Medvedev président: le parcours d'un professionnel dans l'ombre de Vladimir Poutine (SYNTHÈSE)

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Le nouveau président russe Dmitri Medvedev, investi mercredi dans ses nouvelles fonctions, fait partie du proche entourage de son prédécesseur Vladimir Poutine - même s'il n'est pas issu des services secrets - et a une réputation d'homme de principe.
MOSCOU, 7 mai - RIA Novosti. Le nouveau président russe Dmitri Medvedev, investi mercredi dans ses nouvelles fonctions, fait partie du proche entourage de son prédécesseur Vladimir Poutine - même s'il n'est pas issu des services secrets - et a une réputation d'homme de principe.

Pour le premier ministre hongrois Ferenc Gyurcsany qui a dû négocier avec lui les paramètres du gazoduc South Stream, en février dernier, le nouveau maître du Kremlin est un partenaire ferme mais constructif.

M. Poutine a lui-même averti ses collègues occidentaux que le dialogue avec son successeur ne serait pas "plus simple qu'avec lui".

"Je suis habitué aux clichés selon lesquels il est difficile de communiquer avec un ancien agent du KGB. M. Medvedev en sera exempt pour démontrer ses vues libérales, mais il n'est pas moins nationaliste que moi-même, dans le sens positif du terme. Je ne crois pas que le partenariat soit plus simple avec lui", a-t-il affirmé lors d'une conférence de presse à Moscou, le 8 mars dernier, après un entretien avec la chancelière allemande Angela Merkel.

"C'est un véritable patriote qui défendra de la manière la plus active les intérêts de la Russie sur l'échiquier international", a-t-il souligné.

C'est en décembre 2007 que Dmitri Medvedev s'est vu proposer de participer à l'élection présidentielle. Sa candidature a été avancée par le parti Russie unie, qui a recueilli plus de 64% des voix aux élections législatives de décembre dernier, auquel se sont ajoutés Russie juste, les agrariens et Force citoyenne, avant de recevoir l'approbation de Vladimir Poutine.

L'ESPRIT D'ÉQUIPE

Dmitri Medvedev a passé la plus grande partie de son parcours professionnel dans l'ombre de Vladimir Poutine, d'abord à la mairie de Saint-Pétersbourg, puis dans le gouvernement et au sein de l'administration présidentielle. Selon M. Poutine, son successeur faisait partie des gens possédant l'"esprit d'équipe".

Dans un premier temps, rares étaient ceux qui croyaient que ce juriste, à la voix douce et aux manières souples, pouvait réussir un parcours aussi vertigineux;

Dans son livre "A la première personne" rédigé pendant la campagne électorale de 2000, Vladimir Poutine avouait qu'il avait nommé M. Medvedev au poste de chef adjoint de son administration "dans une perspective de promotion". "J'ai l'impression qu'il aime bien travailler dans notre équipe. Quant à son futur poste concret, on verra", écrivait-il.

PREMIÈRE RENCONTRE AVEC POUTINE

M. Medvedev a ainsi décrit ainsi sa première rencontre avec Vladimir Poutine.

"Je travaillais comme conseiller du président du Lensoviet (conseil municipal de Leningrad, aujourd'hui Saint-Pétersbourg), et j'enseignais. C'était en 1990. Un jour je reçois un coup de fil. Un homme se présente comme Vladimir Poutine et me propose un rendez-vous pour discuter d'une possibilité de collaboration", racontait M. Medvedev à l'époque où il était premier vice-premier ministre.

"Nous nous sommes rencontrés, et nous avons parlé d'Anatoli Sobtchak, le président du Lensoviet, qui réfléchissait à la meilleure façon de créer son propre appareil. Nous avons travaillé pendant environ un an. A l'époque, j'avais 24 ans, et je n'étais pas aussi compétent que lui", se souvenait M. Medvedev.

La collaboration avec Vladimir Poutine commençait à une époque très dure. "C'était encore l'URSS, la ville était confrontée à une pénurie de produits alimentaires et de carburant, et il y avait aussi des problèmes politiques", expliquait-il.

HOMME POLITIQUE ET FONCTIONNAIRE

Les chemins de Medvedev et de Poutine se sont croisés une nouvelle fois à Moscou, au sein du gouvernement fédéral. Après sa nomination à la tête du gouvernement, M. Poutine lui a proposé un poste de chef adjoint de l'appareil du gouvernement. Ensuite, M. Medvedev a pris la tête de l'état-major électoral de Vladimir Poutine.

En été 2000, lors d'une assemblée générale de Gazprom, Dmitri Medvedev a été élu à la présidence du conseil d'administration du géant gazier russe, à la place du fondateur de la compagnie Viktor Tchernomyrdine. Le nom de Dmitri Medvedev est associé aux succès en matière de libéralisation du marché des actions de Gazprom et à l'essor de sa capitalisation boursière.

Après trois ans passés au poste de premier adjoint d'Alexandre Volochine, le chef de l'administration du président, M. Medvedev a pris la tête de l'administration à la fin de 2003. Il est entré dans la grande politique en novembre 2005 quand il a quitté le Kremlin pour le gouvernement où il a été désigné premier vice-premier ministre chargé des "projets nationaux" (agriculture, enseignement, santé et logement).

Investi de ces nouvelles fonctions, on le voyait souvent visitant des vacheries, s'intéressant à la santé des jeunes animaux, préparant une omelette sur un réchaud de campagne connecté au réseau fédéral de distribution du gaz, connectant les écoles à Internet et remettant des ambulances aux hôpitaux.

PRIORITÉ: LE SOCIAL

En justifiant leur choix, les leaders des quatre partis n'évoquaient pas seulement le professionnalisme de Dmitri Medvedev, sa compétence de juriste, ses vues démocratiques et sa compréhension mutuelle avec Vladimir Poutine. "C'est le candidat le plus tourné sur le social à s'être distingué dans la mise en oeuvre des "projets nationaux" et le règlement de la crise démographique", affirmaient-ils.

"Le résultat est là, et c'est l'essentiel. Nous pensons que le prochain mandat de quatre ans pourrait avoir pour mot d'ordre l'amélioration de la qualité de vue, car nous n'avons fait que les premiers pas dans ce sens", a déclaré alors le dirigeant de Russie unie, Boris Gryzlov.

M. Medvedev justifiait alors le choix de sa candidature par la nécessité de garantir la "continuité" du pouvoir en place. Il s'est engagé alors à réduire la pauvreté, à moderniser la santé et l'enseignement, à améliorer le niveau de vie dans le milieu rural, à relever les revenus de la population, à garantir une vieillesse décente aux retraités et à favoriser les jeunes.

"Ces missions seront actuelles pendant encore des décennies. C'est pour cela qu'il faut poursuivre la politique qui s'est formée à la fin des années 1990", a-t-il souligné dans sa première allocution télévisée après la présentation de sa candidature.

LA PREMIÈRE INITIATIVE

Quand Vladimir Poutine a accepté la proposition de devenir premier ministre de Dmitri Medvedev, nul ne s'est étonné. En juillet dernier, lors d'une rencontre avec la presse étrangère, le premier vice-premier ministre indiquait que la Russie devait apprendre à l'Europe et aux Etats-Unis la façon dont elle pourrait employer les grands hommes politiques. En Europe, selon lui, des personnalités de premier plan reviennent souvent sur la scène politique dans une nouvelle qualité, sans trouver en cela quoi que ce soit d'humiliant ou de gênant.

Ces derniers mois, des journalistes ont souvent interrogé MM. Poutine et Medvedev pour savoir comment fonctionnera leur tandem, mais les deux hommes ont toujours esquivé la réponse directe.

"Il y a assez de compétences, nous allons les répartir avec Dmitri Anatolievitch. Je vous assure qu'il n'y aura pas de problèmes", a déclaré M. Poutine.

En qualifiant M. Medvedev d'homme politique "mûr", le chef de l'Etat a assuré que leurs relations seraient harmonieuses et qu'il n'y aurait pas deux maîtres au Kremlin, une perspective selon lui nuisible.

Lors de sa dernière réunion avec le cabinet, M. Poutine a promis de renforcer la collaboration entre l'administration du président et l'appareil du gouvernement. Selon lui, le pouvoir doit fonctionner comme un mécanisme unique et réglé.

JOUR DE L'ÉLECTION

Pour Dmitri Medvedev, le jour de l'élection présidentielle du 2 mars était l'un des plus compliqués et émouvants de sa vie.

"Je suis un être humain comme les autres. Bien sûr, j'ai eu le trac. Je ne dirais pas que je n'ai pas dormi de la nuit, mais c'était très émouvant", a-t-il relevé, interrogé par la presse dans la nuit du 2 au 3 mars dans son état-major électoral.

"J'ai commencé ma journée par me rendre aux urnes, ensuite je suis allé dans le domaine de Kolomenskoïé qui regroupe de très beaux monuments d'architecture, et j'ai pris mon déjeuner en compagnie d'amis, c'était très émouvant. Et puis, j'ai rejoint ma famille, j'ai passé le reste de la journée auprès de ma mère", a-t-il raconté.

"Je vous avouerai que cette journée a été l'une des plus compliquées et émouvantes de ma vie", a-t-il déclaré à la presse.

LES PREMIERS PAS

Dmitri Medvedev n'a pas perdu son temps pendant les deux mois qui se sont écoulés entre l'élection présidentielle et la cérémonie d'investiture. Il a remplacé à deux reprises le président sortant lors des réunions du bureau du Conseil d'Etat, s'est mis à rencontrer régulièrement des gouverneurs et à organiser des conférences régulières sur le développement économique et social du pays.

Avant son élection, fin février, M. Medvedev a participé au sommet informel de la CEI, à Moscou, où il a présenté un rapport. Après le scrutin, il a rencontré tous les leaders étrangers qui se rendaient en Russie. Au cours de cette période, il a eu dix rencontres avec des chefs d'Etat et de gouvernement étrangers, dont la chancelière allemande Angela Merkel et le président américain George W. Bush, mais aussi avec le secrétaire général de l'ONU Ban Ki-moon.

UN MOSCOVITE ISSU DE SAINT-PÉTERSBOURG

M. Medvedev a passé le plus clair de sa vie à Saint-Pétersbourg, mais il se sent Moscovite.

"Je peux vous dire franchement que, malgré mes origines léningradoises et mon patriotisme pétersbourgeois, j'aime Moscou. On y vit avec intérêt et confort", a-t-il confié dans une interview publiée par le quotidien Moskovski Komsomolets.

"J'aime le caractère de Moscou, sa largesse, sa capacité d'accueillir un nombre énorme de gens, son énergie, ce qu'on désigne par le mot anglais "drive". Impossible de ne pas ressentir ce "drive". Il serait très superficiel de croire qu'il existe d'autres villes, plus "intelligentes" ou plus "européenne" que Moscou. Moscou est le centre de l'univers russe", a-t-il déclaré.

M. Medvedev a avoué qu'il tâchait de faire du sport deux fois par jour, en pratiquant la natation et en fréquentant une salle de musculation.

Le nouveau locataire du Kremlin est aussi un passionné de musique. Il possède une collection de disques microsillons des années 1970-1980 et de CD modernes. Parmi ses groupes préférés, il cite le "Deep Purple". En février dernier, ce groupe s'est produit lors d'un concert organisé au Kremlin à l'occasion du 15e anniversaire de Gazprom, et M. Medvedev a eu une occasion de poser avec ses idoles.

M. Medvedev est marié à une ancienne élève de sa classe à l'école secondaire, Svetlana, et a un fils de onze ans, Ilia.

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