Mais cette "tradition" sera certainement ranimée lors du prochain sommet UE-Turquie lundi 7 mars — on ne pourrait qualifier autrement les 3 milliards d'euros déjà promis par la chancelière allemande Angela Merkel à ses interlocuteurs turcs. Non content, le président turc Recep Tayyip Erdogan affirme toutefois que cette somme est insuffisante. Après tout, il doit aussi compenser les pertes budgétaires liées à l'absence de touristes russes dans son pays. Il a donc exigé de l'Europe qu'elle porte le montant des aides destinées au logement des réfugiés à 5 milliards d'euros. Pour que le futur "tribut" obtenu par Ankara ne soulève pas de fortes indignations de la part des Européens, le premier ministre turc Ahmet Davutoglu a expliqué que son pays aurait dépensé 8 milliards de dollars pour l'accueil de 2,2 millions de migrants. Pourquoi "aurait"? Parce que personne n'a vérifié ces chiffres qui circulent dans la presse turque. Le président Erdogan a mis en garde les dirigeants européens qui ne seraient pas prêts à payer les descendants des "sultans": "Jusqu'à présent nous faisons embarquer les réfugiés dans des bus à Edirne, à la frontière grecque, pour les renvoyer. On peut le faire encore une fois ou deux mais par la suite, nous ouvrirons la frontière en leur souhaitant bon voyage".
Pour que personne n'intervienne dans cette négociation politique, les Turcs ont interdit de traverser leurs eaux territoriales à un groupe naval de l'Otan qui s'apprêtait à lutter contre le transport illégal de migrants en mer d'Égée. Au final, la direction de l'Alliance continue de mettre au point les détails des opérations à venir et tente de régler les litiges entre la Turquie et la Grèce concernant les frontières maritimes.
Mais d'ici là, Ankara continuera d'observer avec un sourire moqueur l'incapacité de l'UE à rétablir le contrôle des frontières extérieures par la force en abandonnant ses notions humanistes. Et les autorités turques continueront d'envoyer sur le Vieux Continent des réfugiés par milliers, qui changent peu à peu sa démographie et sa composition religieuse.