Origines tchétchènes du terroriste de Conflans: «le problème, c'est l'islamisme»

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Les origines tchétchènes du terroriste de Conflans-Sainte-Honorine ont fait florès. Un détail qui ne doit pas faire oublier à la classe politique française que le dénominateur commun du terrorisme islamiste qui explose en France reste l’islamisme, affirme le spécialiste des problématiques de sécurité Roland Lombardi.

Depuis l’attentat de Conflans-Sainte-Honorine, les Tchétchènes sont sous le feu de la rampe médiatique.

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«Je pense qu'il y a un problème avec la communauté tchétchène en France», déclarait le 18 octobre Jean-Luc Mélenchon sur le plateau de LCI. Des propos qui ont indigné, pour des raisons différentes, tant à droite qu’au sein de son propre camp politique.

Le leader de La France insoumise (LFI) a mis en avant deux précédents avec les Tchétchènes sur le sol national: les affrontements communautaires à Dijon en juin dernier ainsi qu’un autre attentat islamiste commis aux abords de l’Opéra Garnier en mai 2018. Le terroriste avait alors un profil similaire, un jeune d’une vingtaine d’années ayant grandi en France après que ses parents ont obtenu l’asile lors des conflits opposant les forces fédérales russes à des sécessionnistes aux motivations islamistes [créer un Califat dans le Caucase, ndlr].

«On a accueilli des Tchétchènes qui étaient des partisans d’une guerre civile, sur fond de religion», a ainsi déclaré Jean-Luc Mélenchon lors de la manifestation parisienne «contre la haine» le 18 octobre. «Les Tchétchènes sont arrivés en France parce que le gouvernement français, qui était très hostile à monsieur Poutine, les accueillait à bras ouverts», a-t-il ensuite développé le soir même sur le plateau de LCI.

Bien que cette dimension djihadiste du soulèvement des Tchétchènes contre Moscou fût à l’époque –tout comme plus récemment en Syrie– ignorée par une presse française qui portait aux nues la «résistance tchétchène», la mettre aujourd’hui en avant pour limiter à ces seuls réfugiés caucasiens la responsabilité des attentats islamistes en France n’est clairement pas pertinent aux yeux de Roland Lombardi,

«La menace est plutôt endogène. On l’a vu depuis 2012 et les 267 victimes de l’islamisme. Les auteurs étaient des Français d’origine maghrébine, des musulmans ou des Européens convertis à l’Islam», souligne-t-il auprès de Sputnik.

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Cet historien, spécialiste des relations internationales et des problématiques de sécurité, souligne les «faibles» effectifs de cette communauté «étroitement surveillée» par les services de sécurité français «en lien avec leurs homologues russes». En effet, si, selon lui, celle-ci «ne pose pas de problème particulier» en matière d’actes terroristes, elle s’est en revanche fait connaître dans le cadre du grand banditisme et des activités mafieuses

Ne mâchant pas ses mots, Roland Lombardi juge «assez pitoyable» le «bas calcul politique» d’un parti ayant selon lui pris un «tournant clairement communautariste». Pour Roland Lombardi, le rapprochement effectué entre l’origine du terroriste de Conflans-Sainte-Honorine et les affrontements communautaires de Dijon viserait «à satisfaire l’électorat d’origine immigrée et musulmane» de La France insoumise.

«Le problème est autour du droit d’asile»

Car si les Tchétchènes (qui, dans la mosaïque ethnique du Caucase, ne sont pas tous de confession musulmane) gonflent les rangs des bataillons de Daech* comme ils gonflaient autrefois ceux d’Al Qaeda*, depuis plusieurs années, les Français gagnent en poids au sein des organisations terroristes islamistes internationales. En Syrie, la France obtenait en 2017 le rang peu enviable de premier pourvoyeur de djihadistes du Groupe État islamique* au sein de l'Union européenne.

Une situation d’autant plus gênante que le Quai d’Orsay n’avait pas hésité, dans la foulée de l’attentat autour de l’Opéra, à mettre en avant les «milliers» de «Tchétchènes qui combattent du côté des rangs de Daech*» dans une cinglante réponse à Ramzan Kadyrov. Le Président tchétchène balayait alors toute responsabilité de son pays dans l’attentat, soulignant que le terroriste n’avait fait que naître en Tchétchénie pour grandir en France.

«S’il avait eu un semblant d’honnêteté intellectuelle, Jean-Luc Mélenchon aurait reconnu que le problème est autour du droit d’asile, de notre attitude vis-à-vis de la crise migratoire. C’est ça le vrai problème, et ce n’est pas la droite qui le dit mais les services de sécurité français!», insiste-t-il.

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Roland Lombardi évoque notamment le rétropédalage, en 2015, de Berlin qui à la suite de son «élan de générosité» à l’encontre de près d’un million de migrants avait rétabli les contrôles aux frontières allemandes. «Je rappelle qu’au Bataclan, les auteurs de l’attentat étaient des jeunes français partis combattre avec Daech* et qui sont revenus dans le flux des migrants», rappelle-t-il par ailleurs.

Deux semaines avant le dernier attentat en région parisienne, le sang avait déjà coulé sur fond de caricatures de Mahomet. Fin septembre, les anciens locaux de Charlie Hebdo étaient pris pour cible et le terroriste armé d’un hachoir était là aussi jeune, agissait là aussi au nom de l’Islam mais n’était pas Tchétchène.

Charlie, Bataclan, Conflans… l’islamisme en dénominateur commun

En somme, le dénominateur commun du terrorisme islamiste en France n’est pas l’origine géographique mais bien confessionnel, idéologique. «Le problème, c’est l’islamisme» martèle Roland Lombardi qui invite à aller regarder «du côté de certaines associations proches des Frères musulmans* et des Salafistes». Pour lui, l’exécutif ne doit pas s’en tenir aux belles paroles. «Tant qu’il n’y aura pas de lois d’exception et une législation de guerre –puisqu’on nous dit depuis 2015 que nous sommes en guerre–, on ne pourra pas lutter sérieusement contre l’islamisme», développe-t-il.

«Cela fait partie de la stratégie de Daech*, qui disait frapper au cœur des pays qui vous accueillent afin de provoquer d’éventuelles représailles et une guerre civile. Il faudrait plus de vigilance et surtout de reconnexion au réel et moins d’idéologie et d’angélisme.»

«Les islamistes ne doivent pas pouvoir dormir tranquilles dans notre pays», a asséné Emmanuel Macron lors du Conseil de défense le 18 octobre. Des propos martiaux qui ont rappelé à un député de la majorité la fameuse phrase de Vladimir Poutine lorsqu’il déclarait qu’il fallait aller «buter» les terroristes tchétchènes «jusque dans les chiottes».

​Lors du précédent attentat commis en France par un terroriste originaire de Tchétchénie, Alexandre Orlov, ancien ambassadeur de Russie, s’étonnait au micro d’Europe1 que les autorités françaises aient aussi facilement accordé l’asile à des milliers de Tchétchènes.

Aveuglement idéologique et manichéisme déconcertant

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Un an et demi plus tard, toujours au micro d’Elkabbach, le diplomate réitère son constat d’alors, sa surprise vis-à-vis de la «facilité» avec laquelle les autorités françaises accordaient l’asile politique aux Tchétchènes: «Il leur suffisait de dire qu’ils étaient Tchéchènes […] sans aucune enquête préliminaire, sans aucun contrôle», s’insurge-t-il évoquant les avertissements pourtant lancés par les services russes concernant certains individus.

«Beaucoup ont reçu le statut de réfugié lorsque Kouchner était au Quai. À l'époque, certains services de l'État –y compris à l'ambassade à Moscou– étaient effarés des profils qu'ils voyaient passer», twittait quant à lui le directeur de l’Observatoire franco-russe au lendemain des affrontements de Dijon.

​Un constat qui, en ce sens, rejoint celui de Jean-Luc Mélenchon. En matière de politique d’asile, d’immigration au sens large, les autorités françaises sont-elles victimes d’un aveuglement idéologique? Clairement, estime Roland Lombardi, selon lequel les responsables Français on «une guerre de retard» en matière de perception des conflits,

«Les autorités françaises ont une fâcheuse tendance à percevoir tous les conflits de la planète avec un manichéisme déconcertant. On a une idéologie droit-de-l’hommiste qui fait que nous sommes laxistes à un point, on le voit ces dernières années, très dangereux. On en paie le prix aujourd’hui. Il faudrait que certaines élites intellectuelles se reconnectent à la réalité pour comprendre que, comme disait Rocard, on ne peut pas accueillir toute la misère du monde.»

*Organisation terroriste interdite en Russie.

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