La question de la liberté d'expression dans les universités est de plus en plus souvent abordée dans les médias canadiens. Ces derniers mois, plusieurs reportages ont été consacrés à cette question. Il faut dire que le climat est de plus en plus tendu depuis la montée de certains mouvements d'extrême gauche et néo-révisionnistes.
«Les collèges et les universités devraient être des lieux où les étudiants échangent des idées et des opinions différentes lors de débats ouverts et respectueux», a déclaré M.Ford dans le communiqué de presse envoyé aux médias. «Notre gouvernement s'est engagé envers la population de l'Ontario à protéger la liberté d'expression sur les campus. Promesse faite, promesse tenue», a ajouté le Premier ministre ontarien.
Des experts estiment que cette mesure vise à satisfaire un pan de l'électorat conservateur que M.Ford représente depuis son arrivée au pouvoir fin juin. Certains pensent même que cette mesure vise à satisfaire des partisans de l'ultra-droite.
Cette vision est loin d'être partagée par tous, car plusieurs autres personnalités sont récemment intervenues pour dénoncer la censure dans les universités canadiennes. L'an dernier, le chef du Parti conservateur canadien, Andrew Scheer, avait lui-aussi promis de s'attaquer au problème, ce qui n'est pas anodin.
Liberté académique: le chef du Parti conservateur s'en mêle
Au Canada, l'éducation supérieure relève d'abord des compétences provinciales. Il fallait donc que le problème soit jugé très sérieux pour qu'un chef de parti fédéral en fasse l'une de ses priorités. Dans un courriel envoyé aux membres de son parti en juin 2017, le chef de l'opposition officielle à la Chambre des communes tenait des propos dont semble s'être inspiré Doug Ford:
«Une fois élu, je vais suspendre les subventions fédérales aux universités qui ne respecteront pas la diversité d'opinions. Nous croyons que les universités devraient être un lieu pour l'enseignement — un endroit où les jeunes adultes peuvent apprendre à penser par eux-mêmes, en leur présentant d'autres idées et une diversité d'opinions», écrivait le cher du Parti conservateur, Andrew Scheer, aux membres de son parti.
Andrew Scheer a d'ailleurs félicité son homologue provincial sur Twitter pour son récent engagement.
Je lutte pour défendre la liberté d’expression sur les campus depuis longtemps et hier nous avons appris une bonne nouvelle. Merci @fordnation de prendre position avec une politique qui garantit que les étudiants en Ontario profitent d'un lieu pour débattre librement des enjeux. pic.twitter.com/rad3tsjDPX
— Andrew Scheer (@AndrewScheer) 31 августа 2018 г.
Suite à l'annonce de Doug Ford, le Conseil des universités ontariennes s'est également rangé derrière lui:
«Les universités de l'Ontario partagent l'intérêt du gouvernement de l'Ontario concernant la protection de la liberté d'expression, et s'engagent à travailler avec toutes les parties prenantes, y compris les professeurs, les étudiants et le gouvernement provincial, afin de favoriser la discussion et le débat sur nos campus.»
L'enjeu n'est pas sans rappeler l'histoire de Lindsay Shepherd, une étudiante à la maîtrise de l'Université Laurier, en Ontario. En novembre 2017, l'étudiante et assistante d'enseignement avait été réprimandée par des membres du corps professoral pour avoir présenté, lors d'un cours qu'elle donnait, un débat auquel prenait part Jordan Peterson.
Lindsay Shepherd, symbole de la liberté d'expression au Canada
Canadien, Jordan Peterson est professeur de psychologie à l'Université de Toronto. Mais il est maintenant connu un peu partout dans le monde pour sa critique du politiquement correct et de certains mouvements de gauche.
Pour prouver que l'intimidation qu'elle subissait à l'université était réelle, Lindsay Shepherd a enregistré à leur insu deux professeurs et un membre du personnel de son université lors d'une rencontre qu'elle a eue avec eux. Ces derniers lui ont reproché d'avoir fait la promotion d'un courant de pensée haineux et d'un auteur dont les idées n'étaient pas acceptées par la communauté académique.
Jordan Peterson, un penseur canadien controversé
Mme Shepherd réclame désormais 3,6 millions de dollars canadiens (2,3 M EUR) à l'Université Laurier. La poursuite vise l'établissement d'enseignement comme tel, les deux professeurs impliqués et le comité chargé de promouvoir l'égalité et la diversité au sein de l'établissement.
Jordan Peterson a également intenté une poursuite contre les deux mêmes personnes et le comité en question. Il réclame quant à lui 1,5 millions de dollars canadiens (un million d'euros). M.Peterson veut obtenir réparation pour avoir été dépeint comme un raciste et un misogyne par le personnel de l'Université Laurier. Il juge avoir été victime de diffamation.