Les descendants des victimes du génocide namibien appellent l'Allemagne à "cesser de se cacher"

CC BY-SA 2.0 / alex_smith1 / Le drapeau de la Namibie
Le drapeau de la Namibie - Sputnik Afrique, 1920, 05.02.2023
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Les représentants des peuples Herero et Nama, victimes d’un génocide mené par l’Allemagne au début du XXe siècle, exigent que Berlin discute directement avec eux des réparations et accusent le gouvernement namibien de les avoir acceptées sans leur approbation, selon le Guardian.
Les descendants des victimes du génocide en Namibie ont appelé l’Allemagne à "cesser de se cacher" et à discuter directement des réparations avec eux, rapporte le Guardian.
Ces représentants des peuples Herero et Nama reprochent également au gouvernement namibien d’avoir conclu un accord avec l’Allemagne sans leur approbation.
Ils se sont rendus à la haute cour de Namibie pour rejeter les excuses présentées en 2021 après des années de pourparlers entre la Namibie et l'Allemagne, qui, selon eux, ne suffisent pas à expier le génocide de 1904 à 1908, le premier du XXe siècle.
"Nous n'avons été impliqués à aucun moment. Le gouvernement a établi l'ordre du jour, il a discuté de ce dont il a discuté et ne l'a jamais divulgué jusqu'à ce que nous ayons vu une déclaration commune l'année dernière", a déclaré le professeur Mutjinde Ktjiua, chef des Herero.

Une aide au développement d’un milliard d’euros

En mai 2021, après plus de cinq ans d'âpres négociations, l’Allemagne a annoncé qu’elle reconnaissait avoir commis un génocide dans le territoire d’Afrique australe qu'elle avait colonisé entre 1884 et 1915 et a promis une aide au développement de 1,1 milliard d’euros sur 30 ans, qui doit profiter aux descendants des deux tribus. L'Allemagne a souligné que cette aide serait versée sur "une base volontaire" et que l'accord n'était pas comparable à des "réparations".
M.Ktjiua a cependant déclaré que les tribus voulaient des réparations directes pour remédier à la pauvreté et à la marginalisation résultant du génocide.
"C'est essentiel parce que nous savons sans aucun doute que nous avons dans ce pays un gouvernement qui détourne des ressources. Un gouvernement qui a nié pendant toutes ces années que les Herero et les Nama étaient [soumis au génocide], maintenant vous leur faites confiance pour gérer cela?", indique-t-il.

Ramener la dignité et l’estime de soi

Gaob Johannes Isaak, président de l'Association des chefs traditionnels Nama, a déclaré que des réparations étaient nécessaires pour faire face à la perte de 80% des terres ancestrales Nama - dont une grande partie est maintenant occupée par des agriculteurs d'origine allemande - ainsi qu'aux dommages générationnels aux moyens de subsistance et à l'identité.
"Les réparations ramèneraient la dignité, l'estime de soi et joueraient un rôle significatif dans notre propre développement et notre éducation pour le peuple Nama afin que nous puissions partager équitablement les ressources de la Namibie", a-t-il fait savoir.
"Que les deux gouvernements cessent de se cacher derrière la question des [négociations] d'État à État."
L'avocat herero Patrick Kauta a fait valoir que la déclaration conjointe enfreint une motion parlementaire namibienne de 2006 demandant des réparations à l'Allemagne.

La renégociation demandée par un grand parti

Il ne s’agit pas de la première demande de renégociation de l’accord entre les deux gouvernements sur le génocide.
En septembre dernier, McHenry Venaani, le dirigeant du plus grand parti d’opposition de Namibie, le Mouvement démocratique populaire (MDP), l’avait exigé dans un message adressé à la ministre allemande des Affaires étrangères Annalena Baerbock.
"Les réparations n'ont pas été reconnues comme une conséquence de l'admission du génocide", a déclaré M.Venaani, appelant l'Allemagne "à revenir à la table des négociations et à réélaborer un accord qui satisferait les deux groupes".

Le premier génocide du XXe siècle

Les tribus herero représentent aujourd'hui environ 7% de la population namibienne contre 40% au début du XXe siècle. Privés de leurs terres et de leur bétail, ils s'étaient révoltés en 1904 contre les colons allemands, faisant une centaine de morts parmi ces derniers. Envoyé pour mater la rébellion, le général allemand Lothar von Trotha avait ordonné leur extermination. Les Nama s'étaient soulevés un an plus tard et subirent le même sort. Au total, au moins 60.000 Herero et environ 10.000 Nama furent tués entre 1904 et 1908.
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