Les chiens d’Abidjan frappés par une épidémie mortelle

© Photo Pixabay / Viktar MasalovichUn chien (image d'illustration)
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Plus d’une centaine de chiens ont succombé ces dernières semaines à Abidjan à la maladie de Carré, un mal très contagieux dont les manifestations évoquent la rougeole chez l’homme. Des responsables d’associations pour le bien-être des animaux ont exprimé leurs inquiétudes à Sputnik.

L’épidémie de Carré en cours dans la capitale économique ivoirienne aurait déjà emporté plus de 150 chiens, selon les estimations du Comité des amis canins de Côte d’Ivoire (CAC-CI).

«Ces derniers temps, on a été alerté à de nombreuses reprises par des propriétaires désemparés. Leurs animaux sont morts de façon inattendue après avoir manifesté des symptômes divers. On note, en fait, une résurgence de la maladie de Carré à Abidjan qui a été confirmée par plusieurs examens vétérinaires», a confié à Sputnik Souleymane Touré.

Et il se trouve que certaines circonstances, comme la saison des pluies qui bat son plein à Abidjan, sont favorables à la propagation de cette hécatombe.

Une maladie redoutée, à l’issue mortelle

La maladie de Carré est causée par un virus qui s’apparente à celui de la rougeole chez l’homme. Il est peu résistant dans la nature (en dehors de son hôte), ainsi qu’aux désinfectants et à la chaleur. Autant dire que le climat tropical de la Côte d’Ivoire ne lui est pas vraiment favorable. Mais la saison des pluies, en cours depuis le mois de mai, et la baisse des températures qu’elle entraîne lui sont profitables.

La contamination se fait d’animal à animal par des sécrétions corporelles (salive, urine, selles, écoulement des yeux et du nez...). Mais dans certains cas, il arrive que le virus –qui n’est pas transmissible à l’homme– soit transporté via les vêtements de ce dernier pour infecter tout chien non vacciné.

Les symptômes de la maladie de Carré sont multiples et dépendent de facteurs comme la virulence de la souche, l’âge de l’animal et son immunité. Le chien peut manifester le plus souvent de la fièvre et des réactions cutanées comme des pustules prurigineuses, mais aussi d’autres signes cliniques comme des infections respiratoires (toux, écoulement nasal, dyspnée) ou digestives, ainsi que des troubles neurologiques (tremblements, paralysie).

Tous ces symptômes peuvent être très graves, en particulier chez les chiots où le taux de guérison est presque nul. Et pour les chiens qui s’en sortent, il subsiste souvent des séquelles.

Le vaccin demeure capital

Les traitements une fois le mal survenu s’avérant bien souvent vains, le moyen le plus efficace pour lutter contre la maladie de Carré demeure la prévention par la vaccination. 

Le protocole vaccinal préconisé débute dès les premières semaines de vie du chiot et se poursuit plus tard par des rappels annuels.

Cependant, à Abidjan, certains propriétaires, plutôt que de se rendre chez le vétérinaire, confient la tâche de l’administration du vaccin de leur chien à des professionnels (des dresseurs notamment) qui ne sont pourtant pas habilités à le faire.

«Certains propriétaires sont malheureusement peu impliqués dans le suivi de leur chien. Ils préfèrent confier cette tâche au dresseur qui, chez certaines familles, est celui qui s’occupe de tout concernant l’animal, depuis son alimentation à ses soins médicaux. Certains de ces maîtres-chiens profitent alors de cette situation pour s’adonner à des malversations», a déclaré Souleymane Touré.

Audrey Monteuil, fondatrice du Comité de protection des animaux de Côte d'Ivoire (CPA-CI) - Sputnik Afrique
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Et dans bien des cas, contrairement à ce qui est annoncé au propriétaire, ce n’est pas le vaccin contre la maladie de Carré qui est administré à l’animal, mais seulement celui contre la rage.

Par ailleurs, à Abidjan, certains laboratoires vendent des vaccins sans ordonnance vétérinaire.

«Cela implique que n’importe qui peut acheter auprès d’eux des doses de vaccin pour ensuite les inoculer au chien qu’il veut», a expliqué à Sputnik Audrey Monteil, présidente du Comité de protection des animaux de Côte d'Ivoire (CPA-CI).

Un autre problème est qu’il arrive, quand il s’agit effectivement du vaccin contre la maladie de Carré, que la chaîne du froid soit brisée en chemin car les conditions de transport des doses n’ont pas été optimales pour leur conservation. L’innocuité et l’efficacité du vaccin se retrouvent dès lors nulles.

Un «manque de vigilance» des autorités sanitaires

Au-delà de la saison des pluies et du caractère hautement contagieux de la maladie du Carré, Audrey Monteil évoque un «problème de vigilance à l’entrée des chiens en Côte d’Ivoire».

En effet, selon des acteurs du monde canin, de nombreux chiens de race (ou vendus comme tels) importés ces dernières années en Côte d’Ivoire (où l’engouement pour ces animaux va croissant), «en particulier depuis des pays d’Europe de l’Est», ne sont pas vaccinés.

«Il y a des pays où certains établissent de faux carnets de telle sorte que le chien passe pour plus âgé qu’il ne l’est en réalité, pour pouvoir affirmer qu’il est vacciné afin de l’exporter. Il est dès lors indispensable de toujours reprendre la vaccination d’un chien entré en Côte d’Ivoire», déclare Souleymane Touré.

Jusqu’au 7 juillet, les autorités ivoiriennes n’avaient pas réagi à l’épidémie ni communiqué sur les mesure à prendre pour contenir son expansion.

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