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Ici Moscou! Chers auditeurs, vous êtes sur « La Voix de la Russie », qui vous invite à suivre une nouvelle édition de sa rubrique régulière – le Club des Voyages!
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Aujourd’hui, en achevant notre aventure arctique, nous continuerons de vous faire connaître les phénomènes organiques en Extrême Nord — ses plantes qui ont su s’adapter au climat rigoureux, ses animaux qui ont réussi à survivre et à se reproduire ici. Nous étions engagés avec vous dans la toundra, diversifiée et pour le moment peu étudiée : avons visité l’île Vaïgatch, considérée par les Nenets locaux comme une terre sacrée, puis traversé l’archipel de Nouvelle-Zemble, baigné par les mers de Kara et de Barents, appris l’histoire de la découverte et de l’exploration de ces territoires austères du Nord, observé les fameuses colonies d’oiseaux, avons compris comment les différentes espèces de l’avifaune s’y répartissaient.
Nous avons vu avec vous aussi les morses peuplant les eaux côtières, dont la chasse, comportant certains risques, était menée au fil des siècles par des riverains pour leurs défenses à l’ivoire très prisé et, évidemment, pour leur cuir et graisse, le tout étant exporté depuis bien longtemps.
Dans les îles de la Nouvelle-Zemble nous avons rencontré en hiver des animaux communs de l’archipel : le renard blanc, l’ours polaire, ainsi qu’une variété locale des rennes sauvages. A cause de leur fourrure épaisse à long poil ils paraissent gros, à museau et aux pieds courts. Leurs crinières extraordinairement longues et bouffant les distinguent d’autres rennes et les font classer par les spécialistes dans une sous-espèce. Leur ration est de même différente et comprend à part du lichen une bonne portion des algues, dont ils se nourrissent sur les plages de la Nouvelle-Zemble. Ces grands mammifères ongulés sont portés sur les listes des espèces en voie de disparition du pays et du monde. Or les mesures prises ont permis de sauver cette variété de rennes. Ainsi, les résultats des récentes études indiquent l’accroissement du troupeau à plusieurs milliers.
Durant notre expédition d’aujourd’hui vous apprendrez encore pas mal de choses intéressantes sur la faune de l’Arctique.

Nous nous trouvons avec vous dans une presqu’île. Sur la carte géographique elle figure un doigt, qui indique exactement le nord et à la fois l’île Blanche devant elle. En la survolant en avion on n’en voit pas la fin. Aussi les Nenets autochtones l’appellent-ils Iamal, ce qui veut dire en leur langue le « bout de la terre ».
Du sud au nord Iamal s’étend sur quelque huit cent kilomètres, une distance considérable. Vu par le hublot, le paysage semble monotone – un pays plat couvert d’une tondra. A Iamal il n’y a ni monts, ni collines tant soit peu élevées. Mais en regardant plus attentivement on remarque quelques différences. Dans le sud, en bordure des rivières, on rencontre encore des forêts – sapinières, mélézins, boulaies, mais les arbrisseaux, principalement les saulaies, prédominent ici. La partie moyenne de la presqu’île est gagnée par des mousses et des lichens. C’est une plaine à perte de vue avec ses petits et grands lacs, avec ses méandres bizarres de cours d’eau et ses ruisseaux. Les marécages sont ici tout aussi nombreux que dans le sud de Iamal. En revanche, le nord de la presqu’île présente une toundra polaire relativement sèche.
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Les silhouettes coniques noires des tentes de peau et l’éparpillement des taches plus claires des troupeaux de rennes à l’horizon étaient depuis les temps les plus reculés un détail caractéristique du paysage local. Et partout dans la toundra — les arabesques infinies des sentiers de rennes.
Il n’y a pas, sans doute, d’animal domestique plus utile que le renne. Ce mammifère est à la fois une bête de somme, de transport et de trait qui passe pratiquement partout. Le renne ne s’enlise pas dans les marais, ne s’enfonce pas dans la neige, il est capable de franchir à la nage des rivières, des lacs et des bras de mer.
La peau apprêtée du veau et du jeune renne sert aux nomades des régions polaires à confectionner des vêtements. Avec celle des animaux adultes ils couvrent leurs tentes, font des sacs de couchage, tapissent le sol à l’intérieur. La peau enlevée des pieds du renne à poil dru va très bien pour confectionner des chaussures et des moufles. Celle du bas de pied de renne sert à faire des semelles pour les chaussures d’hiver. Les tendons du ruminant donnent des « fils », extraordinairement solides, sur lesquels l’humidité n’a pas de prise. Quant à la viande de cet animal, elle est réputée succulente. Le lait de la femelle est de même très nutritif. Des jeunes cornes du renne on tire une substance pour obtenir un remède précieux. En somme, rien n’est pratiquement jeté d’un renne abattu.
Ce cervidé, dont la femelle porte également les bois, vit à l’état semi-sauvage et se nourrit d’herbe, d’écorce, de buisson et de lichen qu’il doit trouver souvent sous la neige. En fait, seul l’élevage de rennes permet de mettre à profit la végétation de vastes pâturages dans le Nord.
On considère que le renne a été initialement apprivoisé par les populations des monts Saïan qui ne l’utilisaient que comme une bête de somme. Ayant migré de là vers le nord de la Sibérie Occidentale, les ancêtres des Nenets contemporains y ont transféré la pratique de l’élevage, mais dans la toundra le renne tirait déjà le traîneau. L’élevage de rennes s’est étendu à tout le nord de l’Eurasie, et à présent la population la plus importante de ces animaux se trouve en territoire de Russie.
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La vie d’un éleveur de rennes n’est pas facile : son troupeau doit être constamment en mouvement, car en restant en un lieu, il détruira rapidement le pâturage, les animaux n’auront plus rien à manger, et la végétation ne s’y reproduira pas encore pendant très longtemps. Des fois en une journée le troupeau doit parcourir plus de dix kilomètres, et au cours de la saison — plusieurs centaines.
La vie d’un éleveur serait inconcevable, si l’homme n’était pas bien équipé. D’abord, c’est l’abri transportable traditionnel. Chez les Nenets, aborigènes de la presqu’île de Iamal c’est une tente de peau, montée avec trente ou quarante supports de bois, longs de cinq mètres, sur lesquels sont tendues les peaux de renne en hiver, soit une grosse toile en été, si ce ne sont toujours pas les peaux. A l’intérieur, le sol est jonché d’osiers, recouverts de planches et par-dessus de peaux de renne. Autrefois l’abri était chauffé et éclairé par un feu, fait à l’intérieur même de la tente, la fumée étant évacuée par une ouverture dans le toit. De nos jours, les éleveurs de rennes se servent d’un poêle en métal, et son long tuyau sort, avec les bouts des pieux rattachés, du sommet de la tente conique. Un tel abri transportable demande seulement une demi-heure pour être dressé, et encore moins pour être démonté. Deux ou trois familles peuvent y loger facilement, et il reste encore de la place pour des invités.
Utilisé au fil des siècles, sinon des millénaires, le principe de construction d’une tente de peau n’a pas vieilli. Une tempête de neige apporte beaucoup de malheurs dans la steppe arctique : le vent violent renverse souvent des roulottes, des bus, mais l’on ne se rappelle un cas, où il retourne une tente de peau, défasse sa construction, semblant si peu solide. Qui plus est, ce principe a soufflé l’idée aux concepteurs contemporains de produire des tentes modernes pour professionnels et touristes qui doivent camper en lieu déboisé.
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Le terrain dans la toundra, s’il ne s’agit pas d’un endroit désertique, dépourvu de végétation ou d’une dépression remplie d’eau, est troué et sillonné en tous sens par les lemmings en un réseau étendu de couloirs et de demi-tunnels. De la prolifération de ces petits mammifères rongeurs dépend directement ou indirectement la reproduction des oiseaux et des animaux habitant la toundra, voire l’aspect même de celle-ci.
Plusieurs espèces de lemmings peuplent la zone boréale de l’Eurasie. Tous ont un corps fortement bâti, des pattes et une queue courtes, de petites oreilles cachées dans la fourrure et mesurent à peu près la moyenne entre une souris et un rat.
Le lemming, surtout des toundras sibériennes, notamment peuplant la presqu’île de Iamal, est sujet, suivant des années, à d’importantes fluctuations démographiques. En moyenne sur un kilomètre carré de la toundra on peut dénombrer de 500 à 600 de ces rongeurs, tandis que tous les trois ou quatre ans leur population se multiplie.
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Alors une « grande fête de la vie » vient dans la toundra. En ces années-là il n’y a pas que les rapaces et les prédateurs, tels que la chouette blanche, le labbe, la buse pattue et le renard bleu, qui en profitent pour se nourrir à leur gré, se reproduire et élever leur progéniture. Des végétariens comme l’eider, la grue sibérienne, le renne ne manquent pas l’occasion d’en manger. On a remarqué que les années de l’abondance de ces rongeurs des oies et des canards, de petits oiseaux ( en particulier, les courlis, les alouettes polaires) nichent densément et se reproduisent abondamment. Et cela s’explique facilement, car l’ennemi principal de ces volatiles, le renard blanc, se nourrit exclusivement de lemmings.
Quant au lemming, il se nourrit avec de brèves pauses le jour et la nuit. En 24 heures il mange le double de son poids – environ cent grammes, et en une année dévore près de 50 kilos d’aliments végétaux. Naturellement, que dans les années de leur prolifération les lemmings pour ainsi dire « fauchent » la végétation dans les terrains humides, notamment, du jonc à coton. En hiver, les rongeurs font des couloirs en tous sens sous la neige, et il arrive qu’ils détruisent toutes les racines des herbes. Et les tiges restées dressées dans la neige sont ensuite emportées par les eaux printanières et amassées alors en tas, faisant penser aux bottes de foin d’un fermier. Petit à petit ces tas se transforment en tourbe et changent le relief d’une région.
Mais un jour vient, où les rongeurs commencent à se sentir à l’étroit, vu leur nombre, et ne trouvent plus suffisamment de nourriture. Une force irrésistible de déplacement s’empare, donc, des lemmings. Le plus souvent cela advient au printemps, et probablement aussi à cause des eaux printanières. Ils se rassemblent en grand nombre et cherchent éperdument à traverser de larges lacs et rivières ou montent aux sommets de collines. La plupart d’entre eux périssent. Si c’étaient les hommes, on dirait qu’ils sont portés à un suicide collectif…
En été la population des lemmings semble se rétablir, mais en automne ils meurent, d’habitude, en masse de quelque maladie. Les raisons en peuvent être différentes, mais ces disparitions répétitives d’une grande partie de la population paraissent prédéterminées. Et en attrapant par un tel été un lemming, en dépit de tous les soins apportés et une bonne nourriture, en règle générale, il ne survit pas à l’automne.
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La « fête de la vie » prend fin. L’année suivante des renards blancs affamés rodent dans la toundra, et rares seront les oiseaux à réussir leur couvaison et d’autant moins à apprendre leurs petits à voler. Par un tel été on n’y verra pas de chouettes blanches, bien peu de labbes et de buses pattues. La toundra semble déserte, muette…
Le mécanisme de telles fluctuations importantes de la population des lemmings n’est pas encore étudié à fond. Les tentatives de les expliquer uniquement par des conditions climatiques, la suffisance de la base nutritive, le nombre des rapaces et des prédateurs, l’activité solaire n’ont pas abouti. Une combinaison de nombreuses causes, y compris la fertilité des mammifères, paraît plus crédible.
L’animal est très prolifique. Il a été calculé que la progéniture d’une paire, même si la moitié périt, représentera une centaine d’individus dans trois ans !
Nous n’avons pas eu le temps de vous parler d’un autre habitant curieux de la toundra – le renard blanc. Mais nous vous promettons de le faire dans l’une de nos futures émissions consacrées à l’Arctique.
Merci d’avoir aimablement suivi cette édition du « Club des Voyages » et à mercredi prochain sur les ondes de la « Voix de la Russie » !
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