De quelle couleur est la révolution que les USA ont préparée pour la Russie?

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Павел Родькин - Sputnik Afrique
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Pavel Rodkine, membre du Club Zinoviev, pense que le nouvel ambassadeur des USA en Russie, John Tefft, va dissimuler un coup d’État contre les autorités russes derrière un voile de protestations sociales.
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La nomination de John Tefft au poste d'ambassadeur des USA à Moscou pourrait viser à déstabiliser la situation en Russie et dans l'espace eurasiatique en général. Contrairement à son prédécesseur Michael McFaul, Tefft est considéré comme un technicien et supervise les révolutions de couleur dans l'espace postsoviétique. Va-t-on assister à une nouvelle tentative de révolution de couleur en Russie, et sous quelle forme? Il est impossible de répondre à cette question sans analyser l'évolution de la technologie des révolutions de couleur, qui ont cessé d'être non-violentes, et des outils médiatiques des guerres humaines et d'informations qui éclatent aujourd'hui.

Le contexte global: les révolutions de couleur ont cessé d'être des protestations pacifiques

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Les révolutions de couleur ont surgi comme phénomène politique et sociétal lors de la révolution orange à Kiev en 2004, qui a formé pour la société russe l'image d'une révolution de couleur et a longtemps conditionné l'attitude envers ce phénomène.

Bien que d'autres révolutions de ce type se soient produites avant (révolution des roses en Géorgie en 2003) et après la révolution orange (deux révolutions au Kirghizstan: révolution des tulipes — ou des citrons — en 2005 et une seconde révolution des tulipes en 2010), c'est bien Kiev qui a été le point de départ pour la Russie de l'application de nouvelles technologies politiques, sociales et humanitaires. C'est à ce moment-là que s'est formée la notion d'universalité et de toute-puissance des révolutions de couleur.

Le caractère non-violent et de "velours" ne correspond plus depuis longtemps aux premières révolutions de couleur. Les appellations symboliques des protestations par des noms de fleurs ou de couleurs sont devenues une formalité. Très souvent, elles ne se ressemblent pas.

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Les révolutions de 2010-2011 en Tunisie et en Égypte portent à la fois plusieurs noms: jasmin, dattes, melons, twitter, jeune, moutarde, balnéaire, pyramide, etc. Les médias s'emmêlent les pinceaux, ce qui témoigne du cynisme de ceux qui collent ces étiquettes.

En s'intéressant à l'histoire des révolutions de couleur, leur nature radicale (par exemple, les tentatives de révolutions de couleur en Biélorussie en 2006 ou en Moldavie en 2009) devient flagrante. Et ce n'est même pas l'Ukraine avec l'Euromaïdan de 2013-2014, mais la Thaïlande, qui a tiré un trait sur le mythe des révolutions civiles pacifiques.

Les manifestations dans ce pays ont évolué selon le scénario classique des révolutions de couleur: le tableau des protestations à Bangkok en 2009 reproduisait et rappelait la révolution orange à Kiev en 2004. Cependant, à partir de 2013, des affrontements de rue ont commencé à Bangkok et l'escalade du conflit civil a été arrêtée uniquement pas un coup d'État des militaires.

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Les événements de l'Euromaïdan en 2014 n'étaient pas un écart au scénario pacifique, mais une réalisation technique du plan de coup d'État. La révolution de couleur disparaît peu à peu comme technologie non-violente de renversement du gouvernement, mais son image positive fonctionne encore.

L'emballage symbolique et informationnel reste également un élément important de l'accompagnement médiatique et permet de donner à un banal coup d'État l'apparence d'une protestation sociale noble. D'autant qu'en l'absence de compréhension du contenu réel, c'est par la forme extérieure que se laisse séduire la société russe active: la classe créative, l'intelligentsia, les entrepreneurs et les élites.

Le stade préparatoire: la guerre médiatique

Les révolutions de couleur sont précédées d'une sérieuse préparation, qui vise à former une image négative du pouvoir en place auprès du public. En ce qui concerne la Russie, le stade préparatoire a déjà commencé et il concerne le contexte global et les processus où la Russie s'avance comme un centre de force alternatif.

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Le crash du Boeing malaisien en Ukraine peut servir d'exemple du stade ouvert de la guerre médiatique. Les médias occidentaux ont sans appel accusé la Russie et Vladimir Poutine personnellement, bien avant les résultats de l'enquête officielle. On a créé et lancé l'image sombre du président russe comme assassin et ennemi.

Les technologies médiatiques d'aujourd'hui ont pour but de diaboliser l'adversaire et le déshumaniser. Après tout, la guerre contre le "mal" justifie la guerre en soi et ses victimes.

Un autre objectif de la guerre médiatique consiste à éradiquer et bloquer la perception critique de l'information par le grand public. Les médias suppriment l'esprit critique et fragmentent la conscience. C'est la base des falsifications dites "de réseau", qui remplacent les informations.

C'est ainsi qu'étaient présentés les reportages occidentaux sur la guerre d'août 2008, quand la vidéo de lance-roquettes multiples Grad géorgiens tirant sur Tskhinval avait été présentée comme une attaque russe contre la Géorgie. Pendant la guerre en Libye, les médias ont même construit des décorations spéciales au Qatar. Et les informations ukrainiennes sont presque intégralement basées sur des falsifications.

En dépit du caractère primitif de ces méthodes, la conscience des masses y croit: une photo ou une vidéo accompagnée d'un descriptif approprié fait l'effet d'une preuve documentaire pour la société contemporaine. Mais le plus terrible, c'est que l'image médiatique peut servir de réel prétexte pour une invasion et une guerre.

Les technologies de couleur, dans leur aspect communicationnel, seront efficaces tant que les sociétés des pays-cibles interpréteront la réalité politique, sociale et économique à travers des "mèmes" unidimensionnels qu'on leur impose par un système complexe de design social moderne. La possibilité de trouble dans la conscience publique est créée grâce au faible niveau de réflexion critique, ainsi qu'à l'injustice et à l'inégalité sociales utilisées comme un terreau pour les protestations.

Du carnaval au pogrom: à quoi s'attendre après 2014

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La déstabilisation de la situation en Russie est globale, l'attaque visera l'axe de l'Union économique eurasiatique (Biélorussie et Kazakhstan), et voudra déstabiliser la situation dans les pays du Brics. Les médias et les élites compradores feront partie des moyens de promotion, c'est pourquoi la compréhension des technologies décrites est primordiale pour analyser les événements à venir.

Les technologies de destruction qui seront mises en œuvres après 2014 peuvent être réparties en deux types ou plutôt "étapes", qui ne se succèdent pas forcément et sont parfaitement complémentaires.

1) Les USA préfèrent agir de manière stéréotypée, tant qu'un scénario fructueux ne sera pas complètement épuisé. Rappelons que Tefft était l'ambassadeur en Géorgie en 2005-2009, puis en Ukraine entre 2009 et 2013. Par conséquent, une nouvelle tentative sera certainement entreprise de réanimer la révolution des "rubans blancs" et le scénario de Bolotnaïa de 2011-2012. Avec une nouvelle force reprendra la protestation de "carnaval", on insufflera une nouvelle vie aux projets de séparatisme "créatif" ou autres performances de protestation et actions artistiques.

2) Comme le montre la pratique des révolutions de couleur présentée ci-dessus, la nature carnavalesque et le symbolisme de la protestation n'ont plus d'importance. Les affrontements avec la police à Moscou en 2012 n'étaient qu'un épisode des manifestations, désormais elles seront le but, et les formes d'identité négative les plus sauvages passeront au premier plan au lieu des symboles et du design "créatif".

Les superviseurs et les planificateurs des coups d'État misent aujourd'hui essentiellement sur les nationalistes, les radicaux, les extrémistes et les terroristes. La protestation contre la politique libérale et sociale de l'élite pourrait également être réorientée contre l'État.

Bien que l'exemple de l'Ukraine ait montré avec un très grand réalisme ce qui se produit quand un État s'effondre (tout comme récemment la Yougoslavie et la Libye), le principal problème est que les facteurs extérieurs "assurent" la stabilité sociale et politique. Le "facteur de compréhension" intérieur, comme le qualifie Alexandre Zinoviev, celui qui assure la véritable stabilité de la société face aux défis extérieurs et aux technologies de manipulation, demeure dans un état embryonnaire et hors système.

 

Pavel Rodkine, expert en image de marque et en communication visuelle, candidat en critique d'art, membre du Club Zinoviev de Rossiya Segodnya

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