dettes et pour d'autres besoins urgents.
En plus de cette transaction, un accord de partenariat stratégique a été conclu entre Renault et AvtoVAZ. Conformément à ce document, l'usine russe, qui a produit l'année dernière 770.000 véhicules, devra produire annuellement, d'ici à 2012, 1,5 million de voitures sous les marques Lada, Renault et Nissan. Renault et AvtoVAZ soulignent tout particulièrement le fait que le principe fondamental de leur coopération consiste à préserver la marque Lada. Il est vrai, ces nouvelles voitures seront désormais développées sur des plateformes fournies par Renault.
Dès l'été prochain, Renault pourrait obtenir encore 25% du capital d'AvtoVAZ et en devenir ainsi l'actionnaire majoritaire. En outre, l'introduction en bourse des actions d'AvtoVAZ simultanément en Russie et à la Bourse des valeurs de Londres est prévue pour septembre.
Bref, les plans des nouveaux partenaires sont grandioses. Les Français se sont déjà investis très sérieusement en nommant leurs managers à la tête des principaux départements d'AvtoVAZ: des cadres de Renault seront responsables à Togliatti de la production, de la planification et des achats. On ne peut que se réjouir que ce grand constructeur automobile russe, pressé sur le marché intérieur par ses concurrents de l'Ouest et de l'Est, ait trouvé un aussi sérieux partenaire.
En outre, la transaction a mis un point final aux interminables débats sur la voie à choisir pour l'industrie automobile russe: s'appuyer en priorité sur ses propres forces ou devenir le partenaire "cadet" de géants automobiles mondiaux, en leur ouvrant grand les portes du marché automobile national.
Les constructeurs étrangers, qui détiennent déjà la plus grande part du marché automobile russe, avaient jusqu'à présent pénétré en Russie en suivant deux voies. Dans le premier cas, ils installaient leur propre production en Russie, comme l'avait fait, par exemple, Ford dans la région de Leningrad. Dans le deuxième cas, ils créaient une coentreprise avec un partenaire russe, comme l'avait fait General Motors avec AvtoVAZ en 2002: GM-AvtoVAZ. Quant à Renault, lui est entré directement dans le capital du premier producteur automobile russe et il n'est pas exclu qu'il en devienne prochainement le principal actionnaire.
Il y a encore deux ans, les projets d'AvtoVAZ étaient tout autres. Fin 2005, l'usine avait été placée sous le contrôle de l'entreprise d'Etat Rosoboronexport, agence chargée de l'exportation d'armes russes (c'est à elle que Renault rachète AvtoVAZ). Les projets des dirigeants de Rosoboronexport étaient alors presqu'aussi ambitieux que ceux des Français aujourd'hui: accroître la production jusqu'à 1-1,5 million de véhicules par an grâce à de nouveaux modèles et concevoir d'emblée quatre nouvelles plateformes automobiles. En 2006, le ministère de l'Industrie et de l'Energie avait élaboré une conception du développement de l'industrie automobile russe qui avait pour objectif le développement d'AvtoVAZ. Il était même prévu d'y investir 5 milliards de dollars de fonds publics. Mais le gouvernement russe a su s'arrêter à temps et ne pas courir en vain après un train qui était déjà parti depuis bien longtemps.
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