"Pour une personne noire, je devais mettre PR4": Adecco en procès pour discrimination raciale

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tribunal - Sputnik Afrique, 1920, 29.09.2023
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La société Adecco et deux anciens directeurs d’une agence parisienne sont jugés devant le tribunal correctionnel de Paris pour discrimination à l’embauche, pour des faits remontant aux débuts des années 2000.
Le critère "PR 4" ne qualifiait pas la couleur de peau mais "un mixte de l'expérience professionnelle et du savoir-être du candidat", a assuré le 28 septembre devant le tribunal correctionnel de Paris un ancien directeur d'Adecco, entreprise jugée pour discrimination à l'embauche.
"Quand vous recevez un candidat, c'est un mixte entre l'expérience professionnelle et le savoir-être", a dit à la barre Mathieu Charbon, ancien directeur de l'agence parisienne d'Adecco mise en cause, en procès après plus de vingt ans de procédure judiciaire.
Chaque candidat s'est vu attribuer un critère, "échelonné du PR 1, la perle de la perle, jusqu'à PR 4, où la personne peut avoir des difficultés en mission", a-t-il expliqué.
Parmi les "difficultés", il a évoqué une personne qui ne "présente" pas bien, qui ne sait pas lire ou écrire, ou qui ne parle pas le français.
Adecco, en tant que personne morale, Olivier Poulin et Mathieu Charbon, anciens directeurs de l'agence ayant fait l'objet de la plainte, sont accusés de discrimination et fichage "en raison de l'origine, de la nationalité ou de l'ethnie".
Les deux hommes et le représentant d'Adecco, directeur général et président par mandat, ont plaidé non coupable.
En 2001, une information judiciaire avait été ouverte à Paris après une plainte de SOS Racisme. L'association avait été alertée par un ancien salarié chargé du recrutement dans l'agence Adecco restauration Montparnasse d'un classement des candidats avec un code "PR 4" pour spécifier les personnes de couleur.
Présent à l'audience, le lanceur d'alerte est revenu sur ses six mois passés à l'agence en tant que stagiaire, où on lui apprend à "mettre une indication" pour chaque candidat.
"Lorsque la personne présentait bien je devais mettre PR 1, un peu moins je devais mettre PR 2, et pour une personne de couleur, une personne noire, je devais mettre PR 4", a-t-il détaillé.
"Je suis atterré par la situation depuis plus de vingt ans", a déclaré M. Charbon, ajoutant que le critère est l'objet d'une "vaste confusion" et qu'il a "dérivé".
"Manifestement, un amalgame au fil du temps s'est fait, sur les savoir-faire et savoir-être des candidats", a-t-il indiqué.
Supprimé depuis, le critère PR 4 est "source de confusion, on s'est retrouvés comme le lapin dans les phares", a renchéri Olivier Poulin, qui a succédé à M. Charbon à la direction de l'agence en 2000.
Il a plaidé pour une mauvaise utilisation du critère par ses collaborateurs, estimant avoir "mal expliqué" ce à quoi il correspondait.
L'agence en question, spécialisée dans l'hôtellerie, travaillait notamment avec le ministère des Affaires étrangères, Eurodisney et la Société des wagons-lits.
L'audience a été suspendue dans la soirée et reprendra le 11 janvier 2024 à 13H30.
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