Le tribunal spécial pour le Liban divise le pays

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Le leader du mouvement chiite Hezbollah Hassan Nasrallah a rejeté les accusations du tribunal spécial pour le Liban et affirmé qu'il ne livrerait pas ses militants à la justice internationale.

Le leader du mouvement chiite Hezbollah Hassan Nasrallah a rejeté les accusations du tribunal spécial pour le Liban et affirmé qu'il ne livrerait pas ses militants à la justice internationale. Nasrallah a qualifié de provocation politique l'émission des mandats d'arrêt contre quatre membres de son mouvement suspectés d'assassinat du premier ministre libanais Rafic Hariri en 2005.

Le Liban serait sur le seuil d'une nouvelle guerre civile. Applaudie par les partisans du feu ex-premier ministre et critiquée par les chiites, la décision du tribunal spécial pour le Liban est capable d'attiser les divergences entre différentes confessions religieuses. Des précisions avec Anis An-Nakash, politologue libanais, coordinateur du Centre de recherche stratégique Al-Aman:

"Le temps choisi pour le verdict du tribunal coïncide avec l'annonce du programme du nouveau gouvernement. Je pense, donc, que la décision du tribunal est fortement politisée. C'est fait pour déstabiliser le travail des nouvelles autorités libanaises. Les forces extérieures s'appuient sur les divergences entre différentes forces politiques. Le gouvernement peut annoncer qu'il organiserait des recherches et arrêterait les suspects s'il les trouve. Mais en pratique, c'est très compliqué. Et au terme du délai de 30 jours octroyé par le tribunal au gouvernement les autorités libanaises annonceront qu'elles ne sont pas parvenues à le faire. La décision du tribunal ne sert, donc, pas à défendre la justice mais plutôt à semer le désaccord interconfessionnel dans le pays", estime Al-Aman.

Beyrouth adopte, pour l'instant, une position réservée: selon le premier ministre Najib Mikati, il faut tout mesurer soigneusement afin que le verdict du tribunal ne soit une "nouvelle épreuve de la paix civile au Liban".

"Nous allons considérer cette information avec toute la rigueur et le sens de réalisme, sachant que les jugements ne sont pas accusations. Alors que les accusations doivent s'appuyer sur les faits et les preuves de façon qu'il n'y reste plus de doute", a souligné M. Mikati.

Le tribunal spécial pour le Liban enquête sur l'assassinat de Hariri depuis le mars 2009. L'ex-premier ministre et 20 personnes de son entourage ont péri en février 2005 lors de l'explosion sur le quai de Beyrouth. Les enquêteurs suspectent plusieurs membres du Hezbollah alors que Nasrallah y voit les intrigues d'Israël.

Jeudi dernier le tribunal a transmis quatre mandats d'arrêts au parquet du Liban. Deux mandats concernent les figures de proue du mouvement Hezbollah. Le tribunal, conscient de la faible probabilité de voir les personnages suspectés sur le banc des accusés, a annoncé qu'il était prêt d'organiser les procès in absentia. Il s'agit d'une pratique ordinaire de la Cour pénale internationale qui, à l'heure actuelle, s'est déjà complètement discréditée. Des précisions avec Ajdar Kourtov, expert à l'Institut de recherche stratégique de Russie:

"Ces dernières années nous avons vu que la Cour pénale internationale, en délivrant des mandats d'arrêt contre des politiciens de différentes régions du monde, attisait les conflits plus qu'elle ne contribuait à leur solution. Cet organe, censé d'être neutre, ne l'a pas été. On l'a vu sur l'exemple de la Yougoslavie, maintenant sur l'exemple de la Lybie. Je pense que cette situation peut se répéter au Liban. De toute façon, le verdict du tribunal sème le désaccord dans la paix fragile libanaise", estime Ajdar Kourtov.

Alors que les chiites et les sunnites attendent la suite qui sera donnée au verdict du tribunal, on se rappelle que des motifs bien moindres étaient suffisants pour provoquer des affrontements armés dans ce pays. Peu de gens doutent encore que ce scénario ne se répète maintenant dans un Liban divisé.

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