Les fake news peuvent-elles influencer une élection?

Le Désordre mondial avec Rachel Marsden
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Le Brexit, l’élection américaine, l’affaire Cambridge Analytica ont dévoilé des pratiques d’influence jusqu’alors inconnues sur les réseaux sociaux. Pour en débattre, Rachel Marsden recevait François-Bernard Huyghe, spécialiste de communication et de cyberstratégie à l’IRIS.

2016 et 2017 ont été des années riches en évènements politiques, entre le Brexit et les élections aux États-Unis et en France. Elles se sont enrichies également d'un nouveau mot, les fake news. Le 26 avril dernier, la Commission européenne diffusait un rapport sur la lutte contre la désinformation, proposant quelques pistes, dont la création d'un bureau indépendant de vérification des faits ainsi que la création d'un code de bonnes pratiques.

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Pour François-Bernard Huyghe, spécialiste de communication et de cyberstratégie à l'IRIS (Institut de Relations Internationales et Stratégiques), le concept de fake news n'a «pas beaucoup de sens» et préfère utiliser le terme de «bobard». Le chercheur le définit ainsi: «une information qui est fausse, c'est-à-dire dont le premier émetteur sait pertinemment que soit il a totalement inventé soit qu'il n'a aucun élément pour l'accréditer, pas de vraie photo, il n'a pas entendu une vraie déclaration, il n'a pas de vraies données. Des fake news, il y en a dans l'histoire de l'humanité depuis Adam et Ève». Et M. Huyghe ajoute toutefois: «le problème c'est qu'avec la technologie, il est de plus en plus possible de produire du faux, de fausses représentations de la réalité».

Pourtant la question essentielle, c'est de se demander si ces informations peuvent changer le vote, et le spécialiste de cyberstratégie est catégorique:

«Je crois qu'il faut être très naïf pour croire qu'un pauvre cerveau humain exposé à une fake news recueillie sur les réseaux sociaux change son vote alors qu'il reçoit des millions d'heures de télévision et de journaux qui sont censés peut-être pas forcément dire la vérité, mais dire des informations plus mainstream moins fantaisistes».

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Alors quels effets produisent-ils ces fake news si elles ne modifient pas les votes? François-Bernard Huyghe estime que les personnes qui reçoivent des fake news renforcent leurs préjugés, en gros se radicalisent: «plusieurs études par des universités américaines qui montrent que finalement le facteur fake news ne change pas les informations. En revanche, ce qu'il fait, c'est que les gens s'abreuvent, sont demandeurs de fake news qui vont renforcer leurs préjugés ou leurs tendances idéologiques et les partisans de Trump regardaient beaucoup plus de fake news sur les réseaux sociaux, des fake news qui insultaient ou lançaient des accusations contre Hillary Clinton, mais il faut dire que 98% des médias mainstream sérieux soutenaient Hillary Clinton».

Et le chercheur de l'IRIS de prendre l'exemple récent du faux étudiant dans le coma dans l'université Paris I au campus de Tolbiac:

«Si vous prenez les exemples récents d'informations fausses ou contestées, on voit très bien les milieux qui vont les recevoir et les accepter. Le faux étudiant qui était dans le coma de Tolbiac, ça correspondait tellement aux fantasmes des médias d'extrême-gauche.»

Les États, les organisations internationales devraient-ils se saisir de ce problème, comme le tentent de le faire la Commission européenne et le gouvernement français? François-Bernard Huyghe considère que ce n'est pas le rôle de l'État de dire la vérité:

«Il ne faudrait peut-être pas que les démocraties donnent l'exemple en décidant que c'est l'État qui a le droit de savoir qui dit la vérité et qui ment.»

Est-ce donc le rôle des réseaux sociaux, des GAFA, et des médias traditionnels? Le spécialiste de la communication estime qu'il est dans leur intérêt pour conserver leur marché de lutter contre les bobards: «les fake news ou présumées telles, sont très vite signalées, pourquoi? Parce que les GAFA le font, créent des algorithmes pour ça. Parce qu'énormément de médias classiques mainstream ont tout intérêt à paraître comme les sources authentiques de la vérité qui vont, eux, aux sources, vérifient font le travail déontologique que devraient faire les journaux. Le meilleur exemple, ce sont les Décodeurs du Monde qui tous les jours publient des listes de fausses nouvelles ou de nouvelles dont on ne peut pas prouver qu'elles sont vraies, mais qui commencent aussi à qualifier les sources et c'est là qu'on commence à rentrer dans quelque chose de plus grave».

François-Bernard Huyghe prévient toutefois que la lutte contre les fake news peut éventuellement se transformer en bataille idéologique de la vérité:

«À partir du moment où on commence à discréditer une source à cause de ses orientations idéologiques, on rentre dans le contrôle idéologique.»

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