Surnoms, blagues sexistes, main sur la cuisse: des étudiants en médecine dénoncent le sexisme

© Photo Pixabay / fernandozhiminaicelaUn médecin avec un stéthoscope (image d'illustration)
Un médecin avec un stéthoscope (image d'illustration) - Sputnik Afrique, 1920, 24.03.2021
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D’après une enquête réalisée par une association d’étudiants en médecine, plus d’un tiers des futurs professionnels de la santé français, les femmes principalement, font face à des remarques sexistes et du harcèlement pendant leurs études. Peu d’entre eux ont pourtant envie de dénoncer ces actes.

Sexisme ordinaire, harcèlement sexuel, voire agression sexuelle… L’Association nationale des étudiants en médecine de France (ANEMF) dénonce dans un rapport les problèmes rencontrés par certains élèves à la faculté ou à l’hôpital.

Selon l’enquête, près de quatre jeunes sur dix (39%) ont déjà essuyé pendant leurs études des remarques sexistes. Les femmes en sont la cible 3-4 fois plus souvent que les hommes.

«Des surnoms comme "ma biche", "ma belle" m’ont été donnés par les internes en stage de chirurgie malgré le fait que j’exprime clairement mon désaccord. Le fait d’exprimer mon désaccord a été une source d’excitation et de défis pour les internes en question», raconte une jeune femme.

D’autres témoignent de préjugés sexistes comme: «Vous avez volé la place d’un homme en faisant médecine» ou «On manque cruellement de femmes pour ranger les dossiers».

De plus, 30% des répondants disent avoir été victimes de harcèlement au cours de leur formation hospitalière, et la prévalence chez les femmes est près de quatre fois supérieure à celle des hommes. Dans neuf cas sur dix, le coupable est un supérieur hiérarchique.

«Les chiffres parlent d’eux-mêmes. Le milieu universitaire et hospitalier où évoluent les étudiants est lourdement marqué par les violences sexistes et sexuelles», indique l’enquête.

«Outre les petites réflexions, "blagues" sexistes et aprioris non fondés surtout envers les patientes j’ai été confrontée au sexisme au bloc opératoire. Le chirurgien posait des questions personnelles d’ordre sexuel/orientation sexuelle de façon très insistante, il portait un regard malsain sur moi», selon un témoignage.

Toutefois, la proportion d’étudiants ayant vécu une agression sexuelle pendant leur formation à l’hôpital est réduite (5,2%). À la faculté, en revanche, ces agressions touchent 15% des élèves, entre pairs le plus généralement.

«Un infirmier m’a fait des avances que j’ai refusées à plusieurs reprises. Maintenant il vient "m’aider" à faire les gaz du sang et met sa main sur mes cuisses», rapporte une témoin.

Les signalements ne servent-ils à rien?

Presque la moitié (43%) des étudiants considère qu’un signalement ne servirait à rien:

«Et il est vrai que même quand ça arrive, c’est tellement l’omerta à l’hôpital, avec des menaces qui planent sur nous si on dénonce un chef, que personne ne dit rien de peur d’être ensuite en difficulté pour la suite de nos études.»

45% des étudiants estiment que malgré une dénonciation, la personne mise en faute n’aurait pas changé de comportement.

L’impact

Les violences sexistes et sexuelles ont des répercussions sur la vie personnelle (c’est le cas de 78,4% des personnes interrogées). Un tiers (35%) a répondu que ces violences avaient aussi eu un impact sur leur vie professionnelle: les victimes sont devenues moins appliquées, ne veulent plus aller en cours ou ont même envie de changer de métier.

«Les petites remarques sexistes quotidiennes de la part des médecins/chirurgiens font mal aussi et donnent envie de choisir une spécialité où il y a une présence forte de femmes pour ne pas vivre ça tous les jours de ma vie», raconte une victime.

La sensibilisation

Pour sécuriser les conditions de travail de l’ensemble des professionnels hospitaliers et des patients, l’ANEMF propose de mener un travail de sensibilisations aux violences sexistes et sexuelles de manière obligatoire, ainsi que de créer un guide sur celles-ci. Ce guide devrait être diffusé auprès des étudiants pour les informer des possibles démarches et sanctions juridiques, disciplinaires et universitaires.

L’enquête a été réalisée auprès de 4.500 étudiants en médecine du 8 mars au 30 avril 2020 et publiée en mars 2021.

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