Conférence de Charm El-Cheikh - chance pour corriger les erreurs d'autrefois

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MOSCOU, 19 novembre (par Marianna Belenkaïa, commentatrice politique de RIA-Novosti). Les 22-23 novembre prochain, à Charm El-Cheikh, en Egypte, à la conférence consacrée aux problèmes du Proche-Orient, il sera sans doute évident si la communauté internationale voit de la même façon les problèmes de l'Irak et de la Palestine, et si l'Orient et l'Occident arriveront, enfin, à écouter et à entendre, l'un l'autre. En théorie, une telle possibilité n'est pas à exclure et ce, déjà pour cette simple raison que ce genre de discussion se déroule cette fois à l'initiative des Etats-Unis et pour la première fois depuis le début du deuxième mandat de George W. Bush. Somme toute, la réussite en sera évidemment pour beaucoup fonction de l'attitude des USA eux-mêmes. Il est, en effet, à savoir si les politiques américains viennent en Egypte pour rechercher des compromis ou pour dicter leurs conditions aux autres. La question se pose, en fait, si les Etats-Unis sont prêts à tenir compte de l'opinion des pays du Proche-Orient, en décidant du sort de cette région.

L'un des membres haut placés dans l'administration de l'ex-Président des Etats-Unis, Bill Clinton, a, par exemple, reconnu, au cours de sa récente visite à Moscou, que l'une des plus graves erreurs de Washington avait été qu'au cours de la préparation des accords de paix définitifs entre Israël et la Palestine, l'attitude des pays arabes n'avait pas été prise en compte. Qui plus est, c'est aussi l'une des raisons de l'échec du sommet de Camp David en été 2000. Néanmoins, il s'agissait bien là du sort de Jérusalem, problème qui préoccupe évidemment les Palestiniens, mais aussi et surtout tous les Arabes sans exception aucune. Nombreux sont aussi ces Etats arabes qui ne sont pas du tout indifférents à la manière dont le problème des réfugiés palestiniens sera finalement réglé et ce, pour cette simple raison que ces derniers résident toujours sur leur territoire. Il n'est pas, non plus, à oublier que plusieurs paysarabes, dont l'Arabie Saoudite, la Syrie, la Jordanie et l'Egypte, possèdent incontestablement des leviers d'influence sur la situation dans les territoires palestiniens. Aussi, est-il tout bonnement impossible d'exclure ces pays du processus de règlement au Proche-Orient. Quoi que l'on fasse, les Etats arabes ne manqueront certes pas de s'ingérer dans tout ce qui s'y produit, tout en apportant du trouble dans la situation déjà sans cela très compliquée.

Ce n'est pas par hasard évidemment qu'en 2003, les diplomates russes ont insisté à ce que la "Feuille de route", plan de règlement palestino-israélien, élaboré par le "quartette" de médiateurs internationaux pour le Proche-Orient, et plus précisément par les Etats-Unis, la Fédération de Russie, l'Union européenne (UE) et l'Organisation des Nations Unies, renferme une référence à l'initiative de paix avancée, en automne 2002, par le prince héritier Abdallah d'Arabie Saoudite. C'était, d'ailleurs, en pleine intifada "Al-Aqsa". C'est alors également que ces propositions du prince Abdallah avaient été approuvées par la Ligue arabe, réunie à Beyrouth. Comme résultat, la "Feuille de route" tient compte de l'avis de pratiquement toutes les parties intéressées au règlement arabo-israélien. Et en dépit de toutes les critiques et des amendements apportés par la suite à la "Feuille de route", tant par les Israéliens, que par certains politiques arabes, cela crée incontestablement une base pour entamer, enfin, des négociations de paix que ce soit demain ou dans plusieurs années. Quoi qu'il en soit, une seule référence à l'initiative saoudienne dans la "Feuille de route" ne suffit pas évidemment. On a besoin de la prise en considération de l'attitude des Arabes et de leur assistance tout à fait concrète à chaque étape de réalisation de ce plan de paix et ce, à commencer par l'organisation et la tenue des futures élections dans l'Autorité palestinienne et l'abandon par les Palestiniens des méthodes terroristes de lutte jusqu'à la solution des problèmes des frontières, des réfugiés et de Jérusalem. Cela se rapporte au même titre à l'Iran, injustement exclu du processus de règlement au Proche-Orient, processus sur lequel Téhéran exerce pourtant une influence qui n'est pas du tout négligeable.

Une situation similaire se crée également concernant l'Irak. Là aussi, on a besoin d'un consensus, qu'il s'agisse des problèmes liés à l'octroi d'une assistance financière et technique ou des questions relevant d'un règlement à l'intérieur même du pays. Pour ce qui est de ce dernier, les Irakiens insistent eux-mêmes à la non-ingérence dans leurs affaires intérieures, et tout particulièrement de la part de leurs pays-voisins. D'autre part, même une telle politique de non-ingérence doit être concertée, car le sort de nombreux Etats dans cette partie du monde est certes fonction de l'évolution de la situation en Irak. Formellement, tous ces Etats ont intérêt à ce que la situation en Irak se stabilise. Pourtant, on ne doit pas, non plus, oublier que la réussite des Américains en Irak permettrait aux Etats-Unis d'intensifier leurs plans de démocratisation du Grand Proche-Orient et d'accroître, par conséquent, leurs pressions sur l'Iran, la Syrie et l'Arabie Saoudite. Ces pays ont besoin d'obtenir des garanties de Washington concernant leur avenir, sinon ils pourront toujours trouver un moyen pour déstabiliser la situation dans la région.

Et finalement, la future conférence de Charm El-Cheikh va donner l'occasion de se pencher sur un autre sujet de taille qu'est la radicalisation de l'islam. Force est de reconnaître qu'aujourd'hui, ce n'est plus un problème pour les pays d'Occident et la Russie, mais aussi pour le monde islamique lui-même.

Ainsi, Charm El-Cheikh pourrait bien devenir cet endroit précis où un important travail serait fait pour corriger les erreurs d'autrefois. Si cela se produit effectivement, une chance tout à fait réelle s'annoncera pour la stabilisation au Proche-Orient.

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