La culture française est-elle intéressante en Italie aujourd’hui ?

La culture française est-elle intéressante en Italie aujourd’hui ?
La culture française est-elle intéressante en Italie aujourd’hui ? - Sputnik Afrique
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Il n’y a pas un domaine où les cousins Français et Italiens ne soient rivaux. C’est bien Rome ou Paris le centre du monde ?Sauf l’extrême concurrence, il est clair à tout le monde, que d’autre part, il n’y a pas deux cultures si proches comme la française et l’italienne…Nous nous sommes entretenus avec Francesco Spandri, chercheur de littérature française à l’Université « Roma Tre », pour comprendre cet entre-deux si délicat.

 

LVdlR: Quel est-il l’intérêt pour la langue et la culture françaises en Italie aujourd’hui ?

Spandri : Il faut tout d’abord remarquer qu’il y a de moins en moins d’établissements scolaires en Italie où le français est enseigné. A côté de cet aspect politique-culturel, je dirais, il y a un aspect plus général. Le français n’a plus la position dominante qu’il avait il y a quelques décennies.

Il s’agit d’une langue fondatrice de l’espace européen, mais désormais une langue très concurrencée par l’anglais et l’allemand. Le français est une langue marginalisée dans l’espace européen.

Le reflet de cette situation en Italie est ce qu’il y а peu d’établissements scolaires qui enseignent le français.

Mais, malgré cette situation de difficulté, j’ai constaté pendant mes enseignements, que le français est une langue pour laquelle il y a toujours un intérêt très vif. Il y a la perception chez les étudiants qu’il s’agit d’une langue précieuse, qui introduit une culture importante. C’est un choix culturel très fort. Il ne faut pas oublier que le français est la première langue néolatine.

LVdlR : Pendant vos cours avez-vous eu l’occasion de percevoir parmi les étudiants italiens des stéréotypes envers les Français ? Quels sont-ils les lieux-communs sur les Français les plus répandus ?

Spandri : Effectivement j’ai rencontré des opinions figées toutes faites. Il y en a surtout sur la culture. On dit que les Français sont arrogants, prétentieux. Les français par exemple, ne veulent pas parler l’anglais, parce qu’ils n’aiment que le français. Une autre opinion qui circule est celle que les Français sont froids envers les étrangers, qu’ils ne sont pas accueillants.

Un lieu commun encore plus connoté est celui du parisien, qu’il est le chauvin parmi les chauvins. Il y a bien sûr des stéréotypes faux à dénoncer, comme par exemple le mythe sur le Parisien, qui concentre en soi tous les lieux communs.

LVdlR: Sauf les stéréotypes, nous savons que les cultures française et italienne sont très proches. Au cours des siècles, par exemple, les plus grands écrivains ont voyagé en Italie et puis, selon la tradition, ils ont écrit un récit sur ce voyage et sur leur expérience. Je peux citer quelques noms : Stendhal, un des plus célèbres, Dumas, Suarès, Montaigne, Du Bellay, Giono. Encore une infinité d’autres écrivains ont effectué le rituel du voyage littéraire italien.

A votre avis quel est-elle la raison principale de cet amour des écrivains français pour l’Italie et de la tradition d’écrire après un livre sur ce voyage ?

Spandri : Vous avez très bien dit, en fait, il s’agit d’un rituel qui couvre plusieurs siècles. L’amour des grands écrivains pour l’Italie vient de l’Italie elle-même : un pays plongé au cœur de la culture classique et d’une certaine manière de la mémoire collective. C’est un espace saturé de références historiques, esthétiques.

Enfin l’Italie est la patrie que chaque écrivain reconnaît pour sienne. Pensez aussi au Grand Tour du XVIII siècle. Chaque membre de la vieille Europe allait en Italie à la recherche de ses racines.

Le cas de Stendhal permet de répondre à la deuxième partie de votre question. Il n’y a que l’écriture qui puisse dire jusqu’où cette rencontre avec l’Italie et le mythe est personnel et original. Stendhal, qui a vécu pour un tiers de sa vie en Italie montre très bien l’opération d’échapper à la tradition et d’écrire quelque chose de personnel. Son voyage est constitué par des voyages d’autres écrivains du passé.

D’autre part, il y a aussi les écrivains postérieurs à Stendhal qui formeront leurs livres à travers le prisme stendhalien.

LVdlR : Par exemple Suarès cherche l’Italie de Stendhal. Parfois il éprouve aussi de la déception. Quand Suarès arrive à Parme, il ne trouve pas la ville décrite par Stendhal… On voit vraiment une rencontre entre les siècles, les espaces.

Il semble, alors, qu’il s’agit plutôt d’un voyage français qu’italien, n’est-ce pas ?

Spandri : Aussi après le romantisme les écrivains cherchent l’Italie filtrée par la parole et le récit d’un autre écrivain. Il y a des filtres et des prismes, c’est comme une chaîne de voyages et de livres qui s’instaure et qui est très intéressante à parcourir.

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