Le Turkménistan revient dans l'arène internationale

© RIA Novosti . Alexei Danichev / Accéder à la base multimédiaGourbangouly Berdymoukhammedov
Gourbangouly Berdymoukhammedov - Sputnik Afrique
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Dmitri Medvedev et le président iranien Mahmoud Ahmadinejad ne se rencontreront pas à Achkhabad, la capitale turkmène. L'Iranien s'y rendra une semaine après le Russe. Le président chinois Hu Jintao y a également effectué la semaine dernière une visite pour inaugurer le gazoduc turkméno-chinois

Dmitri Medvedev et le président iranien Mahmoud Ahmadinejad ne se rencontreront pas à Achkhabad, la capitale turkmène. L'Iranien s'y rendra une semaine après le Russe. Le président chinois Hu Jintao y a également effectué la semaine dernière une visite pour inaugurer le gazoduc turkméno-chinois.

Chacun des hôtes a reçu sa part d'exportation de gaz turkmène. La Chine recevra 40 milliards de m3 de gaz turkmène par an, la Russie, 30 milliards (elle en recevait auparavant 50 milliards, mais Dmitri Medvedev et Gourbangouly Berdymoukhammedov, président du Turkménistan, viennent de s'entendre sur la reprise de ces livraisons). L'Iran recevra 20 milliards de m3 (Mahmoud Ahmadinejad, de même que Hu Jintao avant lui, arrive également pour l'inauguration du gazoduc).

Les chiffres 40-30-20 sont un bon symbole du processus de retour du Turkménistan dans l'arène internationale en tant qu'Etat important dans les affaires de l'Asie centrale et du monde entier. La Chine, la Russie et l'Iran sont les partenaires actuels de cet Etat riverain de la Caspienne, mais n'oublions pas non plus le Kazakhstan et l'Ouzbékistan, Etats importants, qui ont participé à la construction du gazoduc "chinois".

Le dernier pays voisin du Turkménistan, l'Afghanistan, était cause indirecte de l'autoisolement - même relatif – du Turkménistan à une époque antérieure. Rappelons brièvement que le problème principal résidait dans les contacts particuliers entretenus par l’ancien leader turkmène, Saparmourad Niazov, avec le régime des talibans en Afghanistan. En hiver 2001-2002, lorsque la guerre américaine avait commencé en Afghanistan, le Turkménistan s'était définitivement isolé, faisant semblant de ne pas exister.

D'ailleurs, n'oublions pas que l'administration Bush avait demandé, et Saparmourad Niazov accepté, d'ouvrir la ligne d'approvisionnement en carburant d'aviation par le chemin de fer Achkhabad-Hairaton. Des avions américains faisaient le plein à l'aéroport de la capitale turkmène. A présent, conformément au nouvel accord en vigueur, portant également sur le ravitaillement, un groupe de 7 militaires américains se trouve en permanence à Achkhabad.

Mais, en réalité, c'est la guerre afghane qui avait permis le renforcement du régime de Saparmourad Niazov dans sa politique "tranquille". Le Turkménistan n'avait pas adhéré à l'OCS (l'Organisation de coopération de Shanghai) ou à l'OTSC (l'Organisation du Traité de sécurité collective). Il restait passif dans les affaires internationales et n'avait pas agi à l'instar du Kirghizstan, devenu la base principale des organisations non gouvernementales financées par les Etats-Unis et l'UE.

En même temps, Saparmourad Niazov avait définitivement gelé sa politique intérieure et avait fait du Turkménistan une version caspienne de la Corée du Nord. Cependant, après sa mort en 2006, le régime instauré, avec ses statues d'or érigées en l’honneur du président et son livre "Roukhnama" étudié dans les écoles, comptait ses derniers jours.

Une question, finalement idéologique, a été maintes fois discutée à Moscou: comment entretenir de bons rapports avec le Turkménistan alors que des Russes (8% des 5,5 millions d'habitants) avaient été parfois victimes de persécutions sous l'ancien régime? Il existait une variante consistant à appliquer, de manière conventionnelle, la politique de George W. Bush: isoler le régime et prendre des sanctions sur les violations des droits de l'homme. Mais George W. Bush traitait malgré tout avec les Turkmènes. L'essentiel est qu'à cause de l'idéologie des Etats-Unis, soutenant un changement de régimes en Asie centrale, l'Amérique est devenue un hôte indésirable dans la région. Qui plus est, l'idéologie de l'isolement et des sanctions a isolé l'Amérique elle-même dans d'autres pays et régions. On peut citer l'exemple de la Birmanie (Myanmar), pays où Moscou a fait le même choix qu'au Turkménistan et avec qui la Russie vient de s'entendre sur la vente d'un lot important d'avions militaires.

Dans les années 1990, Moscou a opté pour un développement graduel de ses contacts avec le Turkménistan, surtout dans le domaine du gaz. S'il n'y avait pas eu le regrettable épisode du printemps dernier, où Moscou et Achkhabad se sont querellés à propos du prix du gaz et autres affaires gazières, on aurait pu affirmer que le choix de cette politique était juste.

Des chiffres importants ont été rendus publics à la veille de la visite de Dmitri Medvedev à Achkhabad : par exemple, le chiffre d'affaires des échanges commerciaux "non gaziers" entre les deux pays a atteint 900 millions de dollars pour les neuf premiers mois de cette année, soit un accroissement de 20% en un an. La Russie est devenue le premier partenaire commercial du Turkménistan (représentant, en 2008, 39,2% dans son commerce extérieur). Ce sont les fruits de décisions justes.

A présent, Achkhabad peut s'occuper tranquillement de l'autre axe de sa politique étrangère : l’axe occidental. Le gaz peut manquer pour cet axe, mais on parle déjà d'investissements occidentaux (et japonais). En ce qui concerne les Etats-Unis, on vient d'y créer – en novembre – une commission bipartite (caucus) du Congrès pour l'Asie centrale en vue de renforcer les rapports entre l'Amérique et cette région. Au cours de ses réunions, on entend toujours la phraséologie bien connue : il faut aider les pays de la région à effectuer le "passage à la démocratie". Mais les conseils pour le commerce avec chacun de ces pays (sauf le Turkménistan!) ont déjà tenu des séminaires sur les investissements. Il convient de rappeler aussi que Robert Blake chargé de cette région au Département d'Etat américain a annoncé une série de pourparlers dans chacun des pays d'Asie centrale, en ajoutant que les Etats-Unis les mèneraient dans l'esprit du respect mutuel, sans prétendre monopoliser la vérité et sans imposer leur système à qui que ce soit.

Agissant de cette manière, les Etats-Unis remporteront certainement des succès. La vie dans la région sera très intéressante. Et la visite de Dmitri Medvedev au Turkménistan s'inscrit parfaitement dans le tableau général de ces changements.

Ce texte n'engage que la responsabilité de l'auteur.

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