Courrier des lecteurs Affaires russes, 2004-09-20 14:50

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PARIS - par Angela Charlton (spécialement pour RIA-Novosti).

Vladimir Poutine s'attendait probablement à l'indignation courroucée des hommes politiques d'opposition après l'annonce de la réforme radicale de la structure du pouvoir politique en Russie. Mais la critique la plus acerbe de ses réformes parvient d'endroits plus lointains.

Le président américain George Bush a exprimé son inquiétude au sujet des "décisions susceptibles de saper la démocratie". Chris Patten, Commissaire pour les affaires étrangères de l'Union européenne, a exprimé l'espoir que la Russie n'estimait pas que le renforcement du pouvoir du Kremlin était l'unique réponse au terrorisme. Les journalistes occidentaux ont accusé Vladimir Poutine de désir de faire renaître le totalitarisme de l'époque soviétique.

L'élite russe au pouvoir est en effervescence. Les réformes de Vladimir Poutine qui visent à annuler les élections des gouverneurs et à fermer aux candidats indépendants la voie au parlement provoquent la stupéfaction. Pourquoi donc la Russie est-elle indignée par la réaction internationale à ces actions?

Le pays vient de connaître l'attaque terroriste la plus terrible de son histoire: le massacre prémédité d'enfants peut céder au 11 septembre par l'envergure, mais pas par la cruauté. Après le 11 septembre, les dirigeants et les médias du monde entier ont compati à l'Amérique de longues semaines durant, en permettant à George Bush et à son peuple de se remettre du choc avant de recommencer à critiquer les Etats-Unis. Les Russes ne ressentent pas cette solidarité et un tel ménagement à leur égard.

Les diplomates russes considèrent la critique étrangère comme de l'hypocrisie. George Bush était allié de Vladimir Poutine et, dans les conditions de la guerre menée par les Etats-Unis contre le terrorisme, il s'abstenait de critiquer la guerre en Tchétchénie. Vladimir Poutine n'a pas critiqué George Bush pour la restriction de libertés qui a affecté les Américains après le 11 septembre et s'attendait probablement à la même gentillesse de la part du président américain après avoir annoncé ses projets de réforme. A Washington, nombreux sont ceux qui accusent George Bush de faire preuve de mollesse et de mettre trop de temps à réagir aux réformes de Vladimir Poutine et à proposer des pourparlers avec les Tchétchènes. A Moscou, les paroles de George Bush ont été accueillies comme une trahison.

Cependant, de nombreux Russes sont tellement déçus de l'activité de leurs gouverneurs élus par le peuple qu'ils ne regrettent pas beaucoup leur éloignement du pouvoir. Les dirigeants nommés seront moins obligés envers les électeurs et plus obligés envers le président. Mais Vladimir Poutine affirme que cette mesure permettra de renforcer la sécurité du pays. Ses nombreux compatriotes effrayés sont prêts à faire confiance au président, surtout ceux qui vivent dans le Caucase du Nord où la situation est instable.

La critique adressée à Vladimir Poutine rappelle les années 90, lorsque la Russie traversait une crise profonde, la corruption et l'inflation gouvernaient le pays plus que le président Boris Eltsine. Les créditeurs et les conseillers occidentaux harcelaient le gouvernement de leurs conseils et de leurs recommandations qui étaient souvent erronés ou mal employés.

L'image de Vladimir Poutine, celle d'un homme fort et assuré, associée à des prix élevés du pétrole ont redonné de l'assurance aux Russes quant à leur place dans le monde. Les dirigeants ne recourent plus aux instructions et aux prêts étrangers. Quels que soient les intentions de George Bush, d'ailleurs très impopulaire à Moscou, elles ne font que rassembler les Russes autour de Vladimir Poutine.

Les Russes évalueront eux-mêmes le plan de réforme politique. Quant à l'administration de Vladimir Poutine, au lieu de réagir à la critique provenant de Washington, elle devrait accorder plus d'attention à l'inquiétude exprimée par Boris Eltsine, Mikhail Gorbatchev et certains journaux russes.

(Les avis émis dans cet article peuvent ne pas refléter les positions de l'Agence).

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