Nucléaire civil: le chantier de Belene est lancé

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Par Tatiana Sinitsyna, RIA Novosti
Par Tatiana Sinitsyna, RIA Novosti

La construction de la centrale nucléaire de Belene d'après le projet russe a enfin commencé du côté bulgare du Danube. Le coup d'envoi a été donné par la Compagnie nationale d'électricité de Bulgarie (NEK EAD) qui a officiellement autorisé le russe Atomstroïexport à débuter les travaux. On peut désormais entamer l'acheminement des équipements et entrer dans le vif du sujet. Un appel d'offres auprès des entreprises bulgares de construction a déjà été annoncé, et l'infrastructure nécessaire est en cours d'installation.

Néanmoins, la durée de la période préliminaire au lancement du chantier a été une surprise. Il est donc tout à fait logique de se demander si les délais de construction seront respectés: le premier réacteur doit être mis en service d'ici cinq ans. Les spécialistes d'Atomstroïexport sont pour l'instant confiants, et espèrent qu'il n'y aura pas de nouveaux ajournements ni autres circonstances imprévues.

Les choses ont traîné en longueur pour plusieurs raisons, la principale étant la complexité du processus de concertation conceptuelle et technique du projet. Atomstroïexport a remporté l'appel d'offres pour la construction de la centrale nucléaire de Belene en automne 2006. Ensuite, l'approbation du projet par l'Union européenne a pris une année (bien que les normes européennes soient très proches de celles de l'AIEA, il existe néanmoins des nuances). En fin de compte, après une analyse rigoureuse, les experts ont bien été forcés de reconnaître que le projet russe était conforme à toutes les exigences avancées par l'UE en matière de centrales nucléaires.

Le feu vert de l'Union européenne signifiait alors que les documents juridiques nécessaires avaient été obtenus et qu'Atomstroïexport pouvait enfin se concentrer pleinement sur le chantier. Il ne restait qu'à faire le dernier pas: la signature officielle du contrat entre Atomstroïexport et NEK EAD. La procédure a eu lieu le 18 janvier 2008 dans le cadre de la visite du président Vladimir Poutine à Sofia.

Après cela, on pouvait croire que les travaux pourraient démarrer, mais il s'est avéré qu'il fallait obtenir l'autorisation d'une instance intérieure bulgare: le ministère du Développement régional et de l'Aménagement. Celui-ci a donc à son tour étudié attentivement le projet conceptuel de la centrale nucléaire avant de donner son accord.

Le temps passait. Et le temps, c'est de l'argent. Cependant, le maître d'oeuvre n'a pas perdu patience: le projet nucléaire bulgare est bien trop important pour la Russie. En remportant ce prestigieux appel d'offres, le pays a surmonté un intermède européen qui durait depuis l'époque soviétique, et a ainsi fait son retour sur le marché occidental de construction de centrales nucléaires. Belene est le premier chantier de construction russe sur le territoire de l'Union européenne. Il revêt une importance non seulement économique, mais aussi politique: les positions de la Russie se renforcent dans les Balkans, et donc en Europe.

La compagnie Atomstroïexport a lutté contre de puissantes corporations occidentales pour obtenir ce contrat, entre autres, le tchèque Skoda, le japonais Toshiba et le consortium anglo-américain Westinghouse. La Bulgarie a fait appel aux services de plus de 200 spécialistes de 8 pays pour l'expertise technique et l'évaluation des projets, invitant des sociétés de conseil aussi réputées que Parsons et Deloitte. Mais les avantages de la technologie russe étaient si évidents que les experts ont dû s'incliner. Le modèle russe a été considéré comme le plus rentable, le plus sûr et le plus viable (délai de fonctionnement: 60 ans).

La progression des centrales nucléaires russes sur le marché mondial est logique et attendue: elles sont conformes aux plus hautes exigences en matière de qualité et de sécurité. Le projet AES-92 à la base de la construction de la centrale de Belene est une version moderne du réacteur russe à eau pressurisée (VVER). La Bulgarie connaît ce type de réacteurs, ils ont longtemps été utilisés avec succès à la centrale nucléaire de Kozlodouï, jusqu'à ce que l'Union européenne ne les prenne en grippe sans raison valable.

Mais le projet AES-92 ne suscite aucun doute de la part de qui que ce soit. Il se fonde sur 2 réacteurs VVER-1000 de nouvelle génération qui ont évolué et ont été perfectionnés grâce à des technologies modernes, bref, ils sont fiables et rentables. Le projet de Belene se distingue par une combinaison exceptionnelle de systèmes de sécurité actifs et passifs, assurant ainsi à la centrale nucléaire un niveau maximal de protection.

Les constructeurs ont prévu les "pires" scénarios d'incidents éventuels, par exemple, une panne générale de courant, la rupture de la cuve d'un réacteur ou encore l'impact d'un avion sur le bâtiment de la centrale. La particularité de celle-ci réside dans la double enveloppe protectrice du bâtiment du réacteur: une enveloppe intérieure en acier et une extérieure en béton armé renforcé. Ce système de sécurité prévoit également une trappe d'écoulement en cas de fusion du coeur du réacteur: cette idée originale est entièrement russe.

Compte tenu de la tendance à la mondialisation dans le domaine de la construction de centrales nucléaires, qui répond aux besoins énergétiques de la planète, la Russie a conclu en 2007 un contrat avec le consortium Carsib comprenant les compagnies Areva et Siemens. Ce partenaire fournira des équipements sur le chantier de construction de Belene, en particulier le système de contrôle et de commandes.

Le coût raisonnable du projet russe représente également un avantage substantiel. La construction des 2 réacteurs de 1.000 MW chacun reviendra à 3,997 milliards d'euros à la Bulgarie. Il s'agit toutefois d'une somme considérable pour ce pays, c'est pourquoi Sofia cherche des investisseurs. BNP Paribas lui a déjà accordé un crédit de 350 millions d'euros. La Russie est également prête à fournir la somme nécessaire. La Bulgarie sait très bien pour quoi elle paie: la centrale nucléaire de Belene rendra au pays son assurance énergétique.

Les opinions exprimées dans cet article sont laissées à la stricte responsabilité de l'auteur.

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