Racisme systémique et xénophobie: y a-t-il un lien avec le passé colonial?

© SputnikUne nouvelle journée de mobilisation contre le racisme à Paris, le 13 juin 2020
Une nouvelle journée de mobilisation contre le racisme à Paris, le 13 juin 2020 - Sputnik Afrique, 1920, 25.11.2021
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À l’occasion de la sortie de son livre "Réflexions sur le racisme systémique et l’exception coloniale", Youssef Girard, historien de la colonisation et du mouvement national algérien, explique à Sputnik les origines coloniales du racisme et de la xénophobie, notamment à l’égard de "l’islam et des musulmans".
Dans un livre à paraître bientôt aux éditions Héritage sous le titre: "Réflexions sur le racisme systémique et l’exception coloniale", le docteur Youssef Girard, historien français spécialiste du mouvement national algérien et de la colonisation, s’attaque à l’épineuse question "du racisme systémique en France". Pour ce faire, il plonge dans les racines coloniales du racisme afin de montrer les continuités existantes dans le discours et dans les pratiques entre la période coloniale et la période postcoloniale.
Le chercheur a choisi deux fils conducteurs pour son analyse de ce phénomène. Le premier consiste à essayer de comprendre comment, plus de 50 ans après les indépendances, une gestion coloniale des populations non-blanches, de leurs cultures et des espaces dans lesquels elles vivent perdure en France? Le second, quant à lui, est porté sur la compréhension de comment l’exception coloniale se redéfinit afin de préserver un ordre social inégalitaire marqué "par l’hégémonie blanche"?
Dans un entretien à Sputnik, le docteur Girard, qui part de l’analyse de Frantz Fanon sur un "monde coupé en deux" par le colonialisme, explique que "malgré l’accession à l’indépendance des peuples colonisés, les pratiques coloniales n’ont pas cessé miraculeusement avec la fin de l’empire à partir de 1962".

"Dans la continuité de l’histoire coloniale"

"Les rapports des autorités françaises avec l’islam et les musulmans vivant dans l’Hexagone, qu’ils soient Français ou étrangers, s’inscrivent dans la continuité de l’histoire coloniale de la France, particulièrement celle de la colonisation de l’Algérie", affirme-t-il.
Et d’ajouter qu’"en France, les pratiques coloniales persistèrent en redéfinissant l’exception prévalant dans la gestion de l’immigration coloniale, notamment algérienne, vis-à-vis de l’immigration postcoloniale puis des héritiers de cette immigration".
Ainsi pour lui, "les politiques islamophobes mises en œuvre actuellement par l’État français n’ont donc strictement rien de nouveau. Elles s’inscrivent dans la continuité immédiate d’une histoire coloniale séculaire qui a construit les musulmans et l’islam comme un corps d’exception devant être soumis à une législation et à des pratiques d’encadrement spécifiques".

Par quels mécanismes?

Après l’accession des peuples colonisés à l’indépendance, les pratiques coloniales, qui avaient façonné l’action de l’État français, avaient évolué aussi bien sur le plan international que national. Par exemple, à l’international par la mise en place de mécanismes de domination néocoloniaux, souvent dénoncés sous le terme de "Françafrique".
Au niveau national, l’un des marqueurs de cette persistance de l’exception coloniale, après les indépendances, selon Youssef Girard, "fut le maintien et la redéfinition d’unités de police spécifiques visant à gérer les immigrés postcoloniaux et leurs descendants. Les Brigades anti-criminalité (BAC) sont les héritières directes des Brigade des agressions et violences (BAV), créées en 1953, qui étaient elles-mêmes héritières de la Brigade nord-africaine (BNA) dépendante du Service des affaires indigènes nord-africaines, fondé en 1923 pour gérer l’immigration maghrébine".
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