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Donbass. Opération russe
La Russie a lancé le 24 février 2022 une opération militaire spéciale en Ukraine pour protéger les habitants du Donbass subissant le blocage et les attaques de Kiev depuis 2014.

Trop lourds et difficiles à réparer: ce qui ne va pas avec les Challenger 2 en Ukraine

CC BY-SA 2.0 / Andrew Skudder / Challenger IIUn char Challenger II
Un char Challenger II - Sputnik Afrique, 1920, 20.08.2023
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Kiev a déployé à la mi-août sa 82e brigade d’assaut d'élite sur l’axe de Zaporojié. Cette unité est dotée de Challenger 2, des chars britanniques très médiatisés. Sputnik explique pourquoi ces blindés ne seraient pas susceptibles d’inverser la situation sur le champ de bataille.
Lancée au combat à la mi-août, la 82e brigade d'assaut aérien ukrainienne a subi dans la région de Zaporojié ses premières pertes qui se chiffrent à 200 hommes, cinq chars et d’autres blindés et équipements, selon le ministère russe de la Défense. Il n’est pas précisé quels chars ont été détruits, mais les médias avaient précédemment annoncé que la brigade était armée de Challenger britanniques envoyés à Kiev au printemps avec leurs obus perforants à l’uranium appauvri.
Sputnik analyse les caractéristiques de ces chars et les facteurs qui peuvent les empêcher d’appuyer la contre-offensive de Kiev.

Chars largement médiatisés

Les chars Challenger 2 ont fait la fierté de l’armée britannique depuis leur mise en service à la fin des années 1990. Les médias occidentaux rappelaient qu’aucun Challenger 2 n’avait été ni détruit ni pris au combat (sans compter un incident de tir ami lors de l'invasion en Irak en 2003). En juin, les journalistes prédisaient avec certitude qu’entre les mains des Ukrainiens, les Challenger 2 ainsi que les Leopard et Leopard 2 allemands couperaient les lignes de défense russe comme un fil à couper le beurre.
Toutefois, début juin, les observateurs occidentaux ont commencé à reconnaître que ces hypothèses étaient infondées. Selon les médias, quelques jours seulement après le début de la contre-offensive, les troupes ukrainiennes ont retiré les lourds chars allemands du front après que ceux-ci se sont retrouvés coincés dans des champs de mines et se sont montrés vulnérables aux tirs d'artillerie russes. En ce qui concerne les Challenger 2, l’armée russe n'a signalé aucun contact avec eux au cours des deux derniers mois. Kiev avait pourtant publié en juin des vidéos de chars britanniques dont l’un roulait sur une route de campagne inconnue et l’autre, immobile dans un champ, tournait sa tourelle, apparemment sans but.

Premiers signaux alarmants

L’armée ukrainienne a reçu les premiers signaux alarmants concernant les chars britanniques en janvier 2023, lorsque des hauts gradés des forces britanniques ont conseillé à leurs homologues ukrainiens d'éviter de déployer leurs chars dans des zones où ils pourraient être capturés ou détruits par les forces russes.
"La première étape consiste à former les tankistes et à travailler avec les coordinateurs militaires pour garantir que les Challenger 2 ne seront pas utilisés dans des scénarios où on peut s’attendre à une percée [de la défense, ndlr]. La deuxième étape consiste à s'assurer, au niveau tactique, que les Ukrainiens sont dûment formés pour récupérer un char sous le feu", avait déclaré une source de la Défense britannique.
Ces exigences imposées aux équipages de char ukrainiens faisaient douter de la possibilité d’utiliser ces blindés britanniques coûteux sur la ligne de front, alors que la Russie ne cessait de faire des trophées d’armements de l'Otan, pouvant au final les assembler en une petite armée.

Trop lourds et encombrants

Un autre problème qui compliquerait la vie de la 82e brigade ukrainienne serait la nécessité de manœuvrer vite lors des combats aériens et d'artillerie. La Russie, même à l’avis des responsables occidentaux, a acquis une supériorité écrasante dans ce type de bataille.
Pesant entre 64 et 75 tonnes (selon la configuration du blindage), le Challenger 2 est l'un des chars les plus lourds de l'arsenal de l'Otan. Cela signifie que le simple fait de se déplacer, en particulier dans les zones non adaptées aux chars lourds en raison des conditions naturelles (boue, rivières, rues et ponts étroits et d'autres obstacles naturels ou artificiels), lui poserait problème.
De plus, transporter les Challenger sur de longues distances implique la présence de transporteurs de chars spéciaux, du génie militaire qui devraient se trouver toujours à proximité, et cela, encore une fois, avec le risque d’être bombardé par l’artillerie ou l’aviation russe.
En plus de cela, il y a les dimensions spectaculaires des Challenger. Long de 8,3 mètres, large de 3,5 mètres et haut de 2,49 mètres, un Challenger 2 ne ressemble pas à un "char furtif", il est visible à plusieurs kilomètres (voire plus pour un avion ou un drone).
De ce fait, grâce à des communications efficaces entre les unités de reconnaissance, l'artillerie et l’aviation, les forces russes pourraient contrer toute attaque des blindés ukrainiens, y compris celle des Challenger 2. Quelles que soient leurs capacités avancées, ces chars restent ainsi particulièrement vulnérables aux attaques, notamment à celles à grande distance.

Vulnérabilité face aux armes antichars

Les canons et missiles antichar russes présentent aussi un danger pour les Challenger 2. Le Challenger 2 est le seul char de combat moderne sans canon à âme lisse. Son canon rayé L30A1 de 120 mm est moins précis et puissant que ses équivalents russes, note le Military Watch Magazine.
Les armées ennemies n’ont pas eu beaucoup d’occasions de tester la résistance de l’armure et des systèmes de protection active des Challenger 2. Mais des chars analogues comme le Leopard 2 allemand, l'Abrams américain et le Merkava israélien se sont tous avérés vulnérables aux systèmes antichars de fabrication russe comme le Kornet, selon les experts militaires russes.

Comment compenser les pertes?

Un autre problème des chars britanniques est qu'il n'y a pratiquement aucun moyen pour compenser leurs pertes à temps. D’abord, il n’est actuellement plus possible de relancer la production de certains éléments de ces engins au Royaume-Uni: des entreprises qui produisaient des composants pour les Challenger auraient été fermées et les chaînes d'approvisionnement détruites.
La seule option serait de remplacer les chars endommagés par d’autres, intacts. Mais là aussi, il y a des difficultés. En juillet, le comité de Défense de la Chambre basse du Parlement britannique a établi qu'il ne restait que 157 chars dans le pays: officiellement, il y en a plus, mais beaucoup d’entre eux ont été démantelés pour en tirer des pièces de rechange.
Qui plus est, les politiciens britanniques ont avoué de ne pas savoir combien de ces Challenger 2 seraient prêts au combat, d’autant plus que 43 Challenger 2 avaient été auparavant démantelés en raison de l'inopportunité économique de leur réparation, selon un article du Times publié fin juillet.

Difficultés de maintenance et de réparation

Finalement, le problème des chars britanniques en Ukraine c’est leur caractère unique. La combinaison des caractéristiques techniques (masse, armements et certaines composantes en rupture de stock) rend difficile l'utilisation de blindés de ce type et complique leur maintenance et la logistique.
Pour le dire simplement, si une unité de chars Challenger 2 ne reçoit pas de munitions, elle ne pourra pas s’approvisionner auprès des véhicules endommagés ou détruits.
La réparation des Challenger 2 entraînera également un ensemble de problèmes similaires. Si les pièces de rechange nécessaires ne sont pas disponibles, il faudra accomplir les travaux de réparation dans l'UE, sinon "cannibaliser" (c’est-à-dire démonter pour récupérer des pièces de rechange) d'autres machines du même type.

Quatorze chars peuvent-ils changer l’équilibre des forces?

Compte tenu de la perte de centaines de chars ukrainiens au cours des deux derniers mois, jusqu'à 30 Leopard 2 par exemple, on ne peut s'attendre à ce que les 14 Challenger 2 livrés par Londres changent radicalement le déroulement de la contre-offensive de Kiev, selon un vétéran du renseignement militaire, le colonel à la retraite Roustem Kloupov.
"Ces chars seront très probablement détruits de la même manière que les Leopard ont brûlé. Parce que dans une guerre moderne, avoir 14 chars sur le champ de bataille ne peut rien résoudre. Et deuxièmement, cela ne peut pas montrer de manière objective s’il s’agit d’un bon ou d’un mauvais engin", a déclaré l’expert à Sputnik.
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