Les OGM sont-ils dangereux ou salutaires ?

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MOSCOU, 18 octobre - par Olga Sobolevskaïa, commentatrice RIA Novosti.

L'Association nationale de la sécurité génétique et les représentants de plus de 30 organisations sociales, politiques et scientifiques viennent d'adresser une lettre ouverte au président russe Vladimir Poutine. "Ce message est dicté par la menace croissante qui pèse sur la sécurité biologique en Russie", déclarent les auteurs de la lettre.

"En raison de lacunes qui persistent dans la législation russe et faute de contrôle fiable des organismes génétiquement modifiés (OGM), le marché de la consommation abonde en aliments contenant des éléments transgéniques dont l'innocuité n'est pas prouvée", soulignent-ils. A partir du 1er juin, la Russie a introduit les normes européennes d'étiquetage des produits alimentaires à teneur transgénique: le taux minimal des ingrédients génétiquement modifiés dont la mention s'impose est passé de 5% à 0,9%. Un impératif qui est pourtant rarement respecté. "Les produits écologiques traditionnels pour la Russie sont supplantés par des produits génétiquement modifiés importés", affirment les auteurs de la lettre.

L'un d'entre eux, le président du Centre de la politique écologique de Russie, Alexeï Iablokov, se dit convaincu que la culture de plantes transgéniques n'est pas un besoin alimentaire et que leur rendement élevé n'est qu'un mythe. Dans le même temps, les espèces génétiquement modifiées risquent de réduire la diversité biologique de leur entourage tant botanique que zoologique. "Il faudrait limiter rigoureusement l'utilisation des cultures transgéniques", conclut Alexeï Iablokov.

"Tous les risques liés aux OGM proviennent de l'imperfection des technologies de leur production, estime le directeur de l'Institut de physiologie des plantes (Académie russe des sciences), Vladimir Kouznetsov. Les chercheurs qui produisent les OGM ne savent pas où s'intègre précisément le gène étranger et quelles en sont les conséquences. Les OGM sont dangereux parce qu'ils sont imprévisibles. D'autant plus que leur inoffensivité pour la santé est difficilement testable: ils doivent pour cela être analysés pendant plusieurs générations".Mais, la Russie connaît une pénurie de laboratoires de ce type.

La Russie dispose d'un énorme potentiel en matière de production d'aliments génétiquement sûrs, poursuivent les auteurs de la lettre ouverte. "L'utilisation de cultures génétiquement modifiées en Russie amènera à la disparition des meilleures espèces traditionnelles qui garantissent la récolte dans les régions aux conditions climatiques défavorables et réduira en poussière les acquis de plusieurs générations de sélectionneurs russes. La production agricole risque de se trouver entièrement dépendante de compagnies multinationales", lit-on dans la lettre.

Les auteurs du message adressé à Vladimir Poutine préconisent "un moratoire pour la culture commerciale d'espèces génétiquement modifiées jusqu'à ce que des experts indépendants prouvent leur innocuité pour l'homme et la nature" et une Loi fédérale sur la biosécurité. "L'État devrait réagir à la nouvelle menace", estime Olga Razbach, administratrice du Centre écologique régional de Russie, dont le nom figure parmi les signataires de la lettre.

Dans le même temps, en Russie, les cultures génétiquement modifiées ont toujours bon nombre de partisans convaincus que la perfection biologique ne connaît pas de limites. "Chez nous, à l'Académie russe des sciences agricoles, avoue son vice-président Lev Ersnt, plus de dix instituts étudient ce problème. Nous avons conçu des dizaines de lignées transgéniques de plantes, de lapins, de moutons, de cailles et de plusieurs espèces de poissons. Grâce à un taux plus élevé de leur propre hormone de croissance, les porcs transgéniques offrent davantage de viande maigre et sont plus résistants aux maladies infectieuses. Nos études portent sur huit générations, mais ce dernier effet reste inexpliqué. Nous-mêmes, nous mangeons de leur viande, et personne n'en est encore mort". "En Fédération de Russie, il n'y a pas une seule plante génétiquement modifiée qui soit utilisée à des fins commerciales, c'est, à mon avis, une catastrophe économique", dit Konstantin Skriabine, membre de l'Académie russe des sciences agricoles et directeur d'un centre d'ingénierie biologique.

"Depuis les années 1980, des milliers de recherches ont été menées de par le monde. Le caractère innoffensif des produits contenant des éléments transgéniques est prouvé, estime le vice-directeur de l'Institut de la nutrition (Académie russe des sciences médicales), Mikhaïl Gaparov. Le ministère de la santé et du développement social les a autorisés. Le système de contrôle des OGM fonctionne chez nous, et les médecins sont tranquilles, alors qu'une loi sur la réglementation par l'État des activités d'ingénierie génétique a été adoptée dès 1996".

Toutefois, les consommateurs paraissent peu convaincus face à ces arguments. Selon des données sociologiques, 59% des Européens croient que les plantes génétiquement modifiées sont nuisibles à la santé. Si on réalise un sondage analogue en Russie, les pessimistes risquent d'être aussi nombreux.

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