« Pour étendre ses prérogatives, la technostructure de Bruxelles a besoin d’affaiblir les États »

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Le 25 mai auront lieu les élections européennes. A cette occasion, la liste Debout la république (DLR) Ile-de-France, dirigée par Dominique Jamet, comprend une candidate dont le cœur est entre Paris et Moscou : Nadejda Silanina. Celle-ci a accepté de répondre à nos questions pour expliquer son engagement politique.

La Voix de la Russie : Bonjour et merci de répondre aux questions de La Voix de la Russie, présentez-vous s’il vous plait. Qu’est-ce qui vous a poussé à rejoindre DLR ?

Nadejda Silanina : Le besoin de m’engager, d’être un acteur plutôt qu’un spectateur impuissant qui voit son pays d’adoption décliner dangereusement. Un si beau et grand pays ! Et puis bien sûr, l’existence d’un parti dont je partage l’essentiel du programme et des idées. Enfin un vrai respect pour Nicolas Dupont-Aignan, son fondateur et son président, qui a eu le grand courage de quitter le confort de l’UMP, ne voulant plus cautionner l’évolution européiste de ce parti.

LVdlR : Quel regard portez-vous sur la France de 2014 ?

Nadejda Silanina : Un regard inquiet. C’est mon pays d’adoption et mes enfants y sont nés. Je vis en France depuis 20 ans, pratiquement depuis le traité de Maastricht. Je suis sidérée par la force et la rapidité de la dégradation économique, sociale, éducative et morale. Je crains un décrochage, une sortie de l’histoire. La désindustrialisation, accélérée par l’euro, a des effets dramatiques sur le niveau de vie et l’économie. Le peuple a été abandonné par la gauche et la patrie par la droite. Les deux ont voulu faire croire à une histoire de mondialisation heureuse et ont culpabilisé et dévalorisé leur propre peuple coupable de rester attaché à ses valeurs, son identité. En 20 ans, j’’ai vu régresser la liberté d’expression. Ce que l’on a le droit de penser et d’exprimer est défini par une caste qui domine dans les médias et qui terrorise les politiques. Dès qu’un propos sort du cadre autorisé, on parle de dérapage. Ce n’est pas la ligne du parti, c’est le règne de la bien-pensance, terme que je n’arrive d’ailleurs pas à restituer en russe.

LVdlR : Vous revendiquez l’héritage gaulliste de DLR, en tant que Russe, qu’est-ce que cela signifie pour vous ?

Nadejda Silanina : Je suis née en Union soviétique, j’y ai fait mes études et mes débuts professionnels. J’ai eu une éducation soviétique. Mon père parlait français et était journaliste à TASS. Il avait un très grand respect pour les gaullistes et les communistes. Vous savez qu’en URSS, la France avait un statut à part parmi les pays capitalistes, comme on disait à l’époque. De Gaulle incarnait la grandeur du pays, son indépendance par rapport au États-Unis. Rejoindre aujourd’hui le seul parti qui se réclame du gaullisme, c’est donc pour moi le moyen de faire de la politique en étant cohérente avec moi-même.

LVdlR : Pourquoi les Français et électeurs d’Ile-de-France devraient, selon vous, soutenir DLR et donc voter pour cette liste aux élections européennes ?

Nadejda Silanina : Je précise que les Français votant à l’étranger seront rattachés à la circonscription Ile-de-France et je compte beaucoup sur ceux qui vivent en Russie pour voter pour nous. Les habitants d’Ile-de-France, la région parisienne, ont intérêt à soutenir notre liste « debout la France » car nous sommes la seule alternative hors système et hors extrême pour sortir de cet engrenage européiste qui met en cause l’existence même du pays. Plus qu’ailleurs, les habitants d’Ile-de-France souffre de cette Europe passoire qui conduit à une immigration incontrôlée et des records en termes d’insécurité.

LVdlR : Vous insistez énormément sur le problème que représente aujourd’hui Bruxelles. Le géopoliticien Aymeric Chauprade parle lui du « Mur de Bruxelles », nouveau mur de Berlin destiné à séparer la Russie de l’Europe, êtes-vous d’accord sur ce point ?

Nadejda Silanina : Je partage cette analyse. Bruxelles et ses soutiens dans chaque pays prennent une responsabilité historique gravissime en organisant cette division au sein d’une même civilisation, la civilisation européenne. Je comprends leur logique ; pour étendre ses prérogatives, la technostructure de Bruxelles a besoin d’affaiblir les États nationaux et donc d’abaisser toutes les valeurs qui font concurrence à son projet supranational. En face, il ne reste que la Russie qui depuis Poutine est revenue au fondamentaux qui fondent les nations. Comme on ne peut pas abattre la Russie, il faut alors s’en séparer et donc diviser l’Europe et sa civilisation. C’est irresponsable et même criminel alors que jamais les menaces n’ont été aussi fortes, touchant même les fondements de notre civilisation européenne.

LVdlR : Vous êtes née russe, désormais également française mais vous vous considérez comme une candidate issue de la diversité, pourriez-vous nous expliquer pourquoi ?

Nadejda Silanina : En fait, je n'aime pas cette expression de candidate ou de représentante de la diversité. Derrière cela, il y a toute une idéologie de promotion du communautarisme à travers les quotas ethniques. C’est très dangereux et pourquoi un Français de souche devrait-il laisser sa place sous prétexte de favoriser quelqu’un installé plus récemment ? Je me définis comme une Française d’origine russe. Je suis intégrée. Mes filles sont assimilées. Je pense qu’il faut transmettre sa culture d’origine mais que celle-ci peut être un plus et non une alternative à la culture française.

LVdlR : Aujourd’hui même des critiques du président russe comme par exemple Vladimir Fédorovski constatent que les journalistes français ne sont pas objectifs sur la Russie. Quel regard portez-vous sur l’image de la Russie en France et tel que les médias la décrivent ?

Nadejda Silanina : Puisque vous parlez de Vladimir Fédorovski, permettez-moi de dire que je suis un peu fatiguée de son omniprésence médiatique dès qu’il s’agit de la Russie. Personne ne le connait en Russie mais ici c’est le « Russe officiel » à l’accent caricatural bien entretenu. Qu’il s’agisse des jeux olympiques ou d’un défilé sur la place rouge, peu de chance d’échapper à ses commentaires et ses poncifs. Quant aux reste des journalistes français, il faut avoir conscience qu’ils sont issus pratiquement tous des mêmes milieux sociaux, des mêmes écoles de journalisme où l’on vote pour le même candidat à 80 % au deuxième tour des présidentielles. Leur modèle, c’est Libération ou Le Monde.

Vous avez vu la Une du Monde après l’Eurovision ? En gros titre « Poutine, ou l’art de la guerre », en référence au référendum de Donetsk et en dessous « La victoire de la tolérance » après le premier prix de l’Eurovision à une femme à barbe. Le dessin de la Une allait dans le même sens.

Donc la Russie, c’est la guerre et l’intolérance. C’est comme cela que l’on fabrique ici l’image de l’ennemi. La Russie et Poutine incarnent tout ce qu’ils ont appris à rejeter : patriotisme, défense de l’intérêt national, valeurs attachées à notre civilisation... Dans ce sens, la couverture des massacres d’Odessa a été une honte : omission puis mensonge et mauvaise foi. Le triomphe des doubles standards.

LVdlR : Vous parlez de patriotisme et de souveraineté, des termes qui n’appartiennent pas au champ lexical et moral politique français. En Russie par contre, ces concepts sont des concepts que l’on peut qualifier de « centraux » de la politique russe. Comment expliquez-vous cette différence ?

Nadejda Silanina : Plus précisément, ces concepts sont centraux en Russie depuis relativement peu de temps. Sous Eltsine, le patriotisme et la souveraineté étaient loin d’être des thèmes majeurs. Au contraire, on a tout fait pour culpabiliser et dévaloriser le peuple russe.

Le patriotisme et la souveraineté comme thèmes centraux ne se sont imposés que progressivement après l’arrivée au pouvoir de Poutine. Sans lui et ces thèmes, je crois que la Russie aurait elle-même fini par disparaitre en tant qu’État-nation.

En Europe et en France particulièrement, ces thèmes sont combattus frontalement ou insidieusement depuis une trentaine d’années, à mesure qu’il fallait affaiblir les nations pour construire l’Europe. Même le mot France gêne certains, beaucoup de politiciens d’ailleurs préfèrent parler de ce pays ou ce territoire. Sans parler de cette ministre de la justice qui se refuse à chanter la Marseillaise et compare cela à du karaoké ! En fait, l’objectif est d’assimiler le patriotisme au nationalisme et la souveraineté à quelque chose de dépassé, de ringard au niveau d’un État. Regardez les billets en euros, c’est la première fois dans l’histoire que des billets de banque ne représentent aucun monument, personnage ou fait historique identifiable. Le patriotisme et la souveraineté, c’est bien l’adversaire numéro un de Bruxelles.

LVdlR : Avez-vous quelque chose à ajouter ?

Nadejda Silanina : Oui, au cours de cette campagne électorale, je me suis particulièrement adressée aux Français d’origine russe ou de culture russe. J’ai été touchée par l’accueil qui m’a été réservé, toutes générations confondues, des gens issus de l’immigration des années 20 comme ceux venus plutôt pour des raisons économiques dans les années 90. Tous partagent un attachement profond à la France. Nous pouvons être fiers de notre communauté russe en France. N

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